Après avoir cherché, je n'ai pas vu de post sur ce sujet, n'hésitez pas à me mettre des liens si j'en ai raté.
Pour vous faire comprendre comment j'en suis arrivé à ces questionnements sur l'aide humanitaire, je n'ai pas trouvé d'autres moyens que de vous expliquer mon cheminement, je suis désolée si c'est très "auto-moi-je".
Tout cela a commencé par un parrainage d'enfant que j'ai commencé. Il s'agit d'un parrainage dit "collectif", où l'enfant parrainé est "ambassadeur" (ce sont les mots utilisés) de sa communauté, c'est à dire que les sommes versées par l’ensemble des parrains sont mutualisées et servent à des projets collectifs, déterminés par les groupes locaux suite à un travail de 2 ans de réflexion pré- mise en place. L'objectif est qu'en 15 ans la communauté soit "autonome", donc les dernières années, l'association se retire progressivement. Elle assure par contre un suivi quelques années plus tard, pour vérifier que tout va bien.
Quand j'ai commencé, tout cela me paraissait donc très bien, et j'avais choisi justement cette association pour son côté "non assistanat".
Là où ça se corse, c'est que cela a ensuite soulevé un tourbillon de questions en moi, et j'en viens presque à regretter ma démarche, ayant peur d'avoir fait plus mal que bien et me sentant complètement dépassée par la complexité cachée derrière une apparente simplicité (un virement mensuel, un échange de courrier avec l'enfant, quelques petits cadeaux si on veut).
Ce tourbillon a commencé quand j'ai voulu faire un cadeau à la plus grande des fillettes. Avant même de me pencher sur la question de pourquoi je voulais lui faire un cadeau (c'est venu plus tard et n'est pas très glorieux), le problème du choix du cadeau. D'après les informations que j'avais, sa matière préférée est la lecture. Elle a 10 ans et habite avec sa famille au Mali. Parfait, dévoreuse de bouquin, je me voyais déjà lui envoyer un livre. Mais quel livre ? J'avais pensé à des contes, ou bien un atlas pour enfant, ce genre de chose. De recherche internet en recherche internet, je suis tombée sur une thèse portant sur la littérature enfantine au Mali. Parfait. Quelques heures de lecture plus tard, drame. Dans une culture d'oralité, la lecture est peu accessible (ok, je m'en doutais), mais également peu valorisée. Le genre "roman" est quasi inexistant (la thèse date d'une dizaine d'année, donc tout ceci a pu évoluer), les livres préférés sont les albums avec des illustrations et peu de texte. Les livres étant plein d'implicites, bien sur différents entre les pays (en France, l'âne têtu, le renard rusé, etc), les livres pour enfant occidentaux sont peu adaptés et compréhensible sans un adulte capable de décoder pour l'enfant, mais du fait du manque de littérature malienne pour enfant, il n'y a pas beaucoup d'alternative.
Donc envoyer un livre inadapté, bof bof. Et puis du coup, la mention "lecture" comme matière préféré m'a semblé louche (mais bon, je dois psychoter).
Bref j'ai l'impression que c'est insoluble, et que ce que l'on nous affirme comme bien pour l'enfant "une ouverture sur une autre culture", etc risque en fait de faire plus de mal que de bien. Déjà, les courriers feront une différence avec les autres enfants non parrainés. Je ne parle même pas des cadeaux. Mais si je n'en fais pas, pour limiter cette jalousie potentielle, cela fera du coup une différence avec des enfants nantis de parrains plus "généreux" que moi. Donc des deux côtés cela peut créer des difficultés supplémentaires pour cette enfant, ce qui est juste à l'opposé de l'objectif.
Forcément, depuis, je creuse la question sur ces parrainages d'enfant (les différents types), ce qui m'a amené aux questions sur les ONG (les grosses, les moyennes, les petites), avec en particulier la lecture d'un mémoire d'un étudiant en sciences politiques sur les petites et moyennes ONG que j'ai trouvé très pertinent et très glaçant sur la (in)capacité des petites et moyennes ONG a réellement améliorer la situation de manière pérenne. Il ne s'est pas penché sur les grosses. Et puis cela m'a littéralement confronté à mon ignorance de la question et à l’extrême prétention que j'avais eu de penser pouvoir aider, même modestement. J'ai découvert des théories économistes et livres (micro-macro, Le fardeau de l'homme blanc : L'échec des politiques occidentales d'aide aux pays pauvres, de William Easterly, etc), l'effet "moustiquaire", l'effet secondaire de l'aide humanitaire fournie gratuitement à Haïti (avec du coup, la mise au chômage et le départ des médecin haïtiens face à des soins prodigués gratuitement par les ONG, la flambée des prix des constructions, inaccessibles aux non ONG, etc). L'impression qu'un voile se déchirait devant mes yeux.
Au final, je regrette de ne pas avoir plus creusé tout ça avant de parrainer, je ne l'aurais probablement pas fait.
Cela fait des semaines que je suis jours et nuits (au sens littéraire) sur internet à creuser tout ça, ça tourne à l'obsession, j'en sors épuisée et désemparée. Et comme par hasard j'ai "le soleil noir" de Barbara non stop en tête
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J'aurais aimé avoir vos avis sur cette question de l'aide humanitaire, votre expérience, vos connaissances d'économistes, de sociologues...
Merci.
Bonne soirée,
BL
ps : j'ai du mettre 1h à rédiger ce post, et plus de 20 min à me demander si je n'allais pas tout simplement l'effacer, alors si les modérateurs souhaitent le supprimer car un peu à la limite des règles du forum, je comprendrais très bien !