Lecture-Torture

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Tyflore
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Message par Tyflore »

Bonjour,

Je franchis donc le pas et initie mon premier topic !

Je trouve qu'on ne vilipende pas assez certains auteurs pour leurs ouvrages parfois (assommants/dénués d'intérêt/sans fantaisie) rayer la mention inutile. Dans le but de me sentir moins coupable j'ouvre donc ce topic (qui nous sera bénéfique, à tous, par son effet cathartique).

J'ouvre donc le bal de ces livres qui vous tombent des mains avec un roman que je n'ai pas pu finir : Réparer les vivants de Maylis de Kerengal.

Je l'ai trouvé assez barbant. Les tournures de phrases sont trop alambiquées, et l'historie est suffisamment bancale pour qu'on perde le fil de la lecture avec toutes les circonvolutions auxquelles elle s'adonne.

Et vous ? Quels livres vous posent problème ?
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enufsed
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Re: Lecture-Torture

Message par enufsed »

Forcément quand on met du Musil en citation (et qu'on s'est farci les deux volumes de l'homme sans qualité), c'est difficile de passer sur du Kerengal :huhu:

J'ai jamais eu de problème spécial avec les livres, en général je sais d'instinct ce qui captera mon attention. Après je dis pas que je passe pas à travers un bouquin mais la difficulté de lecture est plutôt une bonne chose avec moi (Joyce par exemple).

À part la phéno de l'esprit de notre ami Hegel...euh si j'ai un souvenir de survivant sur les deux tomes infinis de Au bord de l'eau un truc chinois de 2000 pages que dans mon acharnement habituel j'avais mis un point d'honneur à finir (comme Musil mais ça c'était bien même si j'ai tout oublié!). L'auteur de ces pavés c'est Shi Nai-An, et ça date du XIVe (un peu comme se farcir tout l'Astrée en somme) :whew:

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Miss souris
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Re: Lecture-Torture

Message par Miss souris »

Là, comme ça, je dirais L'Elegance du Hérisson. Coming out : je l'ai toujours soigneusement caché, vu l'enthousiasme que ce livre a provoqué même chez des gens que j'aime, mais pour moi, c'est une succession de poncifs, alors que c'est sensé les dynamiter. ( Faut que je fasse attention, je finis par parler avec les mêmes formules toutes faites que dans le programme du Off d'Avignon...ça doit se trouver sur le net, et je vous recommande chaudement / c'est de saison... la lecture de ces critiques qui n'en sont pas...plus de 1000 spectacles et un bon gros paquet qui se ressemble... Faites vos propres catégories, en voilà un jeu sympa pour l'apéro, ne me remerciez pas, où en étais-je ?)

Donc. Ce Hérisson. Dynamitant les poncifs. Où la Concierge qui veut passer pour une Concierge met bien en évidence sa tranche de jambon, en cachant dessous le plat élaboré qui symbolise qu'en fait elle est bien plus complexe que la tranche de jambon. Ce qui sous entend donc que seuls les gens frustes mangent du jambon. Ce Hérisson, où le comble du raffinement est porté par le personnage japonais. Originaaaal ...Et pareil : la culture de la Concierge, acquise en cachette parce qu'elle est concierge, bien sûr, c'est la liste des livres à lire pour avoir l'air cultivé en société... Et vous avez compris mon idée : l'ado associale parce que tellement différente des autres, elle aussi répond à un cahier des charges assez standard pour sa catégorie...

Donc, et pardon pour ceux qui aiment, mais pour moi, on a affaire à une dynamitage de poncifs qui ne fait que les conforter inconsciemment, puisque ledit dynamitage Intègre le poncif... La vraie transgression aurait été que la concierge mange son jambon par plaisir !

Tiens, je vous livre une pépite festivalière dynamiteuse de clichés : Machin et Machine forment un couple hors norme. En effet, Machin aime le sentiment et la délicatesse, alors que Machine aime faire l'amour et regarder le foot... Voilà. Pour moi, c'est le même esprit.

Vous l'aurez compris, je ne lirai pas la suite du travail de Muriel Barbery... :huhu:

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Tamiri
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Re: Lecture-Torture

Message par Tamiri »

Un jour qu'avec un groupe d'amis nous cherchions, pour notre second court métrage en amateur, un sujet concis, contemporain et compréhensible (notre premier film était un concentré de private jokes), quelqu'un m'envoya un recueil de nouvelles d'Anna Gavalda en recommandant tout particulièrement à mon attention l'un des récits. L'ouvrage m'est effectivement tombé des mains, quoiqu'il fût mince, et l'intérêt que son expéditrice lui accordait m'apparut d'autant plus mystérieux que cette personne, du reste, connaissait à peu près mes propres goûts littéraires, et disposait aussi d'une culture plus solide que la mienne en la matière.
Or :
Je ne m'intéresse pas spécialement aux récits psychologisants et donc encore moins quand cette prétention sert à ne pas entrer directement dans la catégorie des récits sentimentaux ;
J'avoue bien humblement ne lire que très peu de littérature de fiction contemporaine et donc n'avoir que peu d'éléments de comparaison ; et quand je le fais, ce n'est pas pour me replonger dans la banalité de mes semblables.
Par ailleurs, je suis assez formaliste, c'est-à-dire que je préfère les écritures un peu travaillées, ce qui me délecte le plus se trouvant être la tragédie classique en vers. J'en ai besoin, disons, à la manière de quelqu'un qui, en musique, aurait du mal à sortir de la musique tonale. Pour un texte contemporain dans une langue actuelle, je peux faire un effort si le sujet m'intéresse. Mais s'il est truffé de dialogues transcrivant la langue orale, c'est beaucoup m'en demander.
Abondance de dialogue qui fait, d'ailleurs, que je n'ai jamais compris en quoi il aurait alors fallu m'en confier la réalisation, à moi plutôt qu'à l'un de mes deux comparses apprentis-réalisateurs, puisque mon truc, c'est le muet !
Si j'ai bien compris, ce genre de littérature séduit un public qui recherche l'identification plus que l'altérité ; pour moi, c'est fondamentalement morne et ennuyeux, et esthétiquement, j'hésite entre lisse et moche.
Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil Poil

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Kliban
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Re: Lecture-Torture

Message par Kliban »

Je suis dans un groupe de lecture. C'ers un peu compliqué depuis quelques temps, la plupart des livres proposés me tombent des mains.

Certains sont pourtant objectivement bien écrit, comme ce Chardonneret de Donna Tart - j'ai un mal de chien avec la littérature américaine, bavarde. L'idée du livre est stimulante, et j'aurais pu, je pense, aller au bout, n'étaient le nombre de pages prohibitif, ramené à la logorrhée propre aux auteurs d'outre-atlantique et l'absence de réelle intrigue prenante (il y a du post-moderne, dans ce roman en première personne où il faut sans cesse se demander qui est le narrater pour qu'il nous raconte ce qu'il nous raconte). Bref, je n'ai pas pu.

Mais il y eut pire, comme ce Les dieux voyagent toujours incognito (Laurent Gounelle), poncif de toutes les théories du coaching tout comme Le monde de Sophie le fut de la philosophie (et que je range dans la même catégorie des insupportables). Niaiseux, didactique, saturé de fils blancs mal cousus. Je n'ai pas pu (je suis désolé si l'auteur est sur ce site...).

Il y a aussi une bonne partie de ce qu'Onfray écrit désormais. A ire des textes militants, allons voir Césaire ou Fanon. A lire des textes au réactionnarisme déo-décadent, Houellebecq, oui. A lire des philosophes en violence avec le monde, Badiou. Mais Onfray... Je ne peux tout simplement pas m'accommoder de ce que je perçois comme des vomissures de mauvaise fois sans équilibre - il y a peut-être là du militantisme, et ne se présenterait-il pas sous les guises du penseur, je pourrais être séduit. Mais il y a si peu de pensée et tant de prétention, que... c'est juste pas possible. Du moins c'est l'impression que j'en ai eu il y a plus de dix ans et qu'aucune de ses interviews n'est parvenu à modifier.

Ah, oui. David Eddings. Les deux cycle, Belgariade et Mallorée. Un peu de fantasy. Beaucoup de puritanisme adolescent-américain. Tout le monde est amoureux, les hommes courent après les femmes, les femmes hésitent, on ne couche pas, on évoque le marriage, la possibilité de marriage, les ruptures de promesse de marriage, etc. Comme Orson Scott Card (La voix des morts, Xénocide) avec moins de style et bien moins d'inventivité dans l'imaginaire. Bref, j'ai failli bruler les livres (je ne lis pas trop de fantasy pour y retrouver les émotions didactiques qu'un puritanisme de bazar réserve à ses teenagers ; et quand la construction des rapports entre personnages se résume à cela, j'ai juste envie de brûler le livre).
De main gauche à main droite, le flux des savoirs - en mes nuits, le règne du sans-sommeil - en mon coeur, ah, if only!, le sans-pourquoi des roses.

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Re: Lecture-Torture

Message par sandrinef »

Hors-sujet
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Belgha
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Re: Lecture-Torture

Message par Belgha »

Lorsqu'on a écrit plusieurs milliers de pages, publié plusieurs centaines, on s'assagit.
On ne critique plus au lance flammes ceux qui travaillent du stylo ou du clavier, même si leur production nous semble objectivement plus mauvaise encore que la nôtre.
Les seuls à ma connaissance qui écrivent mal des choses intéressantes sont ceux qui le font pour se faire plaisir, et c'est bien normal. Ceux-là n'ont nullement besoin d'être descendus en flammes mais aidés, s'ils le souhaitent, car écrire est un métier beau, exigeant et pénible.

Désolé de déterrer ce sujet mais étant moi-même un discutable auteur, je ne pouvais pas demeurer silencieux.
Quant à la déforestation, sachez que non seulement écrire ne rapporte quasiment rien, mais qu'en plus les auteurs sont bien souvent heureux de payer (via leur éditeur) des taxes de "reforestation" qui compensent très largement le bois utilisé pour la fabrication du papier. Par contre, ils ne peuvent pas être tenus responsables des abus de certains exploitants.

Aussi, je présente par avance mes excuses les plus humbles aux éventuels lecteurs à qui mes romans ont cassé les poignets, et leur propose de leur rembourser l'achat du livre, déduction faite des 5% de mes droits d'auteur, sur présentation du ticket de caisse (et je récupère évidemment le livre :devilish: ).

Je suis pour la diversité, la très foisonnante, la vertigineuse diversité, y compris en littérature.

Bien amicalement

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Re: Lecture-Torture

Message par cherubim »

Hors-sujet
@Belgha: je ne saurais qu'approuver. Encourageons les métiers du livre, les auteurs et les lecteurs. Ils en ont bien besoin par les temps qui courent! De plus, la critique est facile, l'art est difficile.
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Pataboul
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Re: Lecture-Torture

Message par Pataboul »

Hé quand même, il est bien légitime d'avoir ses goûts et de ne pas apprécier tout ce qui est publié! Et puis la critique de l'oeuvre n'est pas forcément critique du travail ou de l'auteur, et quand bien même, une critique constructive est aussi un outil pour progresser.

Moi y'a deux livres que j'ai profondément détesté, deux lectures obligatoires du lycée. Et pourtant j'étais un boulimique de lecture, et à cette époque je n'avais pas encore refermé un livre sans l'avoir terminé, même des trucs très mauvais (un peu comme quand on voit le début d'un téléfilm naze, qu'on a deviné la fin et les rebondissements au bout de 5 minutes, mais qu'on continue de regarder au cas où il se passerait quelque chose de surprenant). Depuis, j'ai perdu tout scrupule à lire en diagonale, sauter des pages ou juste abandonner la lecture. Je lis par plaisir, et si ce plaisir est absent je ne me sens plus redevable envers l'auteur et ses efforts au point de m'infliger une "torture".


Il y a eu d'abord "le tour d'écrou" de Henri James. Je suis incapable de vous dire ce qui m'a déplu. Malgré quelques efforts j'ai été totalement incapable de progresser dans sa lecture, je crois que tout me rebutait.

Le second est bien connu: "les confessions" de J. J. Rousseau. Alors lui j'ai fini par le lire en entier, longtemps après l'obligation, car à l'époque mes camarades faisaient tout un foin d'un ou deux passages grivois et j'étais encore un ado :D . Ma critique ne porte pas sur l'écriture, sans doute de qualité, mais sur le propos que j'ai trouvé d'une infinie hypocrisie: sous prétexte de dire "toute la vérité, rien que la vérité" et de faire son "mea-culpa", l'auteur, en fait, se trouve milles excuses à chacun de ses mauvais comportements. Pour moi c'est un recueil de mauvaise foi et puisque c'est autobiographique je me suis forgé une très mauvaise opinion de Rousseau que je tiens pour un grand pervers, quelqu'un qui déforme la réalité pour se dédouaner de toute faute, car s'il a fauté, c'est systématiquement à cause des autres, des circonstances ou de l'environnement. Rien que d'y penser je ressent à nouveau un profond dégoût.

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Re: Lecture-Torture

Message par Zourite »

Tyflore a écrit : mer. 18 juil. 2018 23:05
J'ouvre donc le bal de ces livres qui vous tombent des mains avec un roman que je n'ai pas pu finir : Réparer les vivants de Maylis de Kerengal.

Je l'ai trouvé assez barbant. Les tournures de phrases sont trop alambiquées, et l'historie est suffisamment bancale pour qu'on perde le fil de la lecture avec toutes les circonvolutions auxquelles elle s'adonne.
J'ai lu ce livre il y a longtemps. Il se peut donc que mon impression ne soit plus très précise, mais je partage ton point de vue sur les tournures de phrases qui m'ont beaucoup gênées. Je me rappelle de phrases interminables, avec très peu de ponctuation, et qui nécessitaient souvent une relecture (interminable également). J'en ai l'image étrange d'une vague qui ne s'arrête jamais.

J'ai l'impression (très personnelle) que c'est plus une intention de l'auteur qu'un style réel. Je n'ai jamais eu envie de lire d'autres livres de cet auteur donc ce n'est qu'une impression non fondée (si tant est qu'une impression doive forcément être fondée). Le thème et la façon dont il a été traité, est très intéressant, mais le style est un réel obstacle pour moi.

Quant à "L'élégance du hérisson", j'ai dû en lire une bonne moitié, mais je n'ai pas réussi à le finir, sans savoir expliquer pourquoi. Il est sur ma to-read-list mais ça ne me dit rien pour le moment.

Légère digression numéro 1 : Je suis très déçue lorsque je tombe sur un livre que je n'arrive pas à finir, et je ne parviens pas facilement à entrer dans une autre lecture, ce qui me fait passer par des phases de boulimie de lecture et des phrases d'abstinence complète.

Légère digression numéro 2 : J'ajouterais que, pour ma part, mon état d'esprit au moment de la lecture influence légèrement ma vision du livre (et ma capacité à en continuer la lecture ou pas).

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Re: Lecture-Torture

Message par cherubim »

[mention]Pataboul[/mention] : Naturellement, la critique constructive et éclairée est une bonne chose, surtout si elle donne lieu à la publication de nouveaux livres sur lesquels se pencheront avec assiduité de nouveaux lecteurs! :glasses:
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Loupiotte
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Re: Lecture-Torture

Message par Loupiotte »

Je suis d'accord avec Pataboul. Certes, il faut encourager les auteurs et l'écriture mais ça n'empêche pas de s'interroger et de tenter de comprendre pourquoi on n'a pas apprécié des livres pourtant voués aux nues par la critique et/ou le public. Pendant longtemps, je n'arrivais pas à lâcher un livre en cours de route par sentiment de devoir ou de respect envers l'auteur même si le livre en question me rebutait ou ne m'attirait pas. Maintenant, c'est fini. Si je n'apprécie pas, tant pis !

Moi aussi j'ai lu l’Élégance du Hérisson avec le même ressenti que précédemment décrit. Ça fait du bien de voir qu'on n'est pas tout seul à penser la même chose !

Ah ! Les Confessions... Grand moment de mon adolescence... Ce qui m'a le plus exaspérée dans ce livre, et ça rejoint ce que tu dis [mention]Pataboul[/mention] , c'est la naïveté réelle ou affichée de Rousseau qui se retrouve dans des situations pas possibles mais comme s'il n'y était pour rien, comme s'il n'avait rien vu venir et comme si rien n'était de sa faute...Et on a l'impression que Rousseau ne tire jamais aucune leçon de ce qu'il vit. Aucune évolution donc. Quand on a repéré ce défaut, lire cette autobiographie devenait insupportable. Dès qu'il recommençait à expliquer avec son ton candide qu'il ne l'avait pas voulu, qu'il l'avait fait malgré lui, blablabla, j'avais envie de jeter le livre par la fenêtre.
Mais pour le dédouaner un tout petit peu, je me demande à quel point cette niaiserie affichée n'est pas une "tradition" dans les premières autobiographies,... On la retrouve un peu partout (même chez Casanova, et pourtant, il faut le faire !) ou dans de fausses autobiographies comme La vie de Marianne de Marivaux au point de se demander s'il ne s'agit pas d'une stratégie pour se prévenir des critiques des contemporains. Après tout, c'étaient des milieux où ils se connaissaient tous... Tout n'était donc pas forcément avouable malgré le "pacte de sincérité" voulu par ces auteurs... Même dans l'Antiquité, on retrouve ce défaut dans les correspondances épistolaires (lues en public à l'époque). J'ai développé un fort ressentiment teinté de mépris envers Cicéron en raison de sa correspondance... Ce style plaintif à longueur de lettres, ces gémissements, ces "tout le monde, il est méchant sauf moi" et j'arrête là car je suis en train de m'enflammer devant mon clavier... Un calvaire à lire et à traduire ! Bref, je pense qu'il s'agit d'un procédé courant qui est censé attirer la bienveillance / sympathie du lecteur mais je crois qu'il a mal vieilli. On ne le supporte plus.

Sinon, dans les livres "récents" qui m'ont laissée... pantoise... Il y a la trilogie 1Q84 de Murakami que je n'ai pas réussi à finir... Le style est sans doute grandiose puisqu'il a été pressenti plusieurs fois pour le Nobel de littérature (mais difficile de juger avec une traduction, même excellente). Quant à l'histoire... J'avais beau creuser, je ne voyais pas où l'auteur voulait en venir. J'avais l'impression d'un grand vide derrière les mots.
Et enfin, je ne comprends pas non plus le succès d'une tétralogie : L'amie prodigieuse. Autant j'avais adoré le tome 1 pour le très beau style de l'auteur et pour la personnalité / cheminement des deux personnages principaux, autant je n'ai pas vu d'avancement dans la suite. On en était toujours au même point, toujours avec les mêmes personnages et les mêmes situations qui revenaient en boucle. Je n'ai pas pu aller au-delà du 2ème tome et un résumé des deux tomes suivants m'a confortée dans l'idée que j'avais bien fait de ne pas persister. Notamment, l'attachement de la protagoniste pour Nino a été tout bonnement fatal dans ma lecture. Déjà que je trouvais ce personnage vide, insignifiant et sans esprit dès le 1er tome, constater que 10 ou 20ans plus tard, l'héroïne ne s'en était toujours pas rendu compte et continuait à l'admirer béatement, à le désirer... Arrrrgh ! Non par pitié !

PS : tout comme Zourite, je suis déçue de ne pas réussir à accrocher à un livre... Je mets beaucoup de temps à choisir une lecture, j'ai besoin d'apprivoiser le livre. Je n'arrive pas à me lancer sur un coup de tête donc quand ledit livre, finalement, ne me plaît pas... Quelle tristesse ! Je passe ensuite pas une phase assez longue de non-lecture car je n'ai pas le courage de me lancer illico dans la recherche d'une nouvelle perle.

Belgha
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Re: Lecture-Torture

Message par Belgha »

Trois dernières petites choses peut-être pas tout à fait hors-sujet :
La première, je l'ai déjà dite mais je vais la répéter : vive la diversité ! Si vous saviez tout ce que les gens peuvent lire, partout sur la planète, vous seriez atterrés. C'est aussi cela, la diversité. Le corolaire de cette remarque, c'est que ce sont alors peut-être les lecteurs qu'ils faut critiquer de s'adonner à de si affligeantes lectures - ou éduquer - ou encore conditionner ?
Mais je suis pour la diversité des lecteurs également, ainsi que pour celle de leurs niveaux culturels ou intellectuels. Et tout simplement pour la diversité des cultures.

La deuxième chose, c'est que les auteurs n'écrivent pas spécialement pour être lus par des surdoués, déjà que vendre une dizaine de milliers de livres est un véritable exploit. Et s'ils le faisaient, les éditeurs leur renverraient leurs manuscrits accompagnés du courtois blabla habituel.
Enfin, bon, je ne vais pas tourner encore le couteau dans la plaie : ce monde n'est pas fait pour les surdoués :P .

Dernière chose. J'affirmais être pour la diversité. C'est vrai également pour les goûts (et les couleurs), et la liberté d'en parler. Chacun est donc libre, et même encouragé à avoir sa propre lecture - ou non-lecture, ainsi que sa propre opinion et son propre ressenti. Cela peut ainsi aller jusqu'à traiter les écrits de Michel Onfray de vomissures, allons-y pourquoi pas.
Aussi, puisque chacun est libre etc. je prends quant à moi la liberté de dire que ce genre de propos fielleux n'apporte rien, pas même à la personne qui l'a tenu. Je crains même qu'il lui nuise, d'une manière certaine. Ça c'est une critique constructive ?

Maintenant, promis, je n'interviendrai plus !
Bien amicalement,

enufsed
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Re: Lecture-Torture

Message par enufsed »

Je ne comprends pas très bien ta remarque sur les livres pour ou pas pour les surdoués : un livre écrit pour surdoué ça fonctionne comment ? Comme les semelles orthopédiques sous les pieds plats ? Pas de méchanceté dans mes propos mais s'il existe bien un monde où je me sens chez moi c'est la littérature et je ne suis pas persuadé que les plus grands commentateurs de Joyce ou Hegel soient des surdoués.
Pour ce qui est de la critique acerbe, il faut la mettre en regard de l'évolution de la chose littéraire : la notion d'auteur n'est pas consubstantielle du roman (à l'époque de la Princesse de Clèves, Madame de La Fayette réfutait avoir écrit ce roman, d'ailleurs il est fort probable que l'oeuvre fût le fruit d'une collaboration, le terme "roman" était d'ailleurs fort péjoratif). La consécration de la notion d'auteur est fort récente et à l'instar des pochettes de disques de musique classique qui sont devenues une machine à glamouriser des virtuoses de la flûte traversière, on ne compte plus ces mises en avant des purs sangs issus des écuries à fabriquer du Goncourt et du Femina, la mèche rebelle et le regard perdu au loin à la recherche, imagine-t-on, de la prochaine phrase décisive sur le genre humain. De cette starification à des fins commerciales inévitables répond un engouement (que j'attribue aussi à plein d'autres choses qu'on pourrait appeler la vacuité existentielle pour faire un gros paquet cadeau) de nos contemporains pour l'écriture : on écrit son livre comme on twitte sa minute chez le coiffeur, "il faut que le monde sache : cette laque est IN.CROY.ABLE" / "Il faut que le monde sache : ma vie est U.NIQUE". À titre personnel je me réserve le même droit de mettre au pilori l'indigence littéraire quand je pense la croiser que la nullité artistique qui s'étale dans les galeries de bord de mer où s'empilent des toiles pleines de voiliers trois-quart couchés dans un port coquet à marée basse (je vous invite à faire un tour à Honfleur, on n'en ressort pas indemne).
Ceci étant je ne critique pas la production de ces choses tant qu'elles sont le fruit d'une ambition strictement commerciale basée sur l'offre et la demande : j'adore aller chez un bouquiniste et feuilleter un roman coquin "Rodrigo la plaqua violemment contre le foin brûlant qui sentait l'écurie, elle sentit sa virilité heurter sa frêle complexion. Vaincue par cette force qui brisait toutes les barrières comme un torrent indomptable, elle oublia que son mari, Le Marquis, pouvait rentrer de sa chasse à cour à n'importe quel instant" (je me demande si c'est pas encore pire que ça :grin: ) Au moins c'est drôle parce que ça ne se prend pas au sérieux (comme les téléfilms de noël avec des chatons et des elfes en Harley-Davidson).
Quand on voit le nombre de publications à chaque rentrée littéraire (qui ne sont qu'une partie émergée de l'iceberg), on ne peut qu'être surpris par le désir de dire de tout un chacun et on doit aussi s'interroger sur la publication comme acte social : les maisons d'éditions choisissent de favoriser des lignes éditoriales en fonction de données multiples dont la rentabilité économique n'est pas la moindre.
Bref, je m'éloigne, mais je place mon droit à la critique acerbe au même niveau que les écrivains revendiquent le leur de proposer à la publication tout ce qui leur passe par la tête. La littérature et les sciences humaines subissent de ce fait une concurrence, comme au cinéma, de ce qui relève du divertissement, ce n'est absolument pas condamnable même si je préfèrerais qu'on offre les Pensées de Marc-Aurèle plutôt que les Accords Toltèques. Je ne suis pas non plus un donneur de leçon, de toute façon on me retournera sans arrêt la relativité du goût et j'aurais du mal à expliquer alors que la littérarité (comme on dit à la fac) n'est pas une question de goût (ça me fait toujours penser à ces gens qui voient un outrenoir de Soulages ou un bleu de Klein et s'exclament "bah je peux faire aussi bien en allant chez Leroy-Merlin", personnellement j'ai autre chose à faire que de leur expliquer que ce qui fait oeuvre ici ce n'est pas la reproductibilité technique, bien que cette question soit au contraire au coeur de l'oeuvre de Warhol ou Lichtenstein). L'argument "des goûts et des couleurs" je peux vraiment pas le digérer, c'est vraiment l'excuse de toutes les indigences intellectuelles au nom de la bien pensance, et comme disait Heidegger dans Être et Temps : "Es ist die Tür öffnet zu allen Fenstern" (repris par Gad Elmaleh paraît-il :honte: )

Par contre, je te rejoins évidemment sur la nécessité d'apporter une critique constructive (et si possible bienveillante, même si le jeu de massacre c'est bien des fois :devilish: ), ce que j'essaye de faire quand je le peux ;) Et partant j'encourage vivement ta participation ! :coucou:
Pour finir, évidemment je ne revendique nullement l'universalité de mes affinités (et ceux qui connaissent mes goûts musicaux placés à l'extrême extrémité de l'extrême, comprendront que je m'entoure de telles précautions :rock: )
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Re: Lecture-Torture

Message par sandrinef »

Je dois dire que ce message m’a aussi faite réagir. Je crois qu’il y a une différence entre la littérature, les écrivain(e)s, la productions de l’objet livre, et l’auteur(e).
Et aussi, ce qui est donné, c’est un avis subjectif, un ressenti, sur une production, il ne s’agit pas d’une critique concernant la personne qui a produit l’écrit.
De plus, si des personnes parviennent à faire ce qu’elles aiment, à vivre de leurs romans et bien c’est formidable.
Une fois cela posé, il n’empêche que, plus profondément, quelque chose m’a démangée. C’est cette idée selon laquelle seuls les surdoués ont envie d’autre chose que de cette merde uniforme qu’on nous propose. Parce que la diversité, pardon mais j’ai du mal à la trouver. J’ai le sentiment inverse, à savoir qu’on tire les gens vers le bas en répondant à leurs plus vils désirs, un peu comme ce qui est présent dans la téléréalité : « nan mais je le regarde juste pour voir combien c’est nul ! » Mouais…
Or, si justement les bouquins présentés en tête de gondole étaient un peu plus riches, si on mettait à la mode la qualité littéraire, et bien je suis persuadée que les consommateurs suivraient. C’est justement parce que cette diversité n’existe plus que tout le monde s’habitue à la superficialité, au vide intersidéral, à la médiocrité, et qu’on en vient à trouver ça normal quand ça ne l’est pas.
Qu’est-ce qui est mis en avant ? Toujours les mêmes : Weber, Gounelle, et j’en passe. Ils écrivent, ils bossent dur, ils ont du mérite. Mais ils savent ce qu’ils font : vendre des livres, produire pour gagner leur vie, faire du bien aux lecteurs qui ont plaisir à retrouver leurs histoires. Et c’est bien. C’est pas grave… Mais pourquoi n’y a-t-il quasiment que cela ? Et que dire de ces écrivains qui me semblent avoir la flemme de faire un petit effort, ces gens qui ont du talent mais qui n’ont plus l’air de vouloir s’en servir ? Je pense par exemple à Amélie Nothomb qui nous a lâchés depuis longtemps…
Qu’on ne me dise pas que la littérature est réservée aux personnes surdouées. Déjà parce que je revendique le droit de me délecter parfois de trucs pourris, ouais je les ai lus les accords toltèques et j’ai lu Virginie Grimaldi, j’assume.
Enfin, je reste convaincue que cette idée que « faut être surdoué pour ceci ou pour cela », bah c’est quand même totalement faux, injustifié, et c’est se faire une piètre opinion de tout le monde…
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Re: Lecture-Torture

Message par Belgha »

enufsed a écrit : lun. 26 nov. 2018 23:35 Et partant j'encourage vivement ta participation ! :coucou:
  
Mais juste avant, Belgha a écrit : lun. 26 nov. 2018 22:03 Maintenant, promis, je n'interviendrai plus !
   :huhu:

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Re: Lecture-Torture

Message par nemo »

enufsed a écrit : lun. 26 nov. 2018 23:35 Je ne suis pas non plus un donneur de leçon, de toute façon on me retournera sans arrêt la relativité du goût et j'aurais du mal à expliquer alors que la littérarité (comme on dit à la fac) n'est pas une question de goût
Ca m'a interpellé. J'ai une sorte d'intuition qu'au delà de la question du goût il y a toujours une forme de qualité pas vraiment objectivable mais présente ou non. Est-ce que la littérarité est une vraie notion? Tu pourrais nous en dire plus?

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Re: Lecture-Torture

Message par Zourite »

sandrinef a écrit : mar. 27 nov. 2018 10:12 Or, si justement les bouquins présentés en tête de gondole étaient un peu plus riches, si on mettait à la mode la qualité littéraire, et bien je suis persuadée que les consommateurs suivraient.
Je partage ton avis concernant l'absence de diversité (qui s'applique d'ailleurs à plein d'autres domaines). Mais une chose me gêne dans l'idée ci-dessus et je peine à la formuler comme je la ressens : ton idée me semble sous-entendre que tout ce qui est présenté au public sera adopté. Pour certaines choses, je veux bien (hélas) l'admettre. Pour la littérature, je pense qu'il y a une part d'éducation à prendre en compte (et pas forcément familiale, bien entendu). Je pense que les seuls consommateurs qui suivraient, éventuellement, seraient ceux qui ont reçu une éducation au goût (littéraire ici).
Loupiotte a écrit : lun. 26 nov. 2018 17:23Sinon, dans les livres "récents" qui m'ont laissée... pantoise... Il y a la trilogie 1Q84 de Murakami que je n'ai pas réussi à finir... Le style est sans doute grandiose puisqu'il a été pressenti plusieurs fois pour le Nobel de littérature (mais difficile de juger avec une traduction, même excellente). Quant à l'histoire... J'avais beau creuser, je ne voyais pas où l'auteur voulait en venir. J'avais l'impression d'un grand vide derrière les mots.
Je comprends ta sensation de grand vide derrière les mots, puisqu'il me semble en effet, que les mots de Murakami dans 1Q84 (et dans Chroniques de l'oiseau à ressort, en tout cas) n'ont pas pour vocation à créer du sens. Nul enseignement, seulement un voyage dans un monde onirique, assez déroutant. C'est très particulier, je le concède, mais j'ai adoré les longues descriptions de choses ou de physiques insensés, tout comme les digressions qui m'ont beaucoup fait sourire.

"L'apparence d'Ushikawa attirait constamment le regard. Ce n'était pas l'idéal pour se poster en sentinelle ou entreprendre une filature. Même s'il essayait de se fondre dans la foule, il se voyait comme un mille-pattes géant dans un pot de yaourt."

"Dans presque tous les domaines, en particulier pour ce qui était de l'apparence extérieure, Ushikawa était une exception dans sa famille. Il était de petite taille, il avait une grosse tête informe et des cheveux frisottés et hirsutes, et ses courtes jambes torses faisaient penser à des concombres. Il avait des globes oculaires proéminents qui lui donnaient l'air d'être perpétuellement stupéfait. Un cou bizarrement boursouflé. Des sourcils tellement longs et épais qu'ils semblaient sur le point de se rejoindre. On imaginait deux grosses chenilles qui s'attiraient mutuellement."

"Avec le temps, le garçon laid grandit, devint un jeune homme laid qui finit par devenir un homme d'âge mûr laid. A tous les stades de sa vie, quand les gens le croisaient dans la rue, ils se retournaient pour le regarder. Les enfants ne se gênaient pas pour le dévisager en face. Ushikawa se demandait de temps en temps s'il attirerait autant les regards une fois qu'il serait devenu un vieil homme laid. La plupart du temps, les vieillards sont laids. Est-ce que sa laideur individuelle et originelle serait moins éclatante que quand il était jeune ? Mais il ne le saurait pas avant d'être réellement vieux. Il n'était pas non plus exclu qu'il devienne un vieillard d'une laideur exceptionnelle."

(1Q84, Tome 3, Murakami)

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Re: Lecture-Torture

Message par Pataboul »

Zourite a écrit : mer. 28 nov. 2018 15:46
sandrinef a écrit : mar. 27 nov. 2018 10:12 Or, si justement les bouquins présentés en tête de gondole étaient un peu plus riches, si on mettait à la mode la qualité littéraire, et bien je suis persuadée que les consommateurs suivraient.
Je partage ton avis concernant l'absence de diversité (qui s'applique d'ailleurs à plein d'autres domaines). Mais une chose me gêne dans l'idée ci-dessus et je peine à la formuler comme je la ressens : ton idée me semble sous-entendre que tout ce qui est présenté au public sera adopté. Pour certaines choses, je veux bien (hélas) l'admettre. Pour la littérature, je pense qu'il y a une part d'éducation à prendre en compte (et pas forcément familiale, bien entendu). Je pense que les seuls consommateurs qui suivraient, éventuellement, seraient ceux qui ont reçu une éducation au goût (littéraire ici).
Certes c'est une minorité qui lit et achète des bouquins et ça tient en grande partie de l'éducation, mais cette minorité est ciblée comme dans tout marché par le marketing. Et ce marketing, c'est au moins aussi puissant que les conquistadors face aux indiens d'Amérique, totalement disproportionné... Les livres les plus vendus sont du coup ceux qui bénéficient de la meilleure publicité, en totale déconnexion de leurs éventuelles qualités, comme pour tout le reste. Ca n'empêche pas une minorité dans la minorité d'avoir plus de discernement, et ceux-là ne jetteront pas un coup d'oeil aux gondoles de supermarché, mais ce n'est pas le cas général.

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Re: Lecture-Torture

Message par PointBlanc »

Je ne sais vraiment pas. La littérarité qu'évoque Enufsed (et qui implique de tout autres attentes de lecture) n'a jamais été l'affaire de grand monde. Ce n'est pas sur ces critères que la plupart des lecteurs jugent les livres, et il me semble que depuis longtemps déjà la littérature se fait plus ou moins à part de ce qui se lit.
Alors quand on souffre de ne la trouver nulle part dans un livre, ça veut peut-être simplement dire qu'on s'est planté d'endroit. Il n'est sans doute pas utile de s'entêter : la littérature ne nous le demande pas. Je ne pense pas qu'elle soit en si mauvaise santé : je crois surtout que nous manquons salement de recul mais que nous ne pouvons pas nous empêcher de chercher dans ce qui s'écrit aujourd'hui un état de la littérature contemporaine qui ne deviendra évident que dans vingt ou trente ans. Peut-être parce que nous voudrions avoir deviné juste.
L’Élégance du hérisson est probablement (pas lu plus de quelques pages) comme une foule d'autres bouquins qui s'occupent d'autre chose que de littérature, dont beaucoup tombent dans l'oubli le plus complet et dont seuls quelques-uns surnagent, comme la cristallisation d'une atmosphère ou d'une époque (Françoise Sagan ? Alexandre Jardin ?). Il suffit de lire les listes de lauréats des prix littéraires depuis cinquante ans : combien sont passés à la postérité ? Pourtant tout ça s'est lu, tout ça a fait parler, en son temps, quoique de façon sans doute assez peu littéraire, là encore. Parce que le public ne réclame pas qu'on lui serve de la littérature, en tout cas pas celle du siècle dernier ni celle d'aujourd'hui pour ce qu'on en devine : c'est plutôt une cause de malaise qu'une source de réconfort ; ça se penche sur des questions compliquées, pénibles, le langage en prend un coup au passage et par le haut ou par le bas on court le risque de la perte. De sorte que la SF, en tout cas pour une part, est peut-être davantage de la littérature aujourd'hui que ce qui sort des grandes maisons d'édition. Mais je m'égare.
Je me suis beaucoup fait chier en lisant des bouquins dont la valeur, en tant qu'objets littéraires, n'est pas douteuse. J'en ai abandonné un paquet en cours de route. J'en ai retenu, bien souvent, de tout petits morceaux qui justifiaient l'effort, comme on peut retenir un film pour les cinq minutes qui suffisent à le sauver de l'oubli. Les autres livres, dont on vante à chaque rentrée l'"intensité poétique" ou le "regard sans concession", j'attends de voir si je les recroiserai dans trente ans : pour le moment, ils s'adressent à d'autres lecteurs, qui veulent autre chose que de la littérature.

On voit se dessiner ça au collège, en fait : il y a des gosses qui lisent compulsivement mais qui n'éprouvent aucun début d'attirance pour les classiques, des gosses qui veulent écrire mais qui se soucient très peu de style, qui sont indifférents à la représentation, parce que tout ce qu'il leur faut c'est une histoire dans un décor avec des personnages et l'occasion de prendre leur place à intervalles réguliers. Et quand bien même on essaie de leur ouvrir les yeux sur autre chose (et on n'échoue pas systématiquement) c'est au fond assez normal. L'art, pour une écrasante majorité de gens, ça sert à faire passer la pilule, pas à savoir de quoi elle est farcie.
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Vous qui vivez qu'avez-vous fait de ces fortunes ?

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Re: Lecture-Torture

Message par Invité »

Un seul livre, celui-ci.

Les Racines du mal. de Maurice Dantec.

Un polar noir teinté de science fiction. Il m'avait été conseillé par deux collègues d'un ancien boulot. Je ne suis naturellement pas fan des polars mais j'espérais quelque chose d'approchant de James Ellroy. Mais non.

Pour une lecture, quelle torture !

Par amitié pour l'un de mes collègues, comme dans Orange Mécanique, je me sentais obligé de regarder et de terminer ce pavé sanguin.
Curieusement, je suis amateur de films d'épouvante voir d'horreur, comme La chose ou Seven.
Et là ça ne passe pas. On franchit à Mach 2 toutes les strates de l'horreur en s'immergeant dans la pensée dérangée d'un psychopathe. Ce roman a reçu un accueil favorable du public et a gagné plusieurs prix. En ce qui me concerne j'ai mis plusieurs semaines à m'en remettre, à évacuer de ma mémoire tous ces corps mutilés. Je regrette profondément de l'avoir lu et je déconseille absolument aux personnes (hyper)-sensibles la lecture de ce livre. Si d'autres personnes ont déjà lu ce livre, quelle a été votre réaction, comment avez-vous gardé la distance ?

Invité

Re: Lecture-Torture

Message par Invité »

Pastel a écrit : sam. 1 mai 2021 21:06 Si d'autres personnes ont déjà lu ce livre, quelle a été votre réaction, comment avez-vous gardé la distance ?
J'en ai lu le début il y a longtemps, comme toi sur la suggestion d'un collègue. Je me souviens d'avoir abandonné surtout par ennui, et d'avoir trouvé le bouquin plus ridicule qu’écœurant. Le caractère abscons et vaguement mystique de l'univers imaginé par Dantec m'avait découragée à l'époque : la prise de distance avec le contenu du roman s'était faite par là dans mon cas.

Invité

Re: Lecture-Torture

Message par Invité »

Le style nerveux de Dantec, le rythme qu'il imprime et l'idée originale d'une IA traqueuse de psychopathes qui se sont constitués en réseau, expliquent sans doute le succès du livre. Si on enlève le sordide (c'est à dire une bonne partie du livre...), c'aurait pu être un honnête polar.

Comment l'auteur a-t-il pu sortir indemne de cette écriture ?? Les acteurs pourtant moins investis que l'auteur, ont parfois beaucoup de difficulté à sortir de leurs rôles après le tournage d'un film à charge émotionnelle forte (37,2 °C !).

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Re: Lecture-Torture

Message par Kliban »

Hors-sujet
Pour ma part, je distingue deux types principaux de critiques (ou de fonctions critiques) :
  • La critique de type "chronique" : elle se définit par le récit d'une lecture - les effets de l’œuvre sur le lecteur, ce qui lui est arrivé et ce qu'il en retire. Ce peut être du désagrément ou de l'agrément, et cela se traduit dans un système de valeurs, tentant de déplier certaines des raisons des émotions éprouvées.
  • La critique de type "culturel" : elle se définit par une réinscription de l’œuvre d'emblée dans une esthétique, et la juge au regard de ses filiations, de ses innovations, et d'un ensemble de valeurs que l'auteur de la critique souhaite promouvoir. Elle se veut intervenir dans la culture pour en infléchir le cours, sélectionner les auteurs à conserver et ceux à oublier.
Entre les deux, il y a un continuum : je pratique par exemple essentiellement la première forme, en ayant bien trop souvent adopté le style de la seconde - une chose que j'essaie d'amender, mais qui exige pas mal de d'attention et de savoir-faire.
Je partage l'opinion exprimé quant à la diversité de l'offre et de la demande, et il ne me viendrait pas à l'esprit de demander qu'un auteur soit retiré des bacs parce que je ne l'ai pas aimé : si je ne l'ai pas aimé, c'est que je ne suis pas son public, ce qui dit quelque chose de moi, de certains de mes habitus de lecture peut-être. Cela n'empêche que je peux avoir éprouvé un très fort désagréent, une colère ou un dégoût à lire le livre, et que cela peut être dit. Il peut aussi, mais c'est autre chose, me venir de déplorer la promotion de trop d'auteurs que je juge médiocres au détriments d'autres que je trouve plus relevés mais moins connus : critiques sociales, économiques, ... d'une certaine pratique de la lecture, de sa diffusion, et d'un état du champ culturel en général, qui ne portent pas sur l’œuvre en tant que telle mais le contexte de son édition, de sa diffusion et de sa réception.

La question rémanente est celle du "fiel" dont on peut accompagner le texte critique. C'est une question éthique qui est loin d'être simple. Pourquoi peut nous venir une colère à la lecture de certaines œuvres ? Pourquoi l'ennui qu'on y trouve, nous sentons-nous de le transmuer en sarcasme ? Peut-on procéder différemment ? Le faut-il et pour quelles raisons ? Quels effets ces débats critiques ont-ils sur la production des œuvres ? Sur leur visibilité ou leur retrait ? C'est un tout un pan du champ de la réception qui est en jeu, et pour lequel je n'ai pas de lumière à ce stade.
De main gauche à main droite, le flux des savoirs - en mes nuits, le règne du sans-sommeil - en mon coeur, ah, if only!, le sans-pourquoi des roses.

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Re: Lecture-Torture

Message par Tortue »

Dans les contemporains, il y en a un certain nombre.
Parmi les auteurs passés à la postérité, j'ai proprement détesté les deux textes que j'ai lus de Miguel de Unamuno (les nombreux scrupules de l'auteur s'expriment par une succession de nuances qui se corrigent les unes les autres et s'annulent dans le même mouvement ; la dimension ludique du roman n'est que fausse originalité ou piètre fantaisie ; on y trouve une suite de paradoxes faussement ingénieux, des personnages qui ne sont que des concepts mal déguisés, une soupe métafictionnielle qui pour être vaguement pionnière n'en est pas plus nourrissante, et pour finir, en bon misanthrope, la misanthropie affichée par l'auteur m'a continûment agacée).
Lisez donc Le Roman de Don Sandalio, joueur d'échecs et surtout l'opaque Brouillard !

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