S'en sortir ou pas : qu'est-ce qui fait vraiment la différence ?

La partie consacrée à la Santé dans sa globalité. Principalement la psychologie, psychologie sociale, la psychiatrie, les troubles de l'humeur, de la personnalité, les handicaps, l'autisme...
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Grabote
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Re: S'en sortir ou pas : qu'est-ce qui fait vraiment la différence ?

Message par Grabote »

Je trouve ça bizarre et plutôt désagréable de venir dire à quelqu'un.e qui s'interroge que "ça sert à rien ". Bizarre particulièrement ici où on pourrait s'attendre à une plus grande tolérance. Perso y'a pas mal de sujets qui s'ouvrent et qui ne m’intéressent pas ou ne "me servent à rien", ben je laisse celles et ceux à qui "ça sert" discuter tranquillement.
Du coup je me demande si ce n'est pas une question dérangeante pour celles et ceux qui ont besoin de venir exprimer que "ça ne sert à rien". Et j'me demande en quoi c'est dérangeant ?
Pour ma part je trouve que c'est une question intéressante que je me suis déjà posée de nombreuses fois, et aussi dérangeante car je suis incapable d'élaborer une réponse pertinente tellement cela me paraît complexe. J'ai bien quelques intuitions floues mais je crois que j'attends que cette sensation de m'"en être sortie" soit assez stable pour commencer à me demander ce qui ma permis de le faire.
Donc désolée Maitresse Rita mais je ne peux pas faire mieux aujourd'hui !
Tu as le chic pour ouvrir des fils qui m'interpellent mais auxquels je n'arrive pas à répondre !
Comme celui sur le faux self, je tourne autour mais ...
L'essentiel est sans cesse menacé par l'insignifiant. René char

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Léo
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Re: S'en sortir ou pas : qu'est-ce qui fait vraiment la différence ?

Message par Léo »

Je pense à Boris Cyrulnick... qui donne souvent de bon éléments de réflexion entre la neurologie et la psychologie pour "expliquer" la résilience, la capacité ou non à passer outre. Ne pas oublier les composantes génétiques, même si j'y connais rien précisément et qu'elles ne constituent qu'une part du problème. On n'est pas tous égaux en matière de gènes... Je pense aussi aux facteurs biologiques; notamment le fait de "disjoncter" (déconnexion de l'amygdale) lorsqu'on est en proie à quelque chose d'insoutenable. Cette déconnexion, pas prise en charge, provoque de réelles difficultés à se remettre d'un évènement traumatisant.

Ensuite, la part environnementale, sociale, culturelle... comment on "normalise" les émotions, le bien,le mal etc etc... tous ces facteurs qu'on peut difficilement "analyser" vraiment intimement... On se raconte beaucoup d’histoires qu'on croit "vraies" pour essayer de comprendre, relativiser, objectiver... C'est "normal", on a besoin de sens jusqu'au moment où ce sens là, ne fait plus sens dans sa propre histoire. On peut passer des plombes à chercher ce qui nous rend si incapable de nous en sortir et s'en sortir indépendamment de ce qu'il faudrait faire. On peut aussi s'investir dans ce qui est proposé (thérapie ou autre) et s'en sortir...

On met en place des structures pour accueillir mais ça n'existe pas partout et surtout ça ne prend en compte qu'une généralité. Même si on sait que globalement, verbaliser sa douleur par exemple, peut grandement aider, on oublie qu'une partie des individus en souffrance n'ira pas se faire aider, soit parce que y'a rien dans leur coin, soit parce que c'est inconcevable dans leur tête , soit parce que parfois, ça arrive, les personnes ne veulent pas. Je ne sais pas si c'est une forme d'abandon face à l'insolubilité de certaines questions comme celle là, quand on dit d'une personne qu'elle ne veut pas s'en sortir. J'en ai connu qui disaient ça d'elle-même, j'en connais qui le disent et le revendiquent et j'ai toujours eu un doute; j’imagine que c'est une projection de ma part peut-être, je schématise bêtement : "non, tu ne peux pas avoir envie de mourir parce que tu n'arrives pas à t'en sortir, tu peux t'en sortir, crois moi etc etc etc "... et j'en connais qui se servent maladroitement de cet argument pour éviter d'avoir à porter certaines choses. Je comprends les deux en fait. Qui est responsable de sa sortie ? qui décide de son sort ? Je suis un peu hors sujet sans doute mais la question m'y fait penser... et ouvre sur une autre aporie !!!

La douleur et la sidération échappent à beaucoup de choses qu'on tente de classer, enfin, je crois... C'est après que la douleur rentre dans une autre dimension, difficile à évaluer et à prendre en charge. On travaille avec des échelles pour mesurer la douleur physique et psychique aussi et ensuite on essaie de voir à quoi ça peut correspondre.

Pour parler de moi... Je me souviens d'avoir éprouvé des douleurs psychiques (suite à des trucs pas drôles) quasi identiques à certaines douleurs physiques et bien, le centre de la douleur est le même dans ce cas et quand on dit "j'ai mal" pour dire qu'on est malheureux, on a vraiment mal. Cette douleur là, éprouvée, le cerveau s'en souvient... le corps s'en souvient... c'est pas mystique, c'est comme ça et dans certains cas, ça peut durer longtemps, prendre des formes somatiques et durer...

Pour s'en sortir... à l'échelle d'escabeau individuel, le temps, l'empathie, l'aide... beaucoup de patience, de temps... un marche pied pour atteindre la fenêtre (pardon, c'est cynique)... :1cache:

Statistiquement, j'ai beaucoup de mal à envisager une réponse précise (me tapez, pas, je suis pas scientifique pour un sou mais je trouve la question de ces statistiques très intéressante).

Bon, en gros, j'ai pas de réponse très claire non plus... :$
"Soudain, la jeune fille, le plus tranquillement du monde, entreprit de se curer le nez avec les doigts." Witold Gombrowicz

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Lelaelig
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Re: S'en sortir ou pas : qu'est-ce qui fait vraiment la différence ?

Message par Lelaelig »

Sujet intéressant. Pour moi "s'en sortir" correspondrait à -malgré la douleur, le traumatisme quel qu'il soit et la façon qu'on a de le vivre - continuer à construire des choses et à se construire malgré et avec le traumatisme. Surtout pas en le reniant ou en l'étouffant. Donc là déjà, difficile de déterminer de l'extérieur qui s'en sort vraiment.

Mais si on considère dans la limite du possible que ce sont ceux qui entreprennent des choses, qui sortent de leur "torpeur" ou douleur, j'ai l'impression qu'un type de personnalité se dégage (à mon niveau hein, c'est juste une impression histoire de répéter :P ) Généralement, il s'agirait plutôt de personnes ouvertes à l'extérieur, aux gens autour d'eux et à leur ressenti.
Comme le disait sandrinef, les conséquences néfastes et durables de la souffrance viennent d'une sorte de tourbillon intérieur, un cercle qui s'auto alimente de la souffrance/colère/désespoir intérieur. A partir de là, si la personnalité s'ouvre à autre chose qu'à elle-même, le cercle aura davantage de chance de se briser.

Loin de moi ici l'idée de dire que ceux qui ne s'en "sortent pas" sont des égoïstes égocentriques, car parfois, la douleur va provoquer ce repli. Néanmoins, l'idée étant ici de réfléchir à ce qui aide une personne à s'en sortir, je pense que l'ouverture au monde, à l'Autre et à ses sentiments (en particulier à ses souffrances avec empathie) peut aider à sortir de ce cercle qui entrave. J'ai l'impression que c'est un point commun à beaucoup qui ont l'air de s'en être sorti.

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kalimeris
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Re: S'en sortir ou pas : qu'est-ce qui fait vraiment la différence ?

Message par kalimeris »

S'en sortir -> être en vie, se sentir vivant, aimer la vie
Qu'est-ce qui fait la différence ?
Au départ, je dirais que c'est l'instinct de survie. La suite semble plus compliquée : un savoureux cocktail d'actions et de réflexions, ainsi que de quoi payer l'addition :diabloo:

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alohanna
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Re: S'en sortir ou pas : qu'est-ce qui fait vraiment la différence ?

Message par alohanna »

Pour moi, s'en sortir, c'est la résilience, comme déjà expliqué avant.
J'aime bien le cheminement de Léo, qui essaye d'expliquer que chacun a des facteurs qui vont le mener sur un autre chemin, avec chacun ses détours vers finalement la résilience, ou pas.

Mais à mon sens, pour qu'il y ait résilience, il faut qu'il y ait deuil.
Il faut prendre ce mot dans son sens large :
  • deuil d'une aspiration, ou d'une capacité (comme dans le handicap, ou lorsqu'on se rend compte qu'on ne pourra pas exercer le métier de ses rêves, ou...)
  • deuil d'un adulte adulé (mettre l'adulte maltraitant qui était vu comme tout-puissant à une position d'humain malade et non signifiant pour soi)
  • deuil d'une personne chère (lors d'un décès) : c'est sans doute le deuil le plus "préhensible" car sa représentation est réelle, l'entourage compatit, et la personne est officiellement autorisée à montrer sa tristesse.
  • etc... (pas d'autre exemple qui me vienne à l'esprit)
Et je pense que lorsqu'on parle de "s'en sortir", on peut distinguer plusieurs "types" de personnes pour lesquelles on dit qu'elles s'en sont sorties :

D'une part, ceux qui ont réellement fait ce deuil en profondeur, et s'en sont réellement sortis, c'est à dire qu'ils vont réussir à construire leur suite de vie en composant avec le vécu, en l'assumant, et en pouvant en parler.

D'autre part, ceux qui extérieurement se montrent "normaux", qui ont l'air de s'en être sortis. Mais si un événement difficile ressurgit, ils risquent de sombrer. Cela peut ne jamais se produire, car on tend à se construire une carapace pour éviter la souffrance, c'est la douleur psychique dont parlait Léo : on évite les situations où on pourrait souffrir. Le souci, c'est qu'on ne vit pas pleinement...

Je crois que nombreux sont ceux de la 2e catégorie, hélas.

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Chacoucas
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Re: S'en sortir ou pas : qu'est-ce qui fait vraiment la différence ?

Message par Chacoucas »

Je rajoute (on parlait tantôt de l'intérêt éventuel de répéter des choses déjà dites quand elles sont moins exprimées) que l'individu étant en interaction continue avec le monde, il faut bien considérer les influences extérieures, tant l'environnement relationnel immédiat que la société dans laquelle il vit et ses propres représentations de ces milieux.
Ne considérer que l'individu et sa propre capacité à s'en sortir ou pas, à terme, ça ne me semble pouvoir mener qu'à une mythologie du "bon individu" et du "mauvais individu". De la "bonne façon" et des "mauvaises façons" (bon thérapeute, mauvais tout le reste aussi, par exemple).
De la même manière, un suivi psychologique, si bon soit le thérapeute, ne me semble pas pouvoir faire 100 pour 100 du boulot d'"aide". Un thérapeute c'est un entretien privé de 30mn à une heure par semaine (voire 2). Une relation c'est certes beaucoup, mais très loin d'être "tout". L'individu, comme sa résilience, dépendent forcément de facteurs extérieurs nombreux et complexes.

Edit: c'est peut être aussi un "biais" entraîné par le mot "trauma" qui désignerait une expérience ciblée dans le temps de nature mortifère et aliénante. C'est surement rassurant à considérer ainsi, "limité" dans le temps, mais la réalité est bien plus complexe et se fiche probablement des conceptions du temps, qu'il soit linéaire ou circulaire ou "marcheur ivre".

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Euthyphron
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Re: S'en sortir ou pas : qu'est-ce qui fait vraiment la différence ?

Message par Euthyphron »

Ce qu'il me semble, c'est qu'on ne peut jamais s'en sortir. On ne peut jamais se prendre par les cheveux et s'extirper du bourbier où l'on est plongé. Il n'y a pas d'un côté les forts qui y arrivent et les faibles qui ne s'en sortent pas, il n'y a que des faibles. Et à la fin le héros meurt, toujours.
Mais bien sûr il arrive qu'on en soit sorti, par quelque chose (my life was saved by rock'n'roll, chantait le regretté Lou Reed) ou par quelqu'un, un chirurgien compétent, un sauveteur arrivé au bon moment, un ami patient, etc. Il arrive que l'on soit secouru. J'imagine que ce doit être une des grandes difficultés pour un psychothérapeute que d'entendre les appels au secours, de bien les interpréter et de savoir y répondre en suscitant avec succès la coopération de la personne en détresse.
Il arrive aussi qu'on découvre qu'une porte était ouverte, et qu'on est déjà dehors. Le traumatisme n'est pas oublié, la blessure n'est pas supprimée, mais on vit avec sans que cela ait de l'importance. Parce que l'on est aimé, tel que l'on est. Parce que l'on a cessé de s'identifier, sans savoir comment l'on a fait, à l'enfant battu ou à la jeune fille violée que l'on a été, naguère. Et pour l'entourage des proches, des amis, pour la personne aimée, ce n'est pas un problème.
Enfin, parfois, l'on est enfermé pour la vie. La personne aimée et décédée ne reviendra plus, le handicap est définitif. On ne peut toujours pas s'en sortir soi-même, mais, c'est ce qu'a dit Maitresse Rita, il arrive que l'on parvienne à donner sens à ce qui fait souffrir. Quand la prison est bien cernée de murs épais, il n'y a de sortie que verticale.
Marc Aurèle disait : "Souviens-toi que personne ne vit une autre vie que celle qu'il vit", ce que je trouve être un anti-paradoxe très profond. Il nous enseigne par là d'abord à accepter la mort, comme l'indique le contexte. Mais on peut y lire aussi une exhortation à aimer la vie. Non pas parce que "plus belle"! plus belle que quoi, d'ailleurs? Mais parce qu'elle est là, tout simplement, à présent.
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samjna
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Re: S'en sortir ou pas : qu'est-ce qui fait vraiment la différence ?

Message par samjna »

Une définition de "s'en sortir" pourrait être par ordre d'importance décroissante:

a) que le traumatisme cesse de grandir comme une plante qu'on arrose.
b) qu'on trouve éventuellement autre chose à faire qu'à pleurer sur le lait versé ou le nettoyage qui s'ensuit.
c) et que certains de ses dégâts irréparables ne soient pas irrémédiables
Hors-sujet
Euthyphron a écrit :Mais on peut y lire aussi une exhortation à aimer la vie. Non pas parce que "plus belle"! plus belle que quoi, d'ailleurs? Mais parce qu'elle est là, tout simplement, à présent.
Une belle-mère, c'est encore mieux ! On peut aimer une belle-mère comme un présent de la vie.
Pas sûr que c'était un WISC !

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Re: S'en sortir ou pas : qu'est-ce qui fait vraiment la différence ?

Message par lady space »

Euthyphron a dit quelque chose de très juste, enfin plusieurs choses : à la fin, le héros meurt. Donc ça, on le sait - reste à savoir ce qu'il fait, ce qui se passe avant.

À savoir la vie. Parce que, là encore, il a raison : nous n'avons que ça, la vie. Et dans cette vie, il y a une multitude de définitions de "s'en sortir", dont la première à mon sens est "ne pas encore être mort", suivie de "continuer d'avancer". La forme à donner à tout ça dépend de chaque individu, bien entendu.

Nous traînons tous nos casseroles, une vie humaine sans rencontrer la moindre souffrance est illusoire je pense. Et, encore une fois à mon avis, tant qu'on n'a pas admis ce fait et regardé ses propres souffrances en face, on tourne en rond, on reste englué dans la souffrance qu'on cherche à ne pas voir, ne pas ressentir, on perd son temps et son énergie à vouloir aller contre le passé, à chercher à l'effacer. Sauf que ce n'est pas possible.

Alors qu'est-ce qui fait la différence ? Quel est le point commun entre les gens dont on pense qu'ils s'en sont sortis ? Je pense que c'est le fait de privilégier la vie, malgré, envers et contre toutes les souffrances. Seuls ou avec de l'aide, peu importe.

Pour moi, cette fameuse résilience est là : ne pas nier les casseroles mais les regarder en face, les identifier, puis les retourner pour grimper dessus et regarder de l'autre côté de la clôture. Se détacher de ses gravats pour construire la suite de sa route avec. En fonction de leur nature, ils resteront toujours présents, certains traumatismes laissent des séquelles, ce qui va certainement dévier notre parcours par rapport à l'idée que l'on s'en faisait au départ, mais ça n'empêche en rien d'avancer, de poursuivre sa quête personnelle, peut-être en aménageant son véhicule, peut-être en changeant de trajet ou d'objectif. Planter son pommier personnel, tout en sachant que l'inévitable va arriver un jour. La vie quoi...
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Re: S'en sortir ou pas : qu'est-ce qui fait vraiment la différence ?

Message par alohanna »

Euthyphron a écrit :Ce qu'il me semble, c'est qu'on ne peut jamais s'en sortir. On ne peut jamais se prendre par les cheveux et s'extirper du bourbier où l'on est plongé. Il n'y a pas d'un côté les forts qui y arrivent et les faibles qui ne s'en sortent pas, il n'y a que des faibles. Et à la fin le héros meurt, toujours.
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Je ne suis pas d'accord avec ce que tu dis dans cette partie Euthyphron: Car ce n'est pas "on en est sorti". Ce point-là me chiffonne profondément :lol:
Certes, je suis d'accord sur l'idée qu'un élément extérieur peut être nécessaire pour enclencher le processus de guérison. Mais c'est le "patient" (on va appeler la victime comme ça) seul, qui s'en sort, qui avance. Tu ne pourras jamais forcer quelqu'un à s'en sortir s'il ne le veut pas... Et même dans une démarche psy, celui-ci te guide mais c'est toi qui avances... Si le patient refuse d'avancer là encore, le psy ne pourra rien pour lui.

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Re: S'en sortir ou pas : qu'est-ce qui fait vraiment la différence ?

Message par Euthyphron »

Il me semble tout de même que si le patient est capable de s'en sortir seul (c'est un peu un truisme) c'est qu'il n'a pas besoin d'un psychiatre.
Ce que tu dis, et qui me paraît vrai, c'est que le psychiatre n'est pas tout-puissant, qu'il a besoin de la collaboration de son patient. C'est d'autant plus vrai que le patient a besoin de reconquérir son autonomie.
Mais il ne s'ensuit pas qu'on puisse se guérir soi-même avec simplement de la volonté. Cette volonté n'est pas disponible à demande. Même pour arrêter de fumer, les efforts de volonté ne suffisent pas, et là je me plaçais dans l'hypothèse de cas plus graves, selon ce que j'avais compris de l'intention du fil, et du sens donné à l'expression "s'en sortir".
Je comprends ton point de vue (enfin, je crois). Du point de vue du médecin, il me semble qu'il lui faut croire en la capacité du malade de retrouver la force mentale nécessaire pour avancer. Cette croyance du médecin pourra même, peut-être, servir de déclencheur.
Les deux points de vue ne me semblent pas contradictoires, car cette force retrouvée du patient pourra être justement le fruit de la confiance réciproque entre lui et son médecin.
Lady space,
je ne sais pas si j'ai dit quelque chose de très juste mais je te remercie de m'avoir si bien compris.

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Re: S'en sortir ou pas : qu'est-ce qui fait vraiment la différence ?

Message par soazic »

Un des leviers que peut induire la relation avec le psy est aussi celui du transfert, engrenage qui met la personne dans une dynamique. La thérapie a mon sens est aussi trouver ensemble le ou les leviers. Etre au fond du trou est aussi être anesthésié de douleur, ruminer celle ci qui devient une forteresse sans lumière. Certains pourront porter leur regard vers la lumière, d'autres n'en auront pas la force, l'envie, la possibilité. Comment sen sortir quand les symptômes sont eux mêmes des prisons (aboulie, asthénie, etc...). Seul, cela peut être vain, ou possible, mais plus long.

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Re: S'en sortir ou pas : qu'est-ce qui fait vraiment la différence ?

Message par GraineDeNana »

Je remonte ce fil car je viens de voir en salle un film documentaire extrêmement fort intitulé : "Et je choisis de vivre."

Ce documentaire a été tourné en 2019 dans la Drôme grâce à un financement participatif. Il est bref (1h10) et contient des pistes de réflexion sur notre rapport à la vie, au deuil, au trauma qui vont me suffire pour plusieurs années. Il est projeté ponctuellement dans des salles de cinéma, et je constate qu'il a été diffusé en mars 2022 sur France3 (peut-être certains l'ont-ils vus ?), mais le replay n'est malheureusement plus disponible.

Le documentaire est né de l'initiative d'une jeune femme, Amande, qui a perdu l'année précédente son bébé, la veille de ses un an (il décède d'une pathologie cardiaque). Elle se sent submergée par un chaos interne, des pulsions suicidaires (qui ne sont qu'à peine évoquées mais sont en réalité je pense tout l'enjeu pour elle) et cherche des solutions pour retrouver une cohérence/un sens à sa vie. Aidée par un ami (le réalisateur, Nans Thomassey), accompagnée de son mari, elle part à la rencontre d'hommes et de femmes qui ont également vécu le deuil d'un enfant, pour trouver des pistes de résilience. La piste de la spiritualité est également évoquée. Ces rencontres sont passionnantes, d'une sincérité désarmante de simplicité, chacun.e expliquant quelle philosophie il/elle a tiré de ce trauma majeur qu'il/elle a traversé; plusieurs en ont fait un point de départ de leur vie d'après (un homme, Christian Fauré, est devenu un spécialiste du deuil, il publie des essais à ce sujet; une femme âgée travaille aux soins palliatifs ; une autre femme a intégré la troupe de clowns qu'elle a rencontré toutes les semaines dans le contexte de l'hospitalisation très prolongée de son enfant...).

Une des clés du documentaire : "Les vivants ferment les yeux des morts et les morts ouvrent les yeux des vivants".

Je reviens à la discussion du fil :
Maitresse Rita a écrit : mer. 16 mars 2016 11:07 Quelle que soit la violence des traumatismes que nous vivons, nous avons besoin de créer du sens dessus. Même et surtout s'il n'y en a pas. On se raconte une histoire autour de ce qu'on vit. Autour d'un même fait, on peut se raconter des tas d'histoires différentes en y croyant comme à une vérité absolue.

Exemple : tel enfant était battu par ses parents.
Il peut se raconter des tas d'histoires autour de ça. Ce qui va lui donner des illusions de destin à suivre. Qu'il est battu parce qu'il est mauvais et que c'est comme ça. Qu'on a le pouvoir quand on est grand et fort et que son tour viendra. Qu'il ne faut jamais être faible ou se montrer faible, quoi qu'il en coûte. Qu'il sera pompier ou avocat ou flic ou éducateur pour devenir le sauveur qui n'est jamais venu l'aider. Qu'il sera le père doux et charitable qu'il aurait aimé avoir. Que frapper les enfants, c'est normal et que c'est comme ça qu'il faut faire. Que frapper "les mauvais" c'est normal et que c'est comme ça qu'on les rend meilleurs. Etc, etc...

Bref, toutes ces histoires sont toutes aussi fausses les unes que les autres, dans le sens où le fait d'être battu par ses parents ne signifie absolument rien de l'enfant en tant que tel ni du destin qui doit être le sien. Mais lui, il a besoin de créer du sens dessus pour que sa souffrance ne soit pas absurde. Alors, l'histoire, il va se la raconter. Souvent en boucle...Et elle va prendre de la place dans sa façon de voir le monde, de se positionner et d'agir à son tour.

Alors bien sûr, selon l'histoire qu'on se raconte, la vie est plus ou moins difficile. Grandir en pensant "je suis mauvais et c'est comme ça", c'est probablement plus difficile que grandir en se disant "je vais devenir avocat pour défendre les enfants". Mais dans tous les cas, on est toujours pris au piège d'une histoire qu'on n'a pas vraiment décidé d'écrire. Une histoire qu'on subit en réaction à ce qui s'est passé. Il arrive toujours un moment où on se retrouve coincé dedans.

Alors celui qui s'en sort, je crois que c'est celui qui arrive a comprendre que l'histoire qu'il s'est racontée est une construction pure et simple. Pas une construction qui dépend de l'auteur du trauma mais qui dépend uniquement de lui. Et ça, ça le sort de sa position passive, déterministe du "je suis devenu avocat parce qu'il faut bien que certains sauvent les victimes"," ou "je suis un père permissif et incapable de dire non parce que j'ai voulu être le contraire de mon propre père". Accepter qu'on a fabriqué une histoire tout seul à partir des faits, c'est accepter qu'elle aurait pu être autre, et que finalement, sur des années et des années de vie, elle a déterminé bien plus de choses que les faits en eux-mêmes... Qu'il n'y a pas de vérité sur tout ce qu'on a imaginé. L'histoire peut donc se réécrire autrement et cela ne dépend que de nous. Pas des faits, aussi horribles ont-ils été.

Alors voilà, je crois que pour s'en sortir, il faut reprendre sa part de responsabilité, celle du sens qu'on a placé sur les choses.

On s'en sort si on réécrit le mythe de façon différente, encore et encore, plutôt que de tourner en rond dans le premier qui nous est venu à l'esprit.
Je suis tout à fait d'accord avec cette théorie. La jeune femme du film, Amande, est dans cette dynamique et essaie d'écrire et de réécrire son histoire, de lui donner du sens (elle peut ressentir par exemple de la colère contre le corps médical), et elle comprend que le sens, c'est elle qui va le donner, et que le fait en soi que son enfant soit décédé n'a aucun sens. Elle tente, au milieu d'un maelström de souffrance de remettre en ordre des éléments de sa vie, elle veut "reprendre sa part de responsabilité", comme le disait Maitresse Rita. Ce documentaire est poignant, car nous sommes face à un individu qui met tout en oeuvre pour "s'en sortir" (et elle réussit, elle s'autorise de nouvelles grossesses et de prendre à nouveau le risque de la vie).
Lelaelig a écrit : lun. 4 avr. 2016 21:26 Pour moi "s'en sortir" correspondrait à -malgré la douleur, le traumatisme quel qu'il soit et la façon qu'on a de le vivre - continuer à construire des choses et à se construire malgré et avec le traumatisme. Surtout pas en le reniant ou en l'étouffant. Donc là déjà, difficile de déterminer de l'extérieur qui s'en sort vraiment.

Mais si on considère dans la limite du possible que ce sont ceux qui entreprennent des choses, qui sortent de leur "torpeur" ou douleur, j'ai l'impression qu'un type de personnalité se dégage. Généralement, il s'agirait plutôt de personnes ouvertes à l'extérieur, aux gens autour d'eux et à leur ressenti.
Comme le disait sandrinef, les conséquences néfastes et durables de la souffrance viennent d'une sorte de tourbillon intérieur, un cercle qui s'auto alimente de la souffrance/colère/désespoir intérieur. A partir de là, si la personnalité s'ouvre à autre chose qu'à elle-même, le cercle aura davantage de chance de se briser.

Loin de moi ici l'idée de dire que ceux qui ne s'en "sortent pas" sont des égoïstes égocentriques, car parfois, la douleur va provoquer ce repli. Néanmoins, l'idée étant ici de réfléchir à ce qui aide une personne à s'en sortir, je pense que l'ouverture au monde, à l'Autre et à ses sentiments (en particulier à ses souffrances avec empathie) peut aider à sortir de ce cercle qui entrave. J'ai l'impression que c'est un point commun à beaucoup qui ont l'air de s'en être sorti.
Le documentaire met aussi en avant ce qu'apporte l'ouverture au monde et à l'autre dans la possibilité de "s'en sortir". Cette jeune femme, au moment où elle va le plus mal, va chercher de l'aide dans la parole de l'autre, elle cherche à se reconstruire à travers l'autre. La présence d'amis dans une dynamique de soutien forte est également un des moteurs de la reconstruction du couple, on le voit également dans le documentaire.

Cette réflexion sur l'ouverture aux autres comme manière de "s'en sortir" m'intéresse également d'un point de vue personnel. Je me trouve depuis 3 ans dans un fossé de la vie si profond que je perds parfois pied. L'une des manières que j'ai d'essayer d'en sortir, c'est de me tourner vers les autres, et ç'a été l'une des raisons de ma venue sur ce forum, avec effectivement quelque chose de très positif pour moi (j'y reviendrai dans doute dans mon fil de présentation).
Quand on arrive au monde, la vie est déjà commencée. C'est pour ça qu'on ne comprend rien à l'histoire.
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Re: S'en sortir ou pas : qu'est-ce qui fait vraiment la différence ?

Message par homer »

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C'est un type qui rentre dans un bar et qui dit "salut c'est moi !"; et en fait c'était pas lui.

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Cobb
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Re: S'en sortir ou pas : qu'est-ce qui fait vraiment la différence ?

Message par Cobb »

Je n'ai pas vu le documentaire dont tu parles, @GraineDeNana, j'avais vu un documentaire qui suivait plusieurs parents dont l'enfant (ou l'un de leurs enfants) s'était suicidé.

De mémoire, leurs façons de tenter de mettre du sens sur cet événement tournait beaucoup autour de la question de l'occasion ratée, car leur ado s'est suicidé dramatiquement (parfois à cause du harcèlement scolaire) sans réussir à faire entendre sa détresse extrême à ses parents.
Je crois me souvenir qu'une des maman a créé une association pour faire de la prévention, passer dans les classes.

Il y avait une phase de perte de repères complète, et de passage en revue de l'histoire, des épisodes vécus.

J'avais vu un documentaire, passé sur Téva, moins éprouvant à suivre, sur les personnes trisomiques et comment ces personnes deviennent à peu près autonomes (selon leurs possibilités), se mettent en couple, travaillent (un travail dans lequel on leur laisse le temps d'accomplir des tâches : la femme travaillait dans une administration et gérait le courrier, il me semble), font leurs courses, cuisinent, etc.

Le sujet m'intéresse, mais je ne sais pas du tout.

S'en sortir, ce n'est peut-être pas la bonne question (vous y mettez des guillemets, parfois, j'ai bien vu). Chacun fait ce qu'il peut... mais oui, il doit y avoir des démarches qui participent. Les personnes trisomiques du documentaire se donnaient du mal (car au quotidien, des choses simples peuvent être très compliquées pour elles, même si elles peuvent avoir des talents ciblés ; l'une de ces personnes s'exprime très bien, et ose s'aventurer à faire des courses tout en ayant de gros problèmes de vue et de concentration, par exemple) tout en étant accompagnées et soutenues.
Les parents de l'autre documentaire ne réagissaient pas de la même manière face au drame. Chacun comme il peut et à son rythme, j'imagine.

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