Je voudrais exprimer ici mes doutes, et mes déceptions sur ce qu’est devenu le bio.
Pour vous situer ma façon d’être envers la nature afin qu’il n’y ait pas d’amalgame entre ma déception et le fait que je ne sois pas du tout opposée au «bio».
Comme tout bon citoyen je trie mes ordures et en produits le moins possible, j’ai à ce propos utilisé des couches lavables pour mes 2 enfants, allaité ( le côté nature et le «zéro d’adjuvant» et le moins de déchets possibles a participé à ma décision d’allaitement relativement long). Je choisi toujours des légumes et fruits de saison et locaux pour minimiser les transports de l’autre bout de la planète complètement aberrants, je choisis toujours des laitages avec le moins possible d’emballages, je ne jette rien dans la nature.....Ce sont pour moi uniquement des actes logiques, rien de réellement écologiques ou biologiques.
Je suis vétérinaire de formation, j’ai donc durant mes études visité des élevages dits biologiques.
C’est quoi le biologique?
C’est une méthode de production qui respecte un cahier des charges défini par le ministère de l’agriculture.
Pour la production animale j’ai pris l'exemple de l’élevage cunicole (lapin) (recenser toutes les sortes de production animale est trop fastidieux et serait sans grand intérêt ici):
Donc le cahier des charges pour la cuniculture labelisée biologique est:
- animaux né sur le site dit bio ou provenant d’une autre exploitation labelisée bio (sauf exception: extension du cheptel et pas suffisamment d'animaux disponibles pour la reproduction, les animaux non issus de l’agriculture biologique doivent passer par une période de transition dite de conversion de 3 mois pour les lapins.
- locaux: au minimum avoir un terrain d’exercice extérieur bétonné (l'herbe est naturellement possible aussi mais l'enclos devra être plus grand) ouvert sur au moins 1 cotés, et clapier paillé ou copeaux de bois (caillibotis interdits), l’accès à l’extérieur doit être possible dès que le climat le permet et que le stade physiologique de l’animal le permet (c’est assez vague), l’élevage exclusivement extérieur est possible comme celui de recours aux enclos mobiles.
- âge de reproduction les lapines doivent avoir 4 mois (16 semaines) ce qui est juste du bon sens, dans la mesure où la maturité sexuelle est atteinte à cette période ou juste avant, en cours c’est donc ce que j’avais appris: mise à la reproduction des femelles à 16 semaines (mais c’était ce qui était préconisé dans des exploitations classiques)
- densité de peuplement: je vais prendre l’exemple des lapin à l’engraissement:
- en bâtiments intérieurs: 6,6 lapins par m2
- en enclos mobiles: 2,5 lapins par m2 (les enclos doivent être déplacés tous les jours)
- en parcours extérieurs sur herbe: 0,2 lapin par m2
- en parcours extérieurs bétonnés: 0,5 lapin par m2
- pour l’abattage et le transport: les règles sont les mêmes qu’en agriculture classique
âge d’abattage à 100j (comme les labels rouges par exemple)
- alimentation doit provenir de l’agriculture biologique, l’allaitement exclusif (maternel ou naturel) doit avoir lieu jusqu’à 3 semaines (idem qu’en agriculture classique), elle doit être constituée au minimum de 60% de fourrages (frais, séchés, ou déshydratés), ce qui est logique et la base même de leur régime alimentaire.
les additifs alimentaires sont autorisés s’ils figurent sur la liste prédéfinies (annexe 4 de ce cahier des charges aux ministères de l’agriculture, je n’ai pas cherché cette fameuse liste)
les aliments en conversion (cf supra) sont autorisés sous certaines conditions (que je n’ai pas trouvé)
- pour les traitements vétérinaires dits allopathiques (chimique et antibiotiques): les animaux reproducteurs ont le droit à 2 traitements par an, au delà ils doivent repasser par une phase de conversion de 3 mois, pour les lapereaux à l’engraissement ce nombre de traitements est limités à 1 par an avec un temps d’attente * de 30j quelques soit le produit utilisé
Je n’ai rien trouvé sur les traitements prophylactiques à base de vaccins, je suppose qu’ils ne sont pas soumis à réglementation (puisque qu’on n’en retrouve pas de trace dans la viande et qu’ils ne fonctionnent que sur un animal vivant....mais là encore je trouve le cahier des charges obscur.
La différence que je peux noter par rapport à un élevage non biologique: ce sont: sur le nombre de traitements vétérinaires, sur aussi la densité d’animaux et sur la provenance de leur alimentation.
La conversion d’un élevage classique aux normes «bio» coutent très cher, essentiellement en audits d’élevage pour obtenir le label.
Ce que je peux dire c’est que la majorité des élevages non «bio» que j’ai pu visiter au cours des mes études et que mon mari continue à voir, respectent assez bien les conditions de densité, que bien souvent le nombre de traitement dit vétérinaire est aussi respecté.
A l’heure actuelle que ce soit via les publicités ou via les les médias, on diabolise l’agriculture classique qui mise à part quelques très gros agriculteurs peu scrupuleux du bien être animal, la très grande majorité respecte bien les animaux et leur alimentation. Les photos qu’on nous montrent à la télé sur les élevage en batterie qui font pitié ne sont pas du tout courant, voire plus vus en France depuis longtemps.
Les médias comme les publicités vont nous montrer ces élevages «atroces» bien souvent les photos sont prises à l’étranger (parce qu’en France même sur l’agriculture non biologique il y a des normes), et des animaux déambulant tranquillement dehors comme dans «la petite maison dans la prairie» pour la version «bio». Or la majorité de leur temps les animaux bio vivent en intérieur et que bien souvent les animaux non «bio» (j’utilise cette abréviation bien que tous les animaux soient biologiques puisque ce ne sont ni des êtres artificiels ni des robots) ont aussi accès l’extérieur.....
Je voulais juste remettre les choses à leur place, entre ce qui est fait et ce qu’on nous montre parce que la différence entre bio ou non n’est pas si franche.
Les labels de qualités comme le «label rouge» ressemble beaucoup à celui du bio, sans toutefois l’obligation d’avoir une alimentation des animaux dite «bio», la qualité organoleptique sera donc imperceptible.
Et puis je vais vous raconter une histoire vraie que j’ai vu de mes yeux: en 4eme année, nous allions visiter un élevage mixte bovin ovins, il avait le label «AB», alors oui l’agriculteur ne vermifugeait pas ses bêtes ou qu’une fois par an (ou avec de l’homéopathie), oui il n’avait que peu recours aux antibiotiques si incriminés, mais lorsque nous y étions les moutons étaient atteints de gale (perte de rentabilité sur les produits secondaires comme la laine et le cuir), et bien pour les traiter comme il avait déjà utilisé son quota de traitement, il badigeonnait tous les 2 jours les moutons atteints par de l’huile de vidange à laquelle il avait ajouté du souffre (ça étouffe les acariens), sauf que les hydrocarbures ça passe la barrière cutanée, qu’on ne sait pas le temps qu’il faut pour n’en retrouver aucune trace dans la viande, que c’est pas du tout biologique dans l’idée (j’ai revu ce procédé à plusieurs reprises dans différentes exploitations bio).
L’idée du bio c’est bien, ça part d’une très bonne idée: vouloir avoir un mode de production qui respecte au mieux l’environnement, mais ne confondons pas tout: je crois qu’il est important de ne pas associer label bio et des élevages «bisounours» (les éleveurs rechercheront un max de rentabilité, le bio ne veut pas dire élevage extensif, d’ailleurs en élevage extensif il serait impossible de nourrir tous les être humains ), qualité organoleptique et élevage bio (parfois c’est associé, mais tout ce qui est bio n’est pas meilleur en goût, les labels de qualité en revanche sont sensés les garantir), agriculture bio et humanitarisme.
Pour l’association communément faite entre «bio» et santé, il semblerait que ce soit vrai.
Pour consommer mieux, parce que je pense que la plupart des gens qui achètent bio ont ce souhait, je crois qu’il est important de connaitre les élevages de provenance des viandes, pareil pour les végétaux. Je connais près de chez moi des agriculteurs très au point dans leur mode d’élevage utilisant très peu de médicaments, tout en gardant un élevage sain et rentable, sans label «bio» et je préfère consommer chez eux que d’acheter du «bio» dont je ne connais pas la provenance, ou qui viennent de loin.
La bien-pensance (la pensée unique) qui vise à culpabiliser les gens qui oseraient critiquer le «bio» me saoule parce que je pense que dès lors qu’il s’agit de sous (on vend plus cher du bio, et les agriculteurs ne sont souvent pas riches donc sont à quelques euros près) et bien les bonnes volontés peuvent se retrouver corrompues.
Et puis quoi penser des kiwi «bio» provenant de l’autre hémisphère, des haricots verts «bio» venant d'Afrique du sud, ou les mangues bio venant des caraïbes? peut-on toujours les considérer comme bio avec tous les km parcourus? moi je trouve ça débile et très hypocrite, je n’achèterais pas bio pour me donner bonne conscience, si j’achète bio c’est soit que j’ai gouté et que j’ai vu une différence, soit qu’il n’y a de produits équivalents dont je connais la provenance....je préfère acheter local que bio, si on peut réunir les deux et bien tant mieux. Je préfère fabriquer moi même ce que je peux faire moi même plutôt que d’acheter bio (genre les cosmétiques, ou l’huile d’olive). Le bio n’est pas une garantie de qualité, n’est pas une garantie absolue aux bonnes pratiques d’élevage, le bio est une façon d’acheter sa bonne conscience pour la majorité des gens, et c’est bien dommage.
Je ne fais pas une ode contre le bio, juste une remise au point sur des idées reçues souvent fausses, contre la diabolisation de l’agriculture classique et qui la majorité du temps est raisonnée et raisonnable.
J’ai failli monter ce topic sur la dérive des «labels» parce que c’est fréquent: utiliser une bonne pensée pour faire vendre : dire si vous achetez 300 couches kakabeurk pour les fesses du bébé, vous êtes gentils et vous pouvez continuer à polluer parce que on va vacciner 3 ou 10 que sais-je «petits enfants pauvres et orphelins» (de préférence noirs parce que ça fait encore plus «bonne action»).....on vit à une époque où on achète sa bonne conscience à coup (coût) de labels «bio», «commerces équitables», le mécénat n’existe pas vraiment en France, la consommation occidentale contre des vaccins pour les enfants du tiers monde, alors que franchement il serait tout à fait possible à ces grandes fermes multi nationale de donner pour les vaccins sans prendre les «gentils» consommateurs en otage (achetez chez nous et vous financerez une bonne action).....
N’hésitez à partager vos avis, je sais que c’est un sujet à polémique, que les préjugés sont ancrés et difficile à battre, je suis ouverte aux discussions et prête à remettre mes idées en doute.
C'est un peu long mais j'ai pas réussi à faire moins long tout en restant proche des mes idées, et sans un minimum de documention (ps le cahier des charges sur l'élevage cunicole bio est celui du ministère de l'agriculture)