Tout d'abord je veux rappeler quelques postulats simples :
- Si le diagnostic de haut potentiel ne peut être posé que par un professionnel ayant réalisé un bilan comprenant des tests de QI, le bilan et les tests de QI peuvent ne pas apporter de diagnostic certain, et cela sans que la compétence du professionnel ne soit mise en cause.
- Un test de QI, comme tous les tests standardisés touchant à des éléments de l'humain, n'est pas une radio pouvant vérifier la présence d'une fracture. Un test de QI n'est pas une prise de sang pouvant vous dire avec certitude que vous avez, par exemple, une hypercholestérolémie. Un test de QI vous situe par rapport à une courbe de Gauss à un instant donné et sur divers domaines de votre fonctionnement cognitif.
Je vous propose ici de prendre le problème du diagnostic et de ses implications en me plaçant du côté du professionnel.
Recevoir un patient, c'est avant tout et en général recevoir une personne avec une plainte :
Le diagnostic final n'est pas la première chose que nous avons en tête. Le premier de nos soucis est : la demande. Que vient nous demander cette personne ? Pourquoi ?
Comment allons-nous pouvoir comprendre d'où cela peut venir ? = quels bilans, quels tests pratiquer ?
Avec pour finalité : comment allons-nous pouvoir l'aider ?
Notez que comprendre immédiatement d'où cela peut venir est un plus pour proposer une prise en charge adaptée et donc efficace, mais ce n'est pas non plus une condition sine qua non à la mise en place d'une aide quelle qu'elle soit, d'autant que fréquemment ceci se précise à l'évolution.
L'anamnèse permet de balayer la demande dans son ensemble (la plainte), de faire ressortir les premières hypothèses étiologiques (choix des tests). Il n'y en a jamais qu'un seul facteur étiologique, il ne faut pas rêver, ainsi la douance n'échappe pas à la règle, elle n'est pas L'Explication avec un grand E, à tout ce pour quoi vous consultez.
> Ainsi, posez-vous cette question avant de consulter : quelle est ma plainte ?
Et tâchez de réfléchir à la manière de la poser au mieux afin que le professionnel puisse bien cerner votre demande.
Le patient qui arrive avec ses propres hypothèses
Recevoir un patient qui propose déjà son diagnostic et nous demande de bien vouloir le vérifier ou l'infirmer est devenu courant avec internet (les gens se renseignent, croient trouver eux-mêmes LA solution) et nous savons que nous provoquons des déceptions lorsque nous n'avons pas pour finir un OUI ou un NON clair sur cette proposition précise.
Nous savons que les gens se sont raccrochés à cela, pour poser des mots sur quelque chose qui les ennuie ou les entrave.
Le problème est que cette hypothèse diagnostique masque la plainte initiale, celle qui vous a conduit à rechercher des réponses.
Nous proposons des pistes, nous proposons notre propre explication, et souvent, les patients les plus accrochés à leur idée initiale n'entendent pas vraiment... Ce sont généralement ceux-là qui naviguent de cabinet en cabinet (ou de forum en forum) à la recherche de la validation de leur idée, DU professionnel le plus compétent du coin... jusqu'à ce qu'ils comprennent que les solutions sont à côté, là où ils ne regardent pas. C'est souvent beaucoup de temps de perdu et la plainte perdure, cachée derrière l'hypothèse.
Recevoir un patient qui propose déjà son diagnostic, c'est donc être placé dans une position délicate où notre rôle initial d'aidant est court-circuité.
Recevoir un patient qui propose déjà son diagnostic enferme et nous condamne en quelque sorte à répondre d'abord par oui ou non (ou peut-être), avant même de cerner la plainte dans sa globalité.
Pour le patient, c'est aussi réducteur, et nos réponses lui laissent parfois un goût d'inachevé.
> Ainsi posez-vous cette question avant de consulter : et si le test de QI n'était pas le test le plus adapté à mon cas personnel ? Et si j'occultais d'autres pistes ? Et si le professionnel propose autre chose, suis-je capable de lui faire suffisamment confiance pour entendre voire écouter ce qu'il a à me dire ?
Tests et interprétations
Il n'y a pas d'interprétation universelle, de même qu'il n'y a pas de catégorisation absolue des humains possible.
Dans la vraie vie, nous, professionnels, que nous soyons psychologues, orthophonistes, psychomotriciens, que sais-je encore, ne rencontrons pas tous les jours ces "cas d'école" qui entrent dans tous les tableaux sans qu'un cheveux ne dépasse.
Nous rencontrons des gens, des vrais gens, qui, outre leurs troubles potentiels, traînent des vécus multiples qui sont autant d'éléments venant interférer dans la démarche diagnostique et qu'il est impossible de mettre de côté en tranchant de manière absolue sur ce qui est en lien avec la plainte initiale du patient, ou ce qui ne l'est pas.
Grand expert ou pas, chaque professionnel est confronté à cela.
Oui, parfois nous ne savons pas. Parfois les choses sont tellement imbriquées les unes dans les autres qu'il n'est pas possible de poser un diagnostic sûr. Pour personne, même pour le pro le plus doué de sa catégorie.
C'est ce que je ressens souvent lorsque je reçois des enfants; pour un adulte c'est encore pire : la durée du vécu et la multiplicité des expériences rend le ou les troubles tout à fait multiformes et parfois tous les bilans complémentaires du monde ne peuvent fournir d'explication satisfaisante. C'est ainsi. Il faut l'accepter.
Les QI hétérogènes qui ne permettent pas de trancher peuvent s'expliquer par l'existence de troubles associés, ou pas. Et particulièrement chez un adulte il faut bien se dire que l'hétérogénéité serait plutôt la règle que l'inverse.
Cela tient au vécu, aux chemins que nous avons pris, à la manière dont a été géré le potentiel de départ, dont on a été éduqué, dont nous avons appris, ce que nous avons naturellement privilégié...
Autrement dit l'image que les tests donnent du potentiel n'est pas pure, mais elle est entremêlée avec nos constructions psychiques, nos travers, nos angoisses, et tout ce qui agit sur nos performances. Ils donnent une très bonne indication, mais parfois ils ne sont juste pas concluants.
Il faut bien comprendre tout cela avant même d'entamer une démarche auprès d'un professionnel. Il faut aussi bien cerner vos motivations, savoir ce que vous allez chercher, et vous rappeler des raisons qui vous ont conduit à rechercher, déjà, un "diagnostic". Il faut avoir à l'idée que vous trouverez des pistes mais sans doute pas toutes les réponses.
Quelques liens de sujets où ceci a été évoqué :
http://adulte-surdoue.fr/tests-psys/qua ... -t335.html
http://adulte-surdoue.fr/tests-psys/les ... t2654.html
http://adulte-surdoue.fr/tests-psys/hau ... -t389.html
http://adulte-surdoue.fr/tests-psys/qua ... t2697.html
Je sais qu'il y a ici quelques professionnels à qui ceci va parler, n'hésitez pas à apporter des compléments.