Culture du travail au XXIème siècle

l'Humanité, L'Existence, la Métaphysique, la Guerre, la Religion, le Bien, le Mal, la Morale, le Monde, l'Etre, le Non-Etre... Pourquoi, Comment, Qui, Que, Quoi, Dont, Où...?
Avatar de l’utilisateur
blue hedgehog
Messages : 1834
Inscription : jeu. 5 juil. 2018 13:53
Présentation : viewtopic.php?f=9&t=9456
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Localisation : B-Lux
Âge : 42

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par blue hedgehog »

Je rejoins l'avis de Shingouz et celui de Fu, il n'est pas toujours judicieux de se taire. Ça peut être intéressant lorsqu'on est confronté à un sujet qu'on ne maîtrise pas ou pas encore. C'est la phase d'apprentissage. Mais je me vois mal me taire dans un meeting où se discute la stratégie à adopter par rapport à tel ou tel projet. Si je ne dis rien, mes moyens et mes impératifs ne seront pas pris en compte et je passerai pour un beni oui-oui à qui ont peut faire faire tout et à n'importe quel prix (je ne parle pas que d'argent).

Mais là où je rejoins un peu l'article c'est que laisser les gens s'exprimer et réussir à prendre de "la hauteur", du recul, pour observer la dynamique du groupe et les attitudes, permet parfois d'avoir un coup d'avance. Et quand tu t'es tu et que t'a compris la dynamique et qui veut quoi, alors tu peux parler, donner ton point de vue et idéalement conclure la réunion. Car si tu es le dernier à parler et que tu prends en considération le point de vue de chaque parti, les autres ne te contrediront pas et tu aura souvent obtenu un bon compromis pour toi. Enfin c'est juste mon avis.
Une bougie offre sa lumière aux alentours, pendant qu'elle se consume. (Proverbe chinois)

Avatar de l’utilisateur
Brunehilde
Messages : 1988
Inscription : mer. 15 juil. 2020 15:29
Présentation : viewtopic.php?f=9&t=10783
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Âge : 42

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par Brunehilde »

C'est intéressant d'avoir vos interprétations, en fait personnellement j'ai plutôt pris l'article dans le sens "il vaut mieux ne pas parler pour ne rien dire" ou "le mieux c'est de parler uniquement aux moments où c'est nécessaire, et pas plus".
Une optimisation de sa parole en somme (ça dépend aussi de comment on interprète "quiet" je pense).

Du coup en y réfléchissant un peu plus :
- j'ai peu d'expérience professionnelle des réunions, ayant d'abord bossé dans une toute petite boîte ou aller d'une pièce à l'autre suffisait, puis dans une boîte où on faisait trop peu de réunion, la chef d'équipe et/ou le boss n'étant jamais dispos.
- j'ai bossé dans un milieu où il y avait pas mal d'ego chez les personnes haut placées, donc en réunion j'ai toujours eu l'impression qu'on parlait de trucs que je savais depuis mille ans, en le ressassant indéfiniment (mon souvenir le plus épique c'est une réunion avec une entreprise partenaire qui avait insisté pour que je sois là alors que ce n'était pas prévu à l'origine, et où ce qui s'est dit a convaincu mon collègue et ma chef d'équipe qu'en fait je leur disait la stricte vérité depuis deux ans (aka que la solution choisie ne pouvait pas donner les résultats attendus)

Tout ça illustre parfaitement bien ce que je constate de plus en plus depuis un ou deux ans : mon expérience du monde du travail est.. disons bas de gamme :roll:
Pourquoi se préoccuper des chevaux à rayures quand on peut chevaucher des loups !
:guitare

Avatar de l’utilisateur
prince2phore
Messages : 115
Inscription : lun. 16 févr. 2015 12:35
Présentation : [url=http://adulte-surdoue.fr/presentations/topic-t5919.html]Qui suis-je ?[/url]
Profil : Intéressé pour une personne de mon entourage
Test : NON
Localisation : Shanghai
Âge : 47
Contact :

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par prince2phore »

Bonjour/bonsoir à tous, vaste et intéressant sujet même si je ne sais trop par quel bout le prendre après la lecture des premières pages du fils.

Personnellement j'ai beaucoup évolué sur mon appréciation du "monde du travail" au fil des années. Mon parcours m'ayant fait passer par toutes les strates de la hiérarchie mais aussi voyager et travailler au sein de différentes structures (par la taille, le pays et la culture, etc) j'ai souvent été contraint de faire évoluer assez radicalement mon jugement sur toutes les pratiques managériales des grands groupes.

Pour aller un peu plus dans le concret, j'ai connu en vrac: le petit labo du CNRS, la grande entreprise Française hyper rigide (où, petit jeune, on demande au chef pour quitter son poste et aller faire pipi :D), la moyenne entreprise française (précurseur des start-up, foisonnant de talents avec une organisation très horizontale sous la coupe d'une chef génial et un peu foufou...), la moyenne entreprise française racheté par la moyenne entreprise américaine, la moyenne entreprise américaine rachetée par l'énorme entreprise américaine (qui coupe les coûts donc), finalement scindée en deux, finalement fusionnée avec la grande mais peut connu du public entreprise anglaise...
Ouf, merci à ceux qui ont suivi. Bref tout ça à différents postes et dans différents pays pour finir aujourd'hui assez haut placé, en Chine, avec des équipes un peu partout dans le monde.

Ce qui est marrant c'est que le jeune anarchiste rebelle que j'étais n'a pas trop changé en fait. J'ai longtemps hésité à prendre l'échelle et monter dans la hiérarchie mais une fois que je me suis lancé j'ai eu le plaisir de voir que je pouvais en fait avoir une assez grande marge de manœuvre sur ma façon de faire avec mes équipes et mes clients. Certes il faut accepter le jeu du capitalisme a minima pour travailler dans ce genre de structures, mais l'unique véritable but de tout entreprise étant simplement de faire de l'argent, cela laisse au final pas mal de liberté sur le comment, du moment qu'on peut démontrer son efficacité.

Pour ce qui est des réunions, j'ai réussi à opérer un véritable 180 degré par rapport à ce que j'avais vécu en bas de l’échelle. je n’embête (ni les managers sous moi) plus les équipes avec de grandes réunion top/down ni des réunions récurrentes inutiles et nous privilégions les discussion courtes, en petit groupe et bien cadrées. Tout se fait aussi dans une ambiance de transparence et de bon esprit. Pour les réunions dont je ne suis pas l'instigateur, il en fait assez facile de demander un minimum de préparation (agenda, attendus, audience restreinte) avant de s'engager à potentiellement perdre son temps.

Pour ce qui est des formations (externes en général) et autres "workshop", je les limites au maximum, les remets dans leur contexte et minimise leur impact sur mes équipes. Nous privilégions les échanges et retours d'expérience internes ou les formations plus techniques et objectives. pour les "soft skills", plutôt que de payer McKinsey nous mettons en place du mentoring etc

Pour ce qui est des méthodes Agile enfin, je pratiquait déjà avant leur formalisation et en effet ça peu très bien marcher. Mais un peu comme l'anarchisme marche avec des anarchistes, l'autonomie demandée aux équipes pour faire de l'agile ne convient pas à tout le monde, loin de là. ceci dit le premier problème à sa mise en place réelle (définissons la rapidement au passage : c'est simplement le découpage de l'activité en boucles les plus petites possibles pour privilégier des itérations qui produisent un produit utilisable et de plus nombreux retours des usagers/clients afin d'adapter le développement et d'éviter des effets tunnels) est l'erreur de limiter l'organisation agile des équipes aux équipes productives seulement. depuis plusieurs années nous somme passés à notre version de SAFE (Scaled Agile Framework) qui consiste à changer toute l'organisation et les rôles pour coller à un modèle agile et remettre véritablement à plat la hiérarchie (rôle et salaire et décisions donc) et ça va beaucoup mieux (même si ce n'est toujours pas parfait !). Ceci dit, je voyais étant jeune les méthodes agiles comme l'irruption de l'anarchisme dans l'entreprise et j'en suis vite revenu; oui c'est mieux pour beaucoup mais in fine on ne retiens vraiment, sans surprise, que ce qui augmente la productivité (ce qui n'est pas un mal en soit quand ça ne se fait pas au détriment de la qualité de vie et de travail des employés).

Tout n'est pas rose pour autant, difficile de lutter contre la nouvelle mode qui tombe de tout en haut et nous fait participer au niveau du groupe à un storytelling (qui au moins est aujourd'hui totalement assumée en ce sens où on nous dit clairement qu'on est en train de se raconter une histoire et dans quel but...), ou encore de nous imposer des formations sur les biais inconscients se basant sur des fondements scientifiques plus que discutables (pas nouveau, il y a 10 ans c'était les formations psychologiques aussi basées sur des compréhensions et usages erronés de travaux universitaires et tests en psychologie - MBTI...).

Mais bon, il me semble que pour les ###Dragons de Komodo sociopathes oui mais des Panzani### il doit être plus facile d'analyser la situation qui est la leur, de comprendre les marges de manœuvres et de décider de quelle attitude prendre selon leurs valeurs et talents. Fuir, jouer le jeu en cynique, sabotage, participation limitée ou tenter le changement par la prise de pouvoir progressive au risque de se faire retourner (tiens on retrouve des choix assez politiques :) ).

je m'arrête là, merci pour le fil qui permet de partager un peu sur un sujet toujours et à jamais d'actualité et qui me tient à cœur.
Appuyez-vous sur les principes, ils finiront bien par céder.

Avatar de l’utilisateur
Shingouz
Messages : 324
Inscription : dim. 24 avr. 2022 16:22
Présentation : viewtopic.php?f=9&t=11447]MéKicéShingouz ?
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Âge : 56

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par Shingouz »

@prince2phore Merci de ta participation et de ton intéressant point de vue. D'autant plus intéressant pour moi que j'ai fait le choix inverse du tien il y a plusieurs années. ;) Et il me semble que nous partageons la même analyse tout en ayant fait des choix différents. Bien sur, c'est toi qui a basculé du côté obscur. :grin:

Je ne partage pas du tout le point de vue que l'unique but d'une entreprise est de faire du profit. Je le réfute profondément et viscéralement, sans pour autant avoir jamais été ni anarchiste, ni communiste, ni tout autre mot en -iste (sauf peut-être fumiste). C'est ce qui m'a fait refuser un parcours ressemblant au tien, je pense, au tournant des 35 ans : passer de la R&D au labo usine (refusé 3 fois), puis devenir directeur d'usine ou directeur R&D (refusé 1 fois). Je suis dans l'incapacité de composer/faire avec la vision et les directions qu'ont prises les directions générales et les mots-clefs qui les promeuvent : "rentabilité", "efficacité", "implication", "leveraging", "onboarding", "engagement" et consorts. Tout simplement car je ne partage pas ce postulat de départ que l'entreprise ne doit et ne peut que faire toujours plus de fric. Ceci probablement car les valeurs cardinales pour moi sont la Connaissance et le Savoir, pas le Succès ou Sainte EBITDA. Ceci me conduit aujourd'hui à un décalage de valeurs avec mon entreprise car je refuse le raccourci "vite = bien" qui conduit inévitablement au "quick and dirty" (et au scandale des émissions de moteurs diesels il y a peu). Vite est parfois nécessaire et il faut savoir le faire, mais c'est une conséquence d'un contexte, pas une obligation.

Il m'a donc fallu faire un choix en conscience assez tôt et de tous ceux que tu décris et que je partage dans les possibilités offertes à la survie du/de la ***bestiole à texture noire et blanche qui fait tâche*** en (grande) entreprise, j'ai choisi de partager mon temps entre le retrait, le cynisme ou le sabotage. Pas assez de patience et d'espoir pour tenter l'entrisme et le noyautage et suffisamment de hargne pour ne pas choisir la fuite (mais ça, ça peut changer vu mon âge...).
Malheureusement pour moi, je suis également passé par les scissions, rachats et autres affres du grand Monopoly industriel mondial, pour arriver aujourd'hui dans une World Company en devenir mais dont la pensée est restée bloquée dans les années 90 ou 2000. Ceci n'a fait que me conforter dans mon choix mais ne va pas aider pour débattre. :D
"I'd rather have questions that can't be answered than answers than can't be questioned."
R. Feynman

Avatar de l’utilisateur
prince2phore
Messages : 115
Inscription : lun. 16 févr. 2015 12:35
Présentation : [url=http://adulte-surdoue.fr/presentations/topic-t5919.html]Qui suis-je ?[/url]
Profil : Intéressé pour une personne de mon entourage
Test : NON
Localisation : Shanghai
Âge : 47
Contact :

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par prince2phore »

Je comprends tout à fait ton point de vue.
Pas le temps de développer de suite mais je pense que ce que tu décris dépends aussi beaucoup de la "culture d'entreprise". Je pense aussi que considérer qu'une entreprise a pour but principal de faire de l'argent n'est pas vraiment une opinion, c'est sa définition pratiquement légale il me semble. Après je dois avouer que si j'ai fait ces choix c'est beaucoup pour des raisons spéciales. la possibilité de venir en Chine, un fonctionnement plus en mode startup malgré l'appartenance à une groupe mondial, un chef extraordinaire et des défis techniques et humains toujours renouvelés mais, surtout en Chine, dans une bonne ambiance. Juste pour finir sur ce point, ici les managers n'ont rien à voir avec ce que j'ai connu en France. En gros en France il y avait un gros écart salarial entre managers et le reste, la direction faisait constamment des mauvais coups aux représentants du personnel et aux syndicats, bref mauvaise ambiance...
Ici les gars peuvent se barrer facilement du coup le rapport de force est inversé, mais aussi le syndicat et le management c'est la même chose ou presque, les managers rognent sur leur propre budget d'augmentation pour augmenter leurs équipes etc.

Bref, plein de variables mais sur le fond je reste assez légaliste. Dans le sens ou même si j'ai appris et progressé, je connaissais les règles avant de me faire embaucher et je n'avais pas d'illusions. Du coup si je reste et prends le salaire, je ne râle pas trop. J'ai aussi tenté l'aventure création d'entreprise à un moment et c'est pas facile :)

Mais bon, il y a encore du temps avant la retraite et de quoi faire d'autres choix à l'avenir. J'espère que de ton coté aussi ça s'améliorera, quelque soit la stratégie adoptée ;)
Appuyez-vous sur les principes, ils finiront bien par céder.

Avatar de l’utilisateur
Shingouz
Messages : 324
Inscription : dim. 24 avr. 2022 16:22
Présentation : viewtopic.php?f=9&t=11447]MéKicéShingouz ?
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Âge : 56

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par Shingouz »

prince2phore a écrit : mar. 9 août 2022 10:57 Pas le temps de développer de suite mais je pense que ce que tu décris dépends aussi beaucoup de la "culture d'entreprise". Je pense aussi que considérer qu'une entreprise a pour but principal de faire de l'argent n'est pas vraiment une opinion, c'est sa définition pratiquement légale il me semble.
Tout à fait d'accord en ce qui concerne la "culture d'entreprise", beaucoup de choses en dépendent et ce d'autant plus que les multinationales en font aujourd'hui un axe de travail interne : mise en avant des "valeurs" de l'entreprise, du slogan de cette dernière, gestion publicitaire de l'image de l'entreprise, etc ,etc. J'ajouterai d'ailleurs pour paraphraser Coluche, que la "culture" en entreprise, c'est comme la confiture. Moins on en a, plus on l'étale. Et d'ailleurs, mais c'est un autre débat, je trouve que la culture au sens général est de plus en difficile à trouver en entreprise.

Je suis également de "l'opinion" que le but principal d'une entreprise est de faire de l'argent, bien que je ne sois pas du tout certain que cela soit "légal" au sens législatif du terme. Statutaire probablement, mais pas plus. Ce que je remets en cause et qui me pèse, c'est le fait que ce but principal devienne de fait ... unique. Il me suffit de comparer le discours auquel j'étais confronté jeune ingénieur dans cet environnement et celui que l'on m'assène aujourd'hui (que ce soit en Français, en Anglais ou en Corporate Globish). Depuis quelques années et de plus en plus, on n'entend plus en interne que ce seul message : "nous n'existons que pour faire du profit et atteindre les objectifs fixés par nos actionnaires/propriétaires". Lesquels objectifs ne sont plus que purement financiers ou liés à des KPI fumeux ou pire, autosuffisants. On entend toujours aussi qu'il faut satisfaire nos clients (bien obligés) mais on y oppose maintenant la notion de "surqualité" : en d'autres termes, le mieux est l'ennemi du bien pour l'EBITDA. On entend bien entendu que "la sécurité des personnes et de nos produits est notre principal objectif" : je croyais que c'était le bilan trimestriel et tout le monde a bien compris que la sécurité est un cout acceptable vs. celui des accidents du travail... Je pourrais citer un grand nombre d'autres slogans ou maximes internes aux grandes entreprises (et en plusieurs langues) mais elles sont toutes de fait aujourd'hui subordonnées au profit, à la rentabilité ou au plan annuel (les plans à 5 ans sont devenus une vaste blague, que l'on revoit ... tous les 6 mois).

Les grandes entreprises actuelles ont de ce fait un espace temps limité à un an et ne sont plus intéressées que par le "combien" et le "quand". Alors que mon métier de chercheur industriel reste malgré tout tributaire de "pourquoi" et de "comment", et ce sur des durées plus longues qu'un exercice financier. D'où mon sentiment de décalage, de mise en porte-à-faux et de retrait.
On pourrait également discuter plus avant de la disparition de la complexité dans la manière dont les entreprises envisagent leurs futurs produits : ceci car la R&D est exclusivement devenue un outil au service de business/divisions dont les directions sont essentiellement constituées de financiers, de marketeurs ou de commerciaux. La culture du "Make It Happen" a pris le pas sur la compréhension des processus, et elle refuse souvent la réalité du terrain et ne s'embarrasse pas avec les questions vu qu'elle ne veut que des réponses simples et positives. Ceci a généré, comme je l'ai déjà mentionné, une habitude du "quick and dirty" dont les conséquences ont déjà commencé à se voir : durée de vie moindre de nombre d'équipements, réparabilité en berne, mensonges sur les performances (demandez aux constructeurs de véhicules diesel), renvoi des responsabilités entre tous les acteurs, dévalorisation du savoir technique et scientifique...

Alors bien sur, cela dépend de la "culture" d'entreprise et de son secteur, mais je pense que c'est une tendance lourde (et néfaste) depuis plusieurs années.
"I'd rather have questions that can't be answered than answers than can't be questioned."
R. Feynman

Avatar de l’utilisateur
prince2phore
Messages : 115
Inscription : lun. 16 févr. 2015 12:35
Présentation : [url=http://adulte-surdoue.fr/presentations/topic-t5919.html]Qui suis-je ?[/url]
Profil : Intéressé pour une personne de mon entourage
Test : NON
Localisation : Shanghai
Âge : 47
Contact :

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par prince2phore »

Tout à fait d'accord avec tous les travers que tu décris, je pense que beaucoup sont dus à la présence ou non de l'entreprise sur le marché financier. Dans mon expérience passer en public (ouvrir à l’actionnariat) veut dire passer à la vue trimestrielle et financière et tous les excès que tu décris. Ça peut se minimiser par une certaine culture d'entreprise mais sur le long terme c'est trop puissant. Par contre pour les boîte qui gardent le contrôle financier la culture d'entreprise a beaucoup plus d'influence je pense.
Enfin bon moi comme toi je subis le dictât du board et des actionnaires. Mais malgré tout et si chaque entreprise doit faire du fric, on est tous conscient qu'on le fait d'une certaine manière et qu'il y a une compétition. Ce sont je trouve de bons garde-fous in fine. Car toute boîte à courte vue et succombant à tous les excès que tu décris finis inexorablement par se faire bouffer par la concurrence.
Bref, c'est tout sauf parfait mais il n'y pas que du négatif et avec des gars qui comprennent les contraintes et acceptent le jeu tout en étant assez intelligent pour jouer des degrés de libertés restant, on peut faire des choses pas mal. En tout cas je n'ai jamais vu d'alternative convaincante dans le public qui a bien d'autres travers.
Pour moi la meilleure réponse est donc de fortement encadrer et limiter l'influence des marchés sur la structure des entreprises, ce serait déjà une bonne piste.
Et puis surtout, faire en sortes de toujours pouvoir garder un environnement au travail où l'humour et la déconne sont permis, perso je tiendrai pas sinon.
Appuyez-vous sur les principes, ils finiront bien par céder.

Avatar de l’utilisateur
Shingouz
Messages : 324
Inscription : dim. 24 avr. 2022 16:22
Présentation : viewtopic.php?f=9&t=11447]MéKicéShingouz ?
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Âge : 56

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par Shingouz »

Je ne suis pas convaincu par le pouvoir effectif des gardes-fous comme tu les décris car ils ont d'autres travers plus pernicieux, mais passons.
Quant au fait d'encadrer et limiter l'influence des marchés sur la structure des entreprises, cela suppose un pouvoir extérieur qui puisse l'imposer. Et là, je pense que la bataille est déjà perdue car ce serait naturellement le rôle des états et l'on sait ce que l'état a perdu de pouvoir face aux grandes entreprises.
Je suis aussi d'avis que c'est sur ce sujet précis (la structuration des organisations) que l'influence et l'action des grands cabinets de "conseil" est la plus dommageable : leur intérêt (quoi qu'ils s'en défendent) est de "proposer" LEUR solution et non pas de réellement penser une nouvelle organisation originale. J'en ai fait plusieurs fois l'expérience et comme les frontières entre eux sont poreuses et qu'ils se benchmarkent tous (sorry for the anglicisme), ils finissent tous par pousser les mêmes "solutions" et bien entendu sans trop d'originalité puisqu'ils vendent des choses "qui marchent" ... soi-disant.
Bref, je n'y crois plus :'(
"I'd rather have questions that can't be answered than answers than can't be questioned."
R. Feynman

Avatar de l’utilisateur
prince2phore
Messages : 115
Inscription : lun. 16 févr. 2015 12:35
Présentation : [url=http://adulte-surdoue.fr/presentations/topic-t5919.html]Qui suis-je ?[/url]
Profil : Intéressé pour une personne de mon entourage
Test : NON
Localisation : Shanghai
Âge : 47
Contact :

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par prince2phore »

Je ne peux pas vraiment te contredire, je passe aussi par des phases très pessimistes. Si encore la pente descendante se limitait aux entreprises ça irait mais bon...
Bref, oui c'est pas gagné, on est d'accord.
Mais comme pour toutes les choses qui nous dépassent (par leur échelle de grandeur), on peut toujours faire de son mieux à son niveau et... advienne que pourra. Au moins on est pas obligé de souffrir au jour le jour.
Dans mon cas et bien que conscient de toutes les limites et tous les abus que tu as relevé, je parviens chaque jour à régler des problèmes techniques ou humains et à un certain niveau (individuel jusqu'à mondial selon mes clients) à améliorer malgré tout la situation à un instant T plutôt que de l'aggraver. Même si c'est sur un bateau bien plus gros qu'on peut penser voir lentement couler :)

Courage !
Appuyez-vous sur les principes, ils finiront bien par céder.

Avatar de l’utilisateur
Shingouz
Messages : 324
Inscription : dim. 24 avr. 2022 16:22
Présentation : viewtopic.php?f=9&t=11447]MéKicéShingouz ?
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Âge : 56

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par Shingouz »

En tout cas, 谢谢你 ! 我很高兴说了跟你. (je garantis pas la justesse mais je fais un effort ;) )
Nous sommes d'accord sur le diagnostic, la manière de vivre la pathologie diffère. :D
"I'd rather have questions that can't be answered than answers than can't be questioned."
R. Feynman

Avatar de l’utilisateur
prince2phore
Messages : 115
Inscription : lun. 16 févr. 2015 12:35
Présentation : [url=http://adulte-surdoue.fr/presentations/topic-t5919.html]Qui suis-je ?[/url]
Profil : Intéressé pour une personne de mon entourage
Test : NON
Localisation : Shanghai
Âge : 47
Contact :

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par prince2phore »

Yep, merci aussi de la discussion !
En chinois on dirait plutôt comme ça : 我很高兴 我和你说话了
Ou certainement encore d'une autre façon mais je ne suis pas du tout un expert même après 12 ans ici :(
Appuyez-vous sur les principes, ils finiront bien par céder.

Avatar de l’utilisateur
Sean
Messages : 40
Inscription : sam. 30 avr. 2022 18:48
Présentation : viewtopic.php?f=9&t=11451
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Âge : 35

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par Sean »

Cela fait 14 ans que je suis "sur le marché" et je n'ai pour l'instant trouvé mon bonheur ni dans les grandes structures publiques, ni dans la startup nation parisienne, ni dans les PME (avec actionnariat). Je suis dans l'informatique donc aux premières loges pour participer aux expérimentations sur la gestion des gens, des projets, de la numérisation à outrance, and for the anglais to look smarter, wow i feel so special writing this, you don't mind if we continue this thread in english?

Quoiqu'il en soit, je n'arrive pas à trouver une entreprise qui ait suffisement d'éthique et qui ne bosse pas pour certains secteurs d'activité que je boycotte déjà dans ma vie privée. Je pense que c'est directement lié à notre culture du travail et à la sainte croissance, qui transforme et impose la façon dont l'outil informatique est mis en oeuvre dans notre société. J'ai trop de mal à m'intéresser au sujet pour pouvoir sourcer et rendre justice à mon raisonnement, mais c'est ce que je constate au quotidien quand je vois la souffrance que peut engendrer l'utilisation de l'informatique: employé ou client, je vais devoir m'adapter pour rentrer dans les petites cases ce que l'ordinateur me demande, et tant pis si c'est chiant et que ça ne correspond pas à la réalité, on est là pour faire des économies d'échelle mon bon monsieur.

Après avoir littéralement traversé la rue pour changer et avoir mon travail actuel (comptez aussi le franchissement d'une ligne de tram) j'ai de nouveau écouté notre cher président qui je cite a annoncé le 14 juin dernier: "La décroissance, nous la combattons". Autant vous dire que cette fois-ci je me fais pas avoir, je vais prendre le contre pied de cette culture du travail (ou à minima de la croissance) en proposant mes services en tant que développeur freelance pour de l'éco-conception de site web! Et pas la prestation greenwashing, l'autre...

Avatar de l’utilisateur
Shingouz
Messages : 324
Inscription : dim. 24 avr. 2022 16:22
Présentation : viewtopic.php?f=9&t=11447]MéKicéShingouz ?
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Âge : 56

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par Shingouz »

Me revoici avec des nouvelles du front et ayant eu droit à une seconde séance de symposium, j'ai pu mesurer la portée de la sagesse de @Fu-man-chu...
Car le sage m'avait prévenu :
Fu a écrit : mer. 29 juin 2022 09:14 C’est une chance. La dernière réunion bullshito-philosophique à laquelle on m’a forcé à participer était en présentiel, avec des activités débiles. J’aurais préféré le faire en visioconférence, pour les raisons que tu évoques. :)
Et j'ai ainsi pu mesurer à quel point le présentiel augmente la douleur... car j'ai moi aussi eu droit aux activités débiles et méthodes douteuses sus-mentionnées, animées par McKinsey ! C'est pas les Bronzés, je peux vous le dire.

Très rapidement, nous avons eu droit à la (connue mais toujours aussi débile) construction d'un pont en papier et scotch. Ce dernier devait être le plus long possible et tenir entre deux chaises. Super. Cool. Génial. :puke:
Je passe sur l'inanité de la chose, le temps très limité, le manque de clarté des consignes, le fait que la triche soit validée implicitement et même récompensée ("means to an end are part of your job". Sic.), j'étais plutôt de bonne humeur le jour dit, dans un groupe formé de nombreux cyniques et cela m'a donc poussé à imposer une solution originale qui avait peu de chances de marcher. Juste pour voir. Moralité, on a perdu comme prévu mais qu'est ce que c'était jouissif de voir l'incompréhension sur le visage de la G.O. de McKinsey. :devil:

Mais le clou du spectacle a été l'utilisation d'une technique "visuelle" pour estimer l'adhésion du groupe (60 personnes) au changements à venir. Après nous avoir bourré le mou exposé la manière dont notre "way of working" allait bientôt changer drastiquement et les fausses raisons qui sous-tendaient ce changement de "paradigm", la consultante en chef nous a proposé de nous regrouper contre un mur de la salle et nous a demandé de nous positionner, sur une échelle de 0 à 10, à gauche si tout ceci ne nous motivait pas du tout (0/10) ou à droite si nous étions super motivés (10/10). Idem pour notre avis sur la chance de réussite, etc, etc.
Je vous laisse réfléchir au côté vicieux de la chose, sachant que nos patrons étaient dans la salle et nous y reviendrons plus bas.
Quoi qu'il en soit, ce fut intéressant de voir la morphologie du bloc se modifier ... sans trop bouger. En gros, une belle courbe de Gauss avec un ventre bien rempli en plein milieu et deux ailes bien plus rabougries sur les côtés.
Autre observation intéressante, la ruée pour les places bien contre le mur, c'est à dire, bien planquées derrière la masse relative de ses collègues.
Et finalement, une surprise, la rébellion ouvertes et publiques de deux de mes collègues (toutes deux très récentes dans la boite, les pauvres), ayant ouvertement choisi de se positionner "en dehors" de la population car "leur activité n'avait pas été prise en compte par le plan de changement". Raison sur le fond mais j'ai peur pour elles sur la forme.

Alors, que retenir de cet exercice ? Pour ma part, gros malaise et feux d'alarme dès la demande formulée.
Sur la forme tout d'abord car dans les mots mêmes de la consultante se trouvait un jugement : "let the optimists go towards the right and let the cynics go towards the left". Oui, vous avez bien lu, "the cynics". Je doute que cela ait été conscient chez elle et qu'elle ait voulu envoyer un avertissement explicite, mais il était bien présent pour ceux qui savent écouter. Moi (of course, je suis allé vers la gauche) et mes collègues cyniques, n'étions pas simplement des pessimistes (contraire des optimistes), nous étions des cyniques. Avec tout ce que cela comporte d'opposition potentiellement active, de méfiance non corporate, de sabotage terroriste et de non-adhésion irrémédiable à leur objectif. Bref, des traitres en puissance.
Alors, c'est bien vu comme manipulation mais j'ai trouvé cela pour le moins malhabile et pour tout dire assez contre-productif. Mais aussi très révélateur et justifiant que j'aille immédiatement me poser le dos contre le mur, à gauche côté cyniques, mais bien planqué derrière deux collègues :tmi: , et pas trop à gauche non plus :shake: .
Bien m'en a pris car j'ai immédiatement vu mon patron enregistrer lentement et avec attention qui allait où et qui en faisait ou non un "statement"... et ne pas se positionner physiquement pour sa part. Ça faisait un peu groupe de prisonniers devant les matons attendant que quelqu'un se dénonce. Ce qui d'ailleurs est advenu car l'étape suivante fut de demander à quelques personnes pourquoi elles s'étaient posées là (valait mieux être derrière, je vous l'avais prédit). Je vous passe les détails mais j'ai pu observer en live, le panel précédemment décrit et discuté dans ce fil : ravis de la crèche, idiots utiles, requins corporate, bof-men (ou women), passifs et cyniques. Bizarrement, plus la parole passait vers la gauche (vers les cyniques) et plus la prise de parole devenait brève et difficile.

Intéressant exercice d'observation pour moi de voir une méthode tendant à (ne rayez rien, tout est utile) : rechercher des traitres, stigmatiser les rebelles, estimer les futurs postes à remplacer, rechercher des endroits où ça va coincer...
Mais aussi, content d'avoir pu anticiper et de mon contrôle sur moi pour avoir su me protéger pendant ce qui restera dans ma mémoire comme une vraie séance de ré-éducation.
"I'd rather have questions that can't be answered than answers than can't be questioned."
R. Feynman

Avatar de l’utilisateur
Bulle d'o
Messages : 2754
Inscription : sam. 3 nov. 2018 01:10
Présentation : [url=https://adulte-surdoue.fr/viewtopic.php?f=9&t=9657] un bout de moi [/url]
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Localisation : bof
Âge : 45

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par Bulle d'o »

Je trouve terrible ce que tu décris. Ça me rappelle avoir travaillé puis fini par partir, auprès d’un chef, qui n’avait rien de tortionnaire (n’était psychiquement pas équipé pour) mais était ce que d’aucun aurait nommé un « mouton pris dans l’idiocratie ». (bon mes collègues et moi avions fini par le nommer ainsi).

Il prônait l’innovation sociale, ce que j’aurais trouvé intéressant si elle en avait été une, amenant son lot d’interrogations et de techniques et de réponses. Mais tout ce que nous pouvions apporter de dépoussiérage et modernisation de méthodes qui avaient fait leurs preuves ou de réels outils de coopérations étaient systématiquement rabroués.

Il voulait du « truc et astuce ». Mais il ne cernait absolument pas les enjeux. Je me souviens d’un bilan où il récupérait les éléments de satisfaction ou non d’un groupe en clamant la confidentialité de ce qui était écrit puis récupérait les petits papiers. Une fois les petits papiers posés sur son tableau (post it) pour échanger en débat avec le groupe il demandait, brave, « alors qui a écrit ça ?». Une gêne terrible s’installait. Mais il y allait, tout seul.

On était 9, 6 ont démissionné au bout d’un an pour l'aberrant que c’était.

Difficile de ne pas attribuer celà à des méthodes inapplicables en milieu pro franco-français (service public) quand le monsieur était anglo-américain. Il ne voyait pas le problème de non-ajustement aux paradigmes premiers qui différaient.

On a fini par souligner que c’était du gâchis d’avoir développé dans son cas, la classe américaine et l’énergie anglaise. Bon.
"Je ne communique pas mes jugements, je ne suis pas un donneur de leçons, l'observation du monde ne suscite chez moi qu'un dialogue intérieur, un interminable dialogue avec moi-même."

Les désorientés (2012) de Amin Maalouf

Avatar de l’utilisateur
GraineDeNana
Messages : 1888
Inscription : sam. 4 déc. 2021 07:52
Présentation : http://adulte-surdoue.fr/viewtopic.php? ... 66#p349066
Profil : En questionnement
Test : NON
Localisation : 51 allée Georges Perec
Âge : 51

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par GraineDeNana »

@Shingouz , la lecture de ton dernier post donne des sueurs froides et laisse un goût amer dans la bouche.
J'espère que ce type de pseudo-symposium ne te sera imposé que de manière très épisodique, et j'espère surtout que ton travail au quotidien t'apporte assez de satisfactions pour compenser ces moments insupportables.
Quand on arrive au monde, la vie est déjà commencée. C'est pour ça qu'on ne comprend rien à l'histoire.
Natacha de Pontcharra

Avatar de l’utilisateur
Shingouz
Messages : 324
Inscription : dim. 24 avr. 2022 16:22
Présentation : viewtopic.php?f=9&t=11447]MéKicéShingouz ?
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Âge : 56

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par Shingouz »

@Bulle d'o , j'ai eu droit un certain temps au modèle "idiot utile" comme chef direct. Finalement assez facile à gérer, du moment que tu n'as rien à en attendre et que tu peux le contourner parfois. Là, j'ai touché le gros lot depuis 5 mois : le modèle "narcissique" adepte du "make it happen" et très convaincu du modèle de contrôle absolu qu'on nous impose. C'est beaucoup plus difficile à gérer... pas de frontal, éviter de s'engager trop clairement (lui ne le fait jamais, c'est toujours flou), dire oui mais pas trop, laisser passer du temps avant de se lancer histoire de voir s'il a oublié ou pas. Extrêmement pénible.
Et ce qui fait que ça tient (pour moi mais je suis loin d'être le seul !) c'est le fait de toujours aimer son vrai travail, comme le dit @GraineDeNana. Celui que tu fais en petit comité avec quelques collègues et ton équipe, celui où certain(e)s te disent merci car ils savent que sans toi, ils étaient bien dans la m...
Et aussi, le fait dans mon cas d'être un "expert" qu'il est manifestement, sinon impossible, du moins trèèèèèèèès difficile et risqué de tenter de remplacer. :devil:
Ces utilisateurs ont remercié l’auteur Shingouz pour son message :
Bulle d'o
"I'd rather have questions that can't be answered than answers than can't be questioned."
R. Feynman

Avatar de l’utilisateur
Shingouz
Messages : 324
Inscription : dim. 24 avr. 2022 16:22
Présentation : viewtopic.php?f=9&t=11447]MéKicéShingouz ?
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Âge : 56

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par Shingouz »

En faisant la cuisine ce soir, j'écoutais "C'est dans l'Air", les mains d'un côté et le cerveau de l'autre. Et là, une pensée me traverse en écoutant les discussions. Paf, comme ça. Oui, je vous le dis.
Tel Maigret arrivant dans les dernières pages du bouquin, cela m'a arraché un "bon sang ! mais c'est bien sur !".
Alors de quoi donc je parle sans en parler depuis trois lignes ? Je vous fais grâce du chemin tortueux que cela a pris dans ma tête depuis une simple remarque d'un des intervenants de l'émission et je vais directement à la conclusion.
Je précise que cela concerne mon milieu professionnel connu de grande entreprise, mais je pense que cela vaut ailleurs.

Pourquoi donc ceux qui font les choses ont ils été laissés pour compte par ceux qui font faire les choses ? Parce que pour progresser, il faut maintenant faire faire. Obligatoirement. Sinon, "vous n'avez pas d'ambition" (sic). Et donc, ceux qui ne savent que faire mais aussi ceux qui persistent à faire (les pires) sont de fait dévalorisés. Et ceux qui font faire deviennent de fait les dépositaires du pouvoir mais également du "savoir". Car enfin, eux ont réussi puisqu'ils sont Managers ou Chefs de Projet (ceusses qui font faire) et par conséquent ils ont raison et savent.
Et ceux qui font sont alors réduits au rang d'exécutant pur et simple. On leur dénie d'avoir un avis, d'avoir raison, de savoir.
Cela me parait par exemple expliquer au moins en partie pourquoi le PDG de Total a cru bon de s'augmenter de 50% mais pas ses troupes. (Exemple d'actualité, n'y voyez aucun jugement politique de ma part, je ne suis ni pour ni contre la CGT, bien au contraire...). Et c'est également ce que je vois dans ma boite...

Probable que ce ne soit pas une révélation mais ça m'a paru tellement lumineux sur le coup... votre avis ?
"I'd rather have questions that can't be answered than answers than can't be questioned."
R. Feynman

Avatar de l’utilisateur
Napirisha
Messages : 4121
Inscription : lun. 22 juin 2015 12:15
Profil : Bilan +
Test : WAIS

Ancien Membre de l'équipe

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par Napirisha »

C'est un des soucis de la fonction publique entre autre : on n'a plus de rôles d'experts. Donc on est petite main ou chef, mais monter en compétence d'un point de vue technique, sans devoir se taper la gestion administrative ou budgétaire ou le management, c'est quasi impossible.

(J'ai pensé très fort à ce fil l'autre jour, un ami a un chef qui met dans ses signatures de mail des devises du style "enthousiasme et rigueur" "persévérance et action", enfin ce type de conneries. Allez savoir pourquoi, ça afflige les équipes davantage que ça ne les motive...)
wonderbra de la recherche Google (c) Miss Souris

Avatar de l’utilisateur
Shingouz
Messages : 324
Inscription : dim. 24 avr. 2022 16:22
Présentation : viewtopic.php?f=9&t=11447]MéKicéShingouz ?
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Âge : 56

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par Shingouz »

Napirisha a écrit : mar. 18 oct. 2022 18:34 C'est un des soucis de la fonction publique entre autre : on n'a plus de rôles d'experts.
Tout à fait, il en va de même dans l'industrie : moi et quelques collègues sommes les derniers des Mohicans, six en tout pour un groupe de 8000 personnes... Et deux d'entre nous ne font plus que du management déjà.
"Les experts sont ingérables", je l'ai entendu maintes fois. Et ceci car ce sont les seuls qui restent détenteurs d'un savoir qui échappe aux chefs de projet. Les directions des boites ont donc tendance à ne pas les remplacer.
Autre problème, bien que Steve Jobs ait dit (je paraphrase) " vous ne payez pas pour un travail de 30', vous payez pour une expérience de 10 ans qui permet d'avoir la réponse en 30' ", il faut ... payer quelqu'un pendant 10 ans et en plus à faire la même chose tout le temps. Et ça, c'est très mal selon l'orthodoxie financière et de gestion de projets.
"I'd rather have questions that can't be answered than answers than can't be questioned."
R. Feynman

Avatar de l’utilisateur
InMedio
Grille pain
Messages : 1184
Inscription : ven. 5 janv. 2018 12:37
Présentation : [url=http://adulte-surdoue.fr/viewtopic.php?f=9&t=9049] C'est ici[/url]
Profil : Bilan +
Test : WISC
Localisation : Angers
Âge : 30

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par InMedio »

Steve Jobs reprend la (fameuse ?) Histoire du coup de marteau : Un responsable de production appelle un réparateur car sa machine hyper complexe est tombée en panne. Le réparateur arrive avec sa petite malette sa moustache et ses lunettes, il passe des heures à regarder la machine sous tous les angles, à tendre l'oreille, à se laisser la moustache sans rien faire... Et puis il s'en va. La semaine suivante il revient voir la machine, va vers un tuyau, ouvre sa malette, sort un tout petit marteau et donne un coup, un seul, sur ledit tuyau. Il appuie sur un bouton et la machine redémarre ! Alors il file la facture au responsable de production : 10 000€. L'autre saute au plafond et demande des détails. "10€ pour le coup de marteau, 9 990 € pour savoir où le mettre"

Dans mon désormais ancien boulot j'avais en plus de mon rôle de mec qui fait, un petit rôle de conseil, d'expert. Les responsables d'expérimentation me demandaient mon avis sur des sujets sur lesquels ils me savaient plus compétents qu'eux alors que j'étais leur subordonné.
C'était plutôt agréable à vrai dire. J'espère (naïvement) pouvoir retrouver ça quelque part, mais si vous me dites que ça se fait plus, je vais pleurer.
Vous ne pouvez pas prouver que quelque chose n'existe pas, mais vous pouvez conclure qu'il n'y aucune raison de penser que ce quelque chose existe.
Richard Monvoisin

Avatar de l’utilisateur
Shingouz
Messages : 324
Inscription : dim. 24 avr. 2022 16:22
Présentation : viewtopic.php?f=9&t=11447]MéKicéShingouz ?
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Âge : 56

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par Shingouz »

Toujours le même a également dit : "It doesn't make sense to hire smart people and tell them what to do. We hire smart people so they can tell us what to do."
Mais ça c'était avant, ou toujours dans des secteurs de la Tech où le patron vient du côté technique de la Force. Ailleurs, tu ne peux pas être Smart si tu n'as pas fait carrière comme tout le monde, et donc si tu ne fais plus.
Il reste encore des postes d'expertise mais ils sont de plus en plus recadrés et soumis aux mêmes contraintes que tous les autres.
"I'd rather have questions that can't be answered than answers than can't be questioned."
R. Feynman

Avatar de l’utilisateur
lady space
Messages : 3070
Inscription : ven. 18 févr. 2011 17:41
Présentation : [url=http://adulte-surdoue.fr/equipe-f78/lance-t133.html]vers mon orbite[/url]
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Localisation : Alsace
Âge : 59

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par lady space »

Je viens de tomber sur cet article qui relie l'effet Dunning-Kruger au brassage de vent intensif et non identifié par certaines hiérarchies malgré son manque évident d'efficacité. Je n'avais jamais fait le lien du "marchage sur la tête" avec cet effet mais, réflexion faite, il explique très bien pourquoi les inepties managériales sont sans issue et semblent être impossibles à éradiquer.

https://www.observatoire-ocm.com/rh/dos ... ng-kruger/
Jeder ist ein Ausländer - fast überall.
Laisse-moi kiffer l'Europe avec mes potes... :heureux4:

Avatar de l’utilisateur
Shingouz
Messages : 324
Inscription : dim. 24 avr. 2022 16:22
Présentation : viewtopic.php?f=9&t=11447]MéKicéShingouz ?
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Âge : 56

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par Shingouz »

@lady space , tu viens de décrire de manière tout à fait exacte le mal qui gangrène mon entreprise. A tel point que j'ai affiché dans mon bureau une belle courbe de Dunning-Kruger avec le logo de l'entreprise pile poil sur "l'optimum" (c'est ironique) Incompétence/Confiance en soi.
Et oui, pour moi l'effet Dunning-Kruger est tout à fait adapté à décrire les conséquences de ce qu'on appelle "atteindre son niveau d'incompétence" de manière inconsciente. Cela provient d'un tropisme nocif qui tend à faire progresser des professionnels (ingénieurs, commerciaux, acheteurs) exactement de la même manière et de les appeler Managers en considérant qu'ils ont alors le même métier. Ce n'est pas vrai et cela tend à instiller l'idée que "j'ai été promu car compétent, je suis toujours compétent". Et plus ces gens montent, plus ils pensent être multi-compétents (voici apparaitre Dunning-Kruger)... puisqu'on les a promus, c'est qu'ils sont bons !
Ils ne doutent plus et deviennent alors dangereux.

Comme tu dis, on n'est pas prêt d'éradiquer cette logique infernale...
"I'd rather have questions that can't be answered than answers than can't be questioned."
R. Feynman

Avatar de l’utilisateur
lady space
Messages : 3070
Inscription : ven. 18 févr. 2011 17:41
Présentation : [url=http://adulte-surdoue.fr/equipe-f78/lance-t133.html]vers mon orbite[/url]
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Localisation : Alsace
Âge : 59

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par lady space »

En même temps, le terme de manager est bien galvaudé aussi. Dis-toi que, dans les années 80, sur le chantier d’un hôtel d’une chaîne américaine à l’aéroport de Francfort, j’ai eu affaire à un empty bottes manager (en fait, c’était le gars qui s’occupait de faire le tri entre les bouteilles consignées et celles qui vont dans la benne du recyclage) :rofl:
Jeder ist ein Ausländer - fast überall.
Laisse-moi kiffer l'Europe avec mes potes... :heureux4:

Avatar de l’utilisateur
Holi
Messages : 3225
Inscription : jeu. 8 mars 2018 18:07
Présentation : viewtopic.php?t=9243
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Localisation : Au pays du cannelé et de la chocolatine
Âge : 60
Contact :

Re: Culture du travail au XXIème siècle

Message par Holi »

Hors-sujet
lady space a écrit : mer. 16 nov. 2022 19:04 j’ai eu affaire à un empty bottes manager
Bottes de chantier et bottes de manager ce sont les mêmes ? Quoique si elles sont vides on s'en fiche. :clin:
À force de penser à ce que les autres pensent de nous, on en oublie de se penser soi-même.
Christophe André

Répondre