Je m'explique : j'ai découvert personnellement la poésie il y a très peu de temps, ou plutôt redécouvert, ou découvert différemment. Je me plais à dire que j'ai eu une adolescence très baudelairienne (pas tellement pour le haschisch, plutôt pour le spleen), mais depuis, la poésie ne s'était plus vraiment trouvée sur mon chemin. Je me rappelle par exemple qu'au lycée, la prof de français nous avait bien expliqué les différents types de vers et les schémas de rimes, avec consigne de produire quelque chose en choisissant une de ces formes. Mais je comprends maintenant qu'à aucun moment elle ne nous a parlé de l'essence de la poésie. Rien de vivant là-dedans. Un peu comme le M. Prichard que déteste tant M. Keating du Cercle des Poètes Disparus...
Jusqu'à ce que je découvre Christian Bobin. Là aussi, il m'a fallu du temps (la poésie avance parfois masquée, vous ne trouvez pas ?), je n'ai compris que très récemment à quel point son écriture était poétique, même si elle est en prose.
Au fil de ce chemin, je n'ai jamais vraiment pu parler de ces lectures avec d'autres et ce n'est que très récemment que j'ai senti à quel point ça m'avait manqué. C'était en parlant de Bobin, en vrai, avec un membre de par ici (s'il se reconnait, je le laisse évoquer cette brève discussion). D'où l'idée de relancer le sujet sur le forum.
Je ne cherche pas à concurrencer le sujet de ZebrOurs "Des bribes de poésie" parce qu'ici je souhaite inviter la parole *sur* la poésie. Bien sûr, on peut citer des poèmes (ou mieux, qu'en dites-vous ? faire le lien avec les bribes du sujet voisin), dans le but d'illustrer ses propos. Mais l'idée, c'est surtout d'évoquer en quoi la poésie nous touche, en quoi elle nous nourrit, ou, pourquoi pas, en quoi elle nous repousse.
De cette fameuse discussion avec cet ASien, j'ai gardé la sensation que la poésie nous ouvre un espace de relation à l'autre qui va au-delà des mots, qui passe davantage par la sensation, par le flou des images évoquées, par quelque chose d'à peine tangible qui se sert du langage mais qui le transcende pour nous toucher à un niveau bien au-dessus ou bien en-dessous du langage. Et que c'est peut-être pour ça que les images poétiques paraissent parfois contradictoires : parce qu'elles nous convient (du verbe convier) en un lieu au carrefour de toutes les contradictions, où tout est sens dessus dessous, où on voit l'envers des choses comme si c'était l'endroit, et vice-versa.
Et vous ? Comment recevez-vous, comment vivez-vous la poésie ?