libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

l'Humanité, L'Existence, la Métaphysique, la Guerre, la Religion, le Bien, le Mal, la Morale, le Monde, l'Etre, le Non-Etre... Pourquoi, Comment, Qui, Que, Quoi, Dont, Où...?
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Euthyphron
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Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par Euthyphron »

l3lack0ut a écrit : Il y a quelque temps, j'ai pu voir un reportage scientifique sur la création de l'univers avec le big bang et tout ça. Et ils avaient imagé, qu'à sa création, il y avait aussi une sorte de base de données qui intégrait toute l'évolution de cette univers. Comme une sorte de DvD qui comporterait un film. Et, de la même manière qu'on regarde un film, tout évolue selon ce DvD.
C'était juste pour donner une autre explication qu'un dieu omniscient...
Est-ce vraiment une autre explication, ou bien un nouvel avatar du dieu omniscient, peut-être sous la forme d'un être sans intention?
Ton idée me fait penser qu'il faudrait faire la liste des versions différentes du savoir absolu.Mais on est bien d'accord, n'est-ce pas, pour dire que ce n'est qu'une image, qui nous renseigne sur l'imagination humaine, mais ne nous dit pas ce qui s'est effectivement passé?
Est-ce que dans ce reportage était posée la question toute bête peut-être mais un peu inévitable, je trouve, de savoir d'où provenait cette base de données?
l3lack0ut a écrit :En ce qui concerne Nietze, je ne dirais pas que l'homme a créé le libre-arbitre pour responsabilisé l'individu. (Quoi que Sarte l'ait peut-être fait en ce sens) Mais plutôt que la liberté a toujours été perçue comme une vérité... Et que les hommes ont agi en conséquence. Cependant, il faudrait peut-être réactualiser nos connaissances pour s'y conformer...
Je pense que nous sommes d'accord, si je t'ai bien compris. Je me permets d'ajouter un jugement très personnel, c'est que pour moi Nietzsche devient intéressant à condition de ne pas le prendre au sérieux. Le texte ci-dessus est magnifique dans l'art de dénoncer, et cela correspond certainement à une réalité vécue par ceux qui ont subi l'influence de la religion dans leur éducation(cela a été mon cas et j'ai l'impression de comprendre ce que veut dire Nietzsche). Mais c'est évidemment très partiel. C'est la description incomplète d'une perversion répandue surtout chez les prêtres, mais cela ne prouve rien quant à notre sujet, voilà comment je résumerai de manière un peu irrespectueuse je le reconnais le texte de Nietzsche.
l3lack0ut a écrit :Mais si on devait reprendre les paroles d'un spécialiste en ce domaine, Henri Laborit, lui, dit que la liberté n'existe pas... (cf: l'éloge de la fuite)
Je ne l'ai jamais lu, mais je sais qu'il est déterministe. Il faudrait voir de plus près. Quelle idée se fait-il de la liberté? Quelle est son argumentation?
l3lack0ut a écrit :Je ne sais pas si on considèrera mon intervention, mais j'ai l'impression que les précédentes ont été ignorées...
Laisser sans réponse ne veut pas dire ignorer, et la discussion n'est pas finie.
Cependant je peux te dire pourquoi moi (je ne peux évidemment parler à la place des autres)je n'ai pas répondu à certaines de tes interventions. La première raison est que tu tortures fréquemment la langue française, et l'orthographe, de telle sorte que bien souvent je ne comprends pas ce que tu veux dire. La seconde est que tu procèdes très souvent par des allusions en elles-mêmes intéressantes, mais qui brouillent le message, car on ne voit ni le rapport direct avec la discussion en son état, ni ce que tu mets sous l'allusion. Par exemple, quand j'ai résumé à la demande de Conrbern ce que dit Kant sur le libre arbitre tu as réagi par rapport à la religion dont il n'était absolument pas question. Ici, tu fais une allusion à Sartre (ce n'est pas grave, car elle est très courte), mais il est impossible de deviner ce que tu mets derrière, même si on devine que ça a de bonnes chances d'être intéressant.
Mais il faut s'efforcer de ne pas trop mettre d'amour-propre dans ces conversations. C'est beaucoup plus pour moi que pour toi que je dis cela, car je m'expose, et c'est toujours très douloureux soit d'avoir été incompris, soit d'avoir été pris en flagrant délit de quelque défaut que ce soit. J'espère que tu comprends bien que tu n'es pas boycotté! Je suis ravi au contraire que toi et les autres nourrissiez ainsi la discussion.

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Message par l3lack0ut »

Euthyphron a écrit :La première raison est que tu tortures fréquemment la langue française, et l'orthographe, de telle sorte que bien souvent je ne comprends pas ce que tu veux dire.
Mea culpa. :'( Je fais vraiment du mieux que je peux. Mais le français est pour moi synonyme de torture et ce depuis tout petit. (l'école m'a laissé des séquelles difficiles à extraire) :shake:
Euthyphron a écrit :Je ne l'ai jamais lu, mais je sais qu'il est déterministe. Il faudrait voir de plus près. Quelle idée se fait-il de la liberté? Quelle est son argumentation?
Alors, malheureusement, il ne donne pas une explication sur le fonctionnement cérébrale pour justifier sa conclusion. (s'il l'avait fait, on n'aurait non pas un livre de 100 pages, mais un tome de 2000 page probablement...) Il dit, en gros, qu'a aucun moment de sa vie, il n'aurait pu faire d'autres choix que ceux qui l'a fait...

Edit: Je veux juste rajouter en langage mathématique et schématique ce que j'ai déjà dit avant.

Il faut imaginer la ligne du temps, qu'on peut se représenter comme une droite. Sur cette droite, il y a, le point "0" qui est l'origine, le point A qui se situe au milieu et le point B qu'on pose à la fin.

Au point A, l'individu va faire un choix avec tous les éléments qu'il a en sa possession entre le point 0 et A.

Au point B, l'individu remet en cause son choix, et va ajouter comme éléments tout ce qui se trouve entre le point A et B.

Donc au point B, l'individu estime qu'il aurait pu faire un autre choix, car il utilise les éléments entre 0 et B. Or quand il a fait son choix au moment A, le segment "AB" n'existe pas ou plutôt, il ne le connait pas encore... Il aurait fallu que l'individu ait pu faire un autre choix avec les éléments du segment "0" et "A".

Voila :) Ai-je été plus clair? :-)

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Euthyphron
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Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par Euthyphron »

Eh bien oui je trouve que c'est plus clair! :pharaon:
Si j'essaie de le formuler plus concrètement, il me semble que ce que tu as en vue est une illusion du libre arbitre qui a trait aux regrets et aux remords. Vingt ans après on se dit : pourquoi n'ai-je pas étudié le droit et la finance? pourquoi suis-je allé m'enterrer ici?
C'est une illusion parce qu'effectivement, comme tu le dis, on ferait un autre choix parce qu'on dispose d'autres éléments. Il n'est donc pas certain qu'on aurait pu faire un autre choix au moment où il a été fait. Lorsque on se ressouvient du passé en pensant à ce qui aurait pu le modifier on s'imagine tel que l'on est aujourd'hui. Mais on change. Et donc, nous n'avons aucun accès direct au passé, seulement des souvenirs et des traces.
Mais qu'est-ce que cela prouve quant au libre arbitre? Je reprends ta manière de t'exprimer. Oublions B. Que B ait des regrets ou pas importe peu. En A, X, l'individu (tous les individus s'appellent X) à supposer qu'il fasse un choix, est conscient qu'il pourrait en faire un autre, même s'il estime, peut-être à raison, que cet autre choix serait idiot ou néfaste. Pas besoin d'attendre d'être en B pour estimer que le choix implique la pluralité des options.
Remarquons qu'il y a trois manières très différentes (et non une seule) de "ne pas pouvoir faire un autre choix".
1) je ne peux pas faire un autre choix parce que je suis contraint, j'ai le couteau sous la gorge.
2) je ne peux pas faire un autre choix parce qu'en réalité ce n'est pas un choix, je suis déterminé, et qui connaîtrait dans son intégralité l'état de mon corps pourrait déduire ce que je vais faire.
3) je ne peux pas faire un autre choix parce que le choix que je fais librement est à l'évidence le meilleur.
Le premier et le dernier cas ne sont absolument pas incompatibles avec le libre arbitre, seul le deuxième l'est.

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Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par l3lack0ut »

Euthyphron a écrit :Remarquons qu'il y a trois manières très différentes (et non une seule) de "ne pas pouvoir faire un autre choix".
1) je ne peux pas faire un autre choix parce que je suis contraint, j'ai le couteau sous la gorge.
2) je ne peux pas faire un autre choix parce qu'en réalité ce n'est pas un choix, je suis déterminé, et qui connaîtrait dans son intégralité l'état de mon corps pourrait déduire ce que je vais faire.
3) je ne peux pas faire un autre choix parce que le choix que je fais librement est à l'évidence le meilleur.
Le premier et le dernier cas ne sont absolument pas incompatibles avec le libre arbitre, seul le deuxième l'est.
Dans tous les cas que tu cites, il semblerait qu'il y ait une constante. Celle que le choix s'impose à lui-même. Dans le 1er cas, ce serait pour survivre. Dans le 2ème ça sous-entendrait que tout est logique et donc la réponse à nouveau s'impose. Et dans le 3ème cas la réponse à nouveau s'impose à elle-même car il semblerait que ce soit la meilleure. Ce qui est aussi le cas du 1er exemple.

Autrement dit, toutes ces formes de décisions répondent à une logique. Et si tout est logique, alors on peut déterminer ce qui va se passer.

Or, je me pose 2 questions qui expliqueraient l'existence du libre-arbitre grâce à ce que tu as dit.

La 1ere, c'est la conscience. Pourquoi aurions-nous conscience de la réalité si tout était déterminé ? Et d’où nous vient cette conscience ?

La 2ème, ça serait un paradoxe. C'est à dire qu'à travers toute la logique qui pourrait nous déterminer, il existerait quelque chose d'illogique.

Et là, à froid, je me demande si la 2ème question ne répondrait pas à la première. :rofl:

Et si la conscience n'était que le fruit d'un paradoxe ? C'est-à-dire qu'elle serait "née" du contraste entre les informations qu'on traite "volontairement" et celles qui se traiteraient automatiquement. Enfin... Ce n'est qu'une hypothèse hein ^^.

Mais bon, en admettant qu'il faille un paradoxe pour sortir de la logique et donc remettre en cause le déterminisme. Je me demande si l'univers n'exploserait pas à cause de ce paradoxe. Autrement dit, que le paradoxe en question empêcherait la stabilité de l'univers :D

Et aussi, est-ce que la conscience justifie le libre-arbitre ? Autrement dit, est-ce parce que nous sommes conscient de quelques aspects de la vérité, que l'on définira comme étant la réalité, signifierait au nom de notre ignorance l’existence d'un libre-arbitre ?

Parallèlement et je le vois venir gros comme un camion. En admettant que la conscience serait justement un paradoxe né du traitement de l'information paradoxal entre le "conscient" et le "subconscient" alors comme je l'ai dit avant, ce paradoxe devrait faire exploser l'univers. :D Mais je ne vois pas comment la conscience pourrait influencer les lois universelles. Peut-être que cette conscience nous propulse à un autre niveau de dimension. :D

Pardonnez moi si je suis un peu sorti du sujet, je ne faisais que suivre la logique de mes propos pour voir ou ça me mènerait... :rofl:

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Ucralo
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Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par Ucralo »

Euthyphron a écrit :Remarquons qu'il y a trois manières très différentes (et non une seule) de "ne pas pouvoir faire un autre choix".
1) je ne peux pas faire un autre choix parce que je suis contraint, j'ai le couteau sous la gorge.
2) je ne peux pas faire un autre choix parce qu'en réalité ce n'est pas un choix, je suis déterminé, et qui connaîtrait dans son intégralité l'état de mon corps pourrait déduire ce que je vais faire.
3) je ne peux pas faire un autre choix parce que le choix que je fais librement est à l'évidence le meilleur.
Le premier et le dernier cas ne sont absolument pas incompatibles avec le libre arbitre, seul le deuxième l'est.
Soit une personne qui effectue un certain choix et dont le corps (matériel) est dans un certain état au moment du choix.
Soit la proposition : "Pour chaque état du corps, il n'existe qu'un seul choix possible."
Autrement dit, si le choix avait été différent, alors l'état du corps aurait forcément été différent.

Si j'ai bien compris, si cette proposition est toujours vraie, alors le libre arbitre n'existe pas.

Euthyphron, quelle est ta position sur l'hypothèse selon laquelle cette proposition serait toujours vraie ? Penses-tu :
A) Que cette hypothèse est peut-être fausse ?
B) Que cette hypothèse est probablement fausse ?
C) Que cette hypothèse est certainement fausse ?

Si tu choisis B ou C, alors quels sont tes arguments actuellement ?
Nous allons sûrement répéter des arguments que nous avons déjà énoncés avant. Mais, cette fois-ci, ce sera sur un énoncé qui, je pense, sera moins ambigu.
l3lack0ut a écrit :Pourquoi aurions-nous conscience de la réalité si tout était déterminé ? Et d’où nous vient cette conscience ?
Même dans le cas où il existerait des choses indéterminées, ce problème existerait toujours :
Pourquoi aurions-nous conscience de la réalité ? Et d’où nous vient cette conscience ?
Du coup, ce n'est pas un argument contre le déterminisme.

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Euthyphron
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Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par Euthyphron »

Tu me donnes du fil à retordre et je risque la migraine! :vgeek: Mais c'est tant mieux, donc j'y retourne. :-)
Ma position sur la question "Pour chaque état du corps il existe un seul choix possible" (prop.1) est que je ne la comprends pas, et qu'il faut l'élucider. Je la prends pour une reformulation pure et simple du déterminisme, qui charrie ses obscurités.
Elle n'a pas le même sens du tout, telle que je l'entends, que la seconde proposition : "si le choix avait été différent, l'état du corps aurait été différent" (prop.2) . Je peux plus facilement me prononcer sur celle-ci.
Je trouve l'expression "état du corps" trompeuse, car le corps change sans cesse. Et il ne change pas en passant par un saut d'un état à un autre puis à un suivant, mais il change de façon continue.
Cette réserve faite, je suis d'accord avec 2. Il n'y a en effet pas deux états du corps identiques. Le simple fait de choisir, ou même d'agir spontanément, modifie l'état du corps. Je choisis, par exemple, un kilo de navets, et cela se voit même si on ne m'entend pas, mon bras se dirige dans la direction des navets, je prends un ton de voix assuré et satisfait, je laisse même entendre, par je ne sais quelle attitude corporelle, que ce sera tout. Si j'avais renoncé au navet l'état de mon corps aurait certes été bien différent.
Mais cela n'engage à rien concernant 1. Tel que je comprends 1, cela voudrait dire que à l'instant t, quiconque saurait tout de mon corps saurait ce que je vais dire, penser ou faire, avant moi. Je trouve cela certainement faux, pour répondre précisément à ta question précise.
Bien sûr, comme toute fiction, on peut décider d'y croire, surtout si l'on a l'impression que cela rend des services. Mais il me semble que c'est dénier le réel. Car je ne suis pas d'accord avec ce que tu réponds à l3lack0out. Il pose, à juste titre, la question de la conscience. Je modifie légèrement sa question : comment peut-on penser la conscience de soi dans un cadre déterministe? Elle est de trop, si l'hypothèse déterministe est vraie. Pas seulement parce qu'elle est inutile, voire nuisible (penser c'est se tromper, errare humanum est), mais aussi parce que décrire la conscience en termes déterministes c'est décrire un processus qui ne peut pas porter son attention sur ceci ou cela, qui ne peut pas revenir sur soi-même, ses propres sentiments et ses propres pensées, donc qui n'est pas une conscience.

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Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par Ucralo »

C'est vrai qu'il y a des problèmes d'ambiguïté avec la temporalité. On parle de l'état du corps, mais de l'état du corps à quel moment ? Je vais essayer de construire un problème plus précis.

Admettons que, à un certain instant X, quelqu'un hésite entre plusieurs choix. Il n'a pas encore choisi. Son corps est dans un certain état. Très peu de temps après, à un instant Y, il a fini de choisir. Son choix est fait.

Entre les instants X et Y, cette personne perçoit des informations du monde extérieure : elle voit, elle entend, etc. Ça peut avoir une influence sur le choix.

Soit la proposition : "Pour un état du corps donné à l'instant X, et pour un monde extérieur donné entre les instants X et Y, alors, à l'instant Y, si le choix est fait, il n'existe qu'un seul choix possible."
Autrement dit, pour un monde extérieur donné entre les instants X et Y, à l'instant Y, si le choix avait été différent ou n'avait pas encore été fait, alors l'état du corps à l'instant X aurait forcément été différent.

Est-ce que cette proposition est suffisamment précise, ou bien reste-il encore des ambiguïtés importantes pour le débat présent ?

Si cette proposition est toujours vraie, alors le libre arbitre n'existe pas.

Soit l'hypothèse selon laquelle cette proposition serait toujours vraie.

A partir de ce que tu as écrit, j'interprète que tu penses que cette hypothèse est certainement fausse.
Euthyphron a écrit :Je modifie légèrement sa question : comment peut-on penser la conscience de soi dans un cadre déterministe? Elle est de trop, si l'hypothèse déterministe est vraie. Pas seulement parce qu'elle est inutile, voire nuisible (penser c'est se tromper, errare humanum est), mais aussi parce que décrire la conscience en termes déterministes c'est décrire un processus qui ne peut pas porter son attention sur ceci ou cela, qui ne peut pas revenir sur soi-même, ses propres sentiments et ses propres pensées, donc qui n'est pas une conscience.
Je ne vois pas pourquoi le déterminisme empêcherait cela. Dans le cadre du déterminisme, nous sommes déterminés à porter notre attention sur ceci ou cela, à revenir sur nous-même, nos propres sentiments et nos propres pensées.

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Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par l3lack0ut »

Ucralo a écrit :Je ne vois pas pourquoi le déterminisme empêcherait cela. Dans le cadre du déterminisme, nous sommes déterminés à porter notre attention sur ceci ou cela, à revenir sur nous-même, nos propres sentiments et nos propres pensées.
Bah je suis d'accord avec toi, mais je me demande alors ce qu'elle fait là, la conscience. :-|

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Euthyphron
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Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par Euthyphron »

Cette fois j'avoue que je ne comprends plus rien, je crois que je préférais l'ancienne formulation. Et moi aussi j'aimerais savoir ce que la conscience fait là. :-|
La proposition "il n'existe qu'une possibilité" est une proposition que j'aurais tendance à juger universellement fausse, dès qu'elle concerne des existants (elle peut être vraie tant qu'elle concerne des abstractions pures, comme en mathématiques). A fortiori des vivants complexes. Un corps humain qui n'aurait qu'une possibilité d'agir, et cela à chaque instant? Pourquoi adopter une telle croyance, à quoi cela sert-il? :worried:

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Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par l3lack0ut »

Euthyphron a écrit :Un corps humain qui n'aurait qu'une possibilité d'agir, et cela à chaque instant? Pourquoi adopter une telle croyance, à quoi cela sert-il?
Bah fondamentalement... Il s’agit de "découvrir" la vérité. Et non pas de lui trouver une utilité, bien que si l'on considère l'être humain déterminé, il faudrait peut-être agir ce sur quoi l'on peut agir pour "améliorer" son comportement... Si tenté qu'on puisse se trouver des buts communs. :rofl:
Euthyphron a écrit :La proposition "il n'existe qu'une possibilité" est une proposition que j'aurais tendance à juger universellement fausse, dès qu'elle concerne des existants (elle peut être vraie tant qu'elle concerne des abstractions pures, comme en mathématiques)
Bah en soit les mathématiques sont un outil qu'utilisent toutes sciences. C'est la base. Et le corps humain est bien obligé de faire avec les lois universelles pour exister. Là ou ça ne correspond plus c'est de 1: l'existence de la conscience, de 2: croire qu'il n'est pas soumis à ses lois universelles.

Si on est soumis à ces lois universelles, on ne fera qu'agir en conséquence. Or, ces lois sont, théoriquement, explicables et on peut les mettre sous forme de formule mathématique, si tenter qu'on ait acquis le savoir pour le faire. Et donc tout serait logique. C'est pourquoi je parle de paradoxe pour étayer l'existence du libre-arbitre... Mais admettre un paradoxe dans les lois universelles revient à dire que l'univers pourrait exploser... Donc le paradoxe ne peut exister que dans l'esprit humain... Et ce serait donc ce paradoxe qui justifierait la conscience... Mais même si on n'agit pas toujours au mieux, on continue d'essayer d'être logique... Donc voilà. Je continue de croire qu'on est déterminé. Mais j'ignore pourquoi on aurait conscience de notre être et peut-être plus sans pour autant avoir un libre-arbitre.

Peut-être qu'on utilise mal cette conscience... Au lieu de l'utiliser pour essayer de croire qu'on existe, ce qui est paradoxal de remettre en cause son existence, on pourrait l'utiliser pour mieux vivre ensemble... Et c'est là, que le libre-arbitre arrive à grand coup de sabot pour dire qu'on fait les choix que l'on veut et que l'on est indépendant et faire comme si personne n'avait tort... Bref, je vais en perdre la tête. :drunk:

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Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par Ucralo »

l3lack0ut a écrit :mais je me demande alors ce qu'elle fait là, la conscience. :-|
Euthyphron a écrit :Et moi aussi j'aimerais savoir ce que la conscience fait là. :-|
Je me demande si on parle de la même chose derrière le mot "conscience". Avec le concept de conscience auquel je pense, que le monde soit déterministe ou bien qu'il existe de l'aléatoire, dans les deux cas, on peut se demander ce que la conscience fait là.

Je vois la conscience comme une entité immatérielle qui ressent des images, des sons, des sensations, des pensées.

Dans un monde déterministe, tout ce que l'on pense, tout ce que l'on ressent, est déterminé par notre cerveau qui lui-même est déterminé par le monde matériel qui l'inclut. Si on retire la conscience, le corps continue de fonctionner exactement de la même manière. Mais ce n'est plus qu'un automate. Je précise que je parle d'un automate qui imite parfaitement un être humain, pas d'un automate qui ne réagit pas à la menace, qui n'analyse pas son comportement passé ou je ne sais quoi. Aucune personne extérieure ne pourrait deviner que ce ne serait qu'un automate.

Dans un monde non déterministe, il y aurait de l'aléatoire. Si le libre-arbitre existe, alors certains choix seraient aléatoires. Si on retire la conscience, le corps continue de fonctionner exactement de la même manière. C'est un peu comme un automate, mais non déterministe. En gros, c'est une sorte de robot, mais dont les choix sont parfois aléatoire. De même, aucune personne extérieure ne peut voir que ce ne serait qu'un "automate non déterministe".

Dans les deux cas, on peut se demander : Qu'est-ce qu'elle fait là, la conscience ?

Mais peut-être que vous utilisez une définition différente de la conscience. Par exemple, peut-être que vous voyez la conscience comme une entité immatérielle qui pourrait forcément causer un choix, au lieu de simplement ressentir la pensée d'avoir choisi. Autrement, je ne vois pas en quoi le déterminisme poserait un problème.
Euthyphron a écrit :Un corps humain qui n'aurait qu'une possibilité d'agir, et cela à chaque instant? Pourquoi adopter une telle croyance, à quoi cela sert-il? :worried:
Personnellement, je ne pense pas qu'il faudrait exclure a priori la possibilité qu'il existerait de l'aléatoire dans notre univers. Mais je pense qu'il est utile de penser qu'il n'existe peut-être pas d'aléatoire dans notre univers. Parce que ça permet de chercher des modèles avec de meilleurs capacités prédictives et des les tester.

Il peut aussi y avoir des cas où on aurait raison d'adopter la "croyance" selon laquelle les comportements humains serait déterminés, pas parce qu'elle serait "utile", mais parce qu'elle serait l'hypothèse la plus probable. Par exemple, si jamais les neurologues arrivent à modéliser de manière déterministe le comportement des cellules du cerveau et que, après de nombreuses observations, le comportement de ces cellules ne s'écarte jamais du modèle, alors l'hypothèse la plus probable sera celle selon laquelle les comportements humains serait déterminés. C'est peut-être déjà le cas, mais je n'en sais rien. Je ne me suis pas assez renseigné sur les expériences réalisées en neurologie.

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arizona
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Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par arizona »

Eutyphron a dit :
Mais Dieu sait tout sinon il n'est pas Dieu. Donc, Dieu sait tout ce que je vais faire, même librement, et avant même que je sois, a déterminé pour moi ma destinée.

Si Dieu sait tout ce que je vais faire, parce que cela a déjà été fait. Si Dieu est hors du temps, et que ce que je vais faire à déjà été fait, je l'ai déjà fait, et que c'est dans ce sens-là que ce que je fais est déterminé. C'est alors moi-même et non pas Dieu, qui suis mon propre déterminisme, et mes actions ne sont déterminées que parce que je les ai déjà accomplies…

Le déterminisme ici n'est absolument plus lié au libre-arbitre, et la question n'est plus que de savoir à quel point j'ai conscience de moi-même et du monde. Ma liberté m'est rendue. Le déterminisme, en fait, n'existe plus. N'existe que le Temps, ( qui contient à l'intérieur de lui l'Espace), qui est un petit rigolo, et qui n'est pas cette belle ligne bien droite que l'on pensait.

Le libre-arbitre, ne pourrait-on dire que c'est comme une équation mathématique ? Si j'utilise l'équation : X+Y = Z, Z étant n'importe quel nombre, je vais en choisir un pour la clarté, Z= 2. Il existe une infinité de réponses, une infinité de X et de Y, certes, dépendant entre eux, l'un n'existant pas sans l'autre. Mais la possibilité de réponse est infinie. Ne pourrait-il pas en être de même avec notre libre-arbitre ? Oui, mon choix dépend du résultat, 2, mon choix dépend aussi de mon passé, des autres, X et Y, ( mais nous ne sommes pas des éléments sans passé, sans avenir, sans interactions avec d'autres êtres vivants, ou avec les choses ou avec des événements , pourquoi vouloir le nier ? ) mais néanmoins, je peux choisir parmi une infinité de réponses...Je peux aussi choisir d'utiliser la formule autrement, et de faire : X= 2-Y. Ou de faire : Y= 2-X.

Je peux penser que je n'ai pas de libre arbitre parce que X est conditionné par Y et Z. Mais je peux aussi penser que j'ai du libre-arbitre, parce que certains termes de l'équation sont de mon choix, et que quels que soient ces choix, l'équation sera toujours vraie. Je peux aussi penser que j'ai du libre-arbitre parce que je décide que c'est moi qui choisis Z. Et que ce Z, la réponse, le futur, ne m'est pas imposé. Seul mon passé, X, est imposé.
Si je raisonne ainsi, est-ce vraiment important pour moi de savoir si oui ou non, je comprends tout l'univers ? Que je peux tout voir et tout ressentir ? N'est pas vouloir se prendre pour Dieu, que de vouloir cela ? Et cela n'est-il pas une réflexion vaine ?

Il me semble que plus l'on se pense libre, et plus on l'est. Car se penser libre, ce n'est pas s'imaginer sans influences, mais c'est s'imaginer les regarder en face, les utiliser, les combattre, les comprendre. Et plus l'on se pense libre, moins on a peur de toutes ces choses qui sont autour de nous, de toutes ces choses qui arrivent sans crier gare, de tout ce qui nous a crée.
Se penser libre, c'est vouloir créer son libre-arbitre, tant que faire se peut. Et j'ai le sentiment que plus on l'utilise, plus on se rend compte qu'il existe.
Si nous n'étions pas d'ici, nous serions l'infini.
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Euthyphron
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Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par Euthyphron »

l3lack0ut a écrit :
Euthyphron a écrit :Un corps humain qui n'aurait qu'une possibilité d'agir, et cela à chaque instant? Pourquoi adopter une telle croyance, à quoi cela sert-il?
Bah fondamentalement... Il s’agit de "découvrir" la vérité.
Je suis totalement d'accord avec toi, si c'est vrai, tant pis si ça nous met le blues pendant quelques mois. Mais quand il s'agit d'une croyance et non d'une vérité qui s'imposerait à nous, cette fois je pense qu'on peut être pragmatique et demander ce qu'on gagne à la croire.
l3lack0ut a écrit :Si on est soumis à ces lois universelles, on ne fera qu'agir en conséquence. Or, ces lois sont, théoriquement, explicables et on peut les mettre sous forme de formule mathématique, si tenter qu'on ait acquis le savoir pour le faire. Et donc tout serait logique. C'est pourquoi je parle de paradoxe pour étayer l'existence du libre-arbitre... Mais admettre un paradoxe dans les lois universelles revient à dire que l'univers pourrait exploser... Donc le paradoxe ne peut exister que dans l'esprit humain... Et ce serait donc ce paradoxe qui justifierait la conscience... Mais même si on n'agit pas toujours au mieux, on continue d'essayer d'être logique... Donc voilà. Je continue de croire qu'on est déterminé. Mais j'ignore pourquoi on aurait conscience de notre être et peut-être plus sans pour autant avoir un libre-arbitre.
Je crois que je comprend mieux ce que tu essaies de nous dire depuis quelque temps, et la raison de tes hésitations. Mais pourquoi n'y aurait-il de logique que ce qui est toujours pareil? Pourquoi l'univers, qui en a vu d'autres, exploserait-il s'il contenait en lui des exceptions et des particularités? D'ailleurs il en contient, et pas qu'un peu!
ucralo a écrit :Je vois la conscience comme une entité immatérielle qui ressent des images, des sons, des sensations, des pensées.
Moi aussi. J'ajouterai cependant qu'elle n'est pas forcément passive, elle peut être active aussi. Il existe par exemple des efforts de réflexion.
ucralo a écrit :Dans un monde déterministe, tout ce que l'on pense, tout ce que l'on ressent, est déterminé par notre cerveau qui lui-même est déterminé par le monde matériel qui l'inclut. Si on retire la conscience, le corps continue de fonctionner exactement de la même manière. Mais ce n'est plus qu'un automate. Je précise que je parle d'un automate qui imite parfaitement un être humain, pas d'un automate qui ne réagit pas à la menace, qui n'analyse pas son comportement passé ou je ne sais quoi. Aucune personne extérieure ne pourrait deviner que ce ne serait qu'un automate.
Je me représente le déterminisme comme cela aussi. Spinoza définissait l'homme comme un automate spirituel. J'y ai mis en gras la phrase qui m'intéresse, car elle reproduit ce qui pour moi est un chef d'accusation contre le déterminisme; il dénie la conscience, puisque il pense qu'on comprend mieux en faisant comme si elle n'était pas là.
ucralo a écrit :Dans un monde non déterministe, il y aurait de l'aléatoire. Si le libre-arbitre existe, alors certains choix seraient aléatoires. Si on retire la conscience, le corps continue de fonctionner exactement de la même manière. C'est un peu comme un automate, mais non déterministe. En gros, c'est une sorte de robot, mais dont les choix sont parfois aléatoire. De même, aucune personne extérieure ne peut voir que ce ne serait qu'un "automate non déterministe".
Non, car le libre arbitre n'est pas de l'ordre de l'aléatoire, ils sont trois, avec le déterminisme, et non deux. Je m'en suis expliqué à la page 1, message du 17/10 à 13h41, passage en italique. Si l'on retire la conscience, il y a encore de l'aléatoire mais plus de libre arbitre.
En ce qui concerne la neurologie, je crois qu'en sciences comme ailleurs la pluralité des modèles est un bienfait. La fin du monopole du modèle déterministe est un heureux événement. Même si je ne suis pas très savant en sciences, je crois qu'on peut dire sans risque que c'est fait depuis un moment déjà.
arizona a écrit :Il me semble que plus l'on se pense libre, et plus on l'est. Car se penser libre, ce n'est pas s'imaginer sans influences, mais c'est s'imaginer les regarder en face, les utiliser, les combattre, les comprendre. Et plus l'on se pense libre, moins on a peur de toutes ces choses qui sont autour de nous, de toutes ces choses qui arrivent sans crier gare, de tout ce qui nous a crée.
Se penser libre, c'est vouloir créer son libre-arbitre, tant que faire se peut. Et j'ai le sentiment que plus on l'utilise, plus on se rend compte qu'il existe.
Il y a là une idée que je trouve très intéressante. A priori, puisque c'est en forgeant qu'on devient forgeron, ce que tu dis du libre arbitre on pourrait le dire de toutes les facultés. Plus on raisonne et mieux on raisonne, plus on marche et mieux on marche, etc. Mais il y a un plus ici : ce n'est pas seulement d'utiliser son libre arbitre qui nous fait progresser, c'est aussi le fait d'y penser, dis-tu, afin de vouloir se créer. Alors que si je pense à marcher cela ne fait pas mieux marcher ni perdre mon ventre. C'est que le libre arbitre est une invitation à s'améliorer. Si je crois que c'est moi qui décide, j'ai intérêt à bien décider, alors que si je pense que tout se décide en dehors de moi, à quoi bon?
Et si nous sommes plusieurs, libres, qui nous efforçons de nous créer et d'aider les autres à en faire autant le monde devient vivable.

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Ucralo
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Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par Ucralo »

Euthyphron a écrit :
ucralo a écrit :Je vois la conscience comme une entité immatérielle qui ressent des images, des sons, des sensations, des pensées.
Moi aussi. J'ajouterai cependant qu'elle n'est pas forcément passive, elle peut être active aussi. Il existe par exemple des efforts de réflexion.
ucralo a écrit :Dans un monde déterministe, tout ce que l'on pense, tout ce que l'on ressent, est déterminé par notre cerveau qui lui-même est déterminé par le monde matériel qui l'inclut. Si on retire la conscience, le corps continue de fonctionner exactement de la même manière. Mais ce n'est plus qu'un automate. Je précise que je parle d'un automate qui imite parfaitement un être humain, pas d'un automate qui ne réagit pas à la menace, qui n'analyse pas son comportement passé ou je ne sais quoi. Aucune personne extérieure ne pourrait deviner que ce ne serait qu'un automate.
Je me représente le déterminisme comme cela aussi. Spinoza définissait l'homme comme un automate spirituel. J'y ai mis en gras la phrase qui m'intéresse, car elle reproduit ce qui pour moi est un chef d'accusation contre le déterminisme; il dénie la conscience, puisque il pense qu'on comprend mieux en faisant comme si elle n'était pas là.
Admettons que le déterminisme soit vrai.

On pourrait imaginer un système déterministe avec des entités matérielles et immatérielles qui interagissent. Mais ce n'est pas de ce déterminisme dont je vais parler. Donc admettons aussi que ce qui est immatériel ne peut pas avoir d'effet causal sur le monde matériel.

[Question de vocabulaire : Est-ce que ce que je viens de décrire s'appelle "déterminisme matérialiste", ou bien est-ce que cette expression a déjà un autre usage ?]

Si on définit la conscience comme une entité immatérielle passive, alors la conscience est au bout de la chaîne causale. Le monde matériel détermine ce que ressent la conscience. Mais ce que ressent la conscience n'a pas d'effet causal sur le monde matériel.

Si on définit la conscience de telle sorte qu'elle est active, par exemple si on dit que la conscience ne fait pas que ressentir l'effort mais peut aussi faire un effort qui a un impact sur le monde matériel, alors la conscience est en partie matérielle.

Si on définit la conscience comme une entité immatérielle active, alors, en effet, la conscience n'existe pas.

Mais, en quoi cela dérange-t-il ? Pourquoi ce besoin de rendre immatériel ce qui est actif ? :-)
Euthyphron a écrit :
ucralo a écrit :Dans un monde non déterministe, il y aurait de l'aléatoire. Si le libre-arbitre existe, alors certains choix seraient aléatoires. Si on retire la conscience, le corps continue de fonctionner exactement de la même manière. C'est un peu comme un automate, mais non déterministe. En gros, c'est une sorte de robot, mais dont les choix sont parfois aléatoire. De même, aucune personne extérieure ne peut voir que ce ne serait qu'un "automate non déterministe".
Non, car le libre arbitre n'est pas de l'ordre de l'aléatoire, ils sont trois, avec le déterminisme, et non deux. Je m'en suis expliqué à la page 1, message du 17/10 à 13h41, passage en italique. Si l'on retire la conscience, il y a encore de l'aléatoire mais plus de libre arbitre.
Il peut y avoir de l'aléatoire sans libre arbitre. Nous sommes d'accord sur ce point.

Mais, s'il n'y a pas d'aléatoire, alors tout est déterminé, non ? Or, si le libre arbitre suppose que ce n'est pas tout qui est déterminé, alors le libre arbitre suppose qu'il existe de l'aléatoire, non ? Je ne comprends pas ton "Non".
Euthyphron a écrit :C'est que le libre arbitre est une invitation à s'améliorer. Si je crois que c'est moi qui décide, j'ai intérêt à bien décider, alors que si je pense que tout se décide en dehors de moi, à quoi bon?
"A quoi bon faire des efforts si tout est déterminé ?", c'est du fatalisme. Mais le déterminisme n'implique pas forcément le fatalisme. En effet, le déterminisme ne nie pas que, si on s'efforce de bien décider, alors on a plus de chance de mieux décider. Par contre, il dira que l'effort de bien décider est déterminé.

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Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par l3lack0ut »

Euthyphron a écrit : Se penser libre, c'est vouloir créer son libre-arbitre, tant que faire se peut. Et j'ai le sentiment que plus on l'utilise, plus on se rend compte qu'il existe.

Il y a là une idée que je trouve très intéressante. A priori, puisque c'est en forgeant qu'on devient forgeron, ce que tu dis du libre arbitre on pourrait le dire de toutes les facultés. Plus on raisonne et mieux on raisonne, plus on marche et mieux on marche, etc. Mais il y a un plus ici : ce n'est pas seulement d'utiliser son libre arbitre qui nous fait progresser, c'est aussi le fait d'y penser, dis-tu, afin de vouloir se créer. Alors que si je pense à marcher cela ne fait pas mieux marcher ni perdre mon ventre. C'est que le libre arbitre est une invitation à s'améliorer. Si je crois que c'est moi qui décide, j'ai intérêt à bien décider, alors que si je pense que tout se décide en dehors de moi, à quoi bon?
Et si nous sommes plusieurs, libres, qui nous efforçons de nous créer et d'aider les autres à en faire autant le monde devient vivable.
Sans vouloir être intolérant... Je vois là une absurdité fantastique. Se croire libre, c'est être libre dis-tu. Mais bon, si tu n'es pas libre, tu peux y croire sans que cela change la vérité, seulement ta perception. Même chose pour le libre-arbitre. Et c'est la même chose pour les religions. Ce n'est pas parce que l'on croit que dieu existe, qu'il va exister. Soit il existe, soit il n'existe pas. :1cache:

Le déterministe revient à dire que le futur existe sans que l'on puisse le changer. Et le libre-arbitre soit, il dit qu'il n'existe pas encore, soit, parce qu'on ne peut pas prouver que le futur existe déjà alors il y a le libre-arbitre.

Dans tous les cas, face à notre ignorance, on ne fait qu'affirmer quelque chose par rapport à ce qui nous arrange... Or, il est indéniable qu'il y a énormément d'aspects déterministes (si ce n'est pas que des aspects déterministes...) dans notre univers. Que la nature répond à ces lois pour exister et que nous sommes issus de la nature. Et pouf, parce que nous sommes des hommes, nous ne serions pas déterminés.

Je fais un parallèle un peu déplaisant... A l'époque on disait que les femmes n'avaient pas d'âme. On ne pouvait le prouver, mais c'était une affirmation qui impliquait que les femmes étaient très mal considérées et qui subissaient la souffrance qui allait avec... Et là, wouhou, on fait pareil avec le libre-arbitre.

Bon, prenons un gosse qui subit un traumatisme, et ce traumatisme va le poursuivre toute sa vie, comme si on lui avait coupé une jambe. (bien sur, il n'a rien choisi) Il est ou votre libre-arbitre ?

Moins graves maintenant... Mais s'il existait de nombreux micros traumatismes chez les individus et que même s'ils ne sont pas diagnostiqués comme traumatismes ni perçu comme tel, mais qui agissent ainsi, alors ces individus devront agir avec ces éléments et seront déterminés par ceux-ci. Or, si c'était un de ces micros traumatismes qui provoquaient une tuerie. C'est qui le responsable ? Celui qui causé le traumatisme ou celui qui vit avec ?

C'est simple, avec le libre-arbitre tout puissant, c'est le pauvre gars le responsable. Or dans les faits ce n'est pas vrai... Non seulement la justice humaine n'est qu'un simulacre, mais en plus, on fait croire à ces pauvres individus qu'ils en sont les responsables. Double injustice. Je dirais même triple, car le responsable s'en sort indemne...

M'enfin je n'ai fait que remettre en évidence ce que Nietze a déjà dénoncé semblerait-il...

Alors je vous demande, à quel autre utilité que l'injustice (responsabiliser l'innocent et déresponsabiliser le coupable), le libre-arbitre sert-il?

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Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par Ucralo »

@l3lack0ut : Tu réfutes la possibilité d'un libre arbitre qui serait tellement fort qu'il pourrait toujours annuler l'effet des influences sur les choix. Mais ce n'est pas de ce libre arbitre là dont parle Euthyphron.
Euthyphron a écrit :1 L'homme libre n'est absolument pas sans influence. Ce préjugé selon lequel être influencé supprimerait la liberté est sans doute plus répandu chez les partisans naïfs du libre arbitre que chez ceux du déterminisme. Mais il n'est pas moins absurde pour autant, cela va de soi. C'est évident : il est impossible d'être sans influence. C'est presque aussi évident : être libre, c'est mener sa vie en composant avec ses influences. Donc, postuler, ou prouver, que l'homme est influencé ne nie en rien le libre arbitre.
2 Influencer n'est pas déterminer. Les astrologues le savaient bien, qui justifiaient l'incertitude de leurs prédictions d'après le principe suivant lequel les astres inclinent (influencent, en français moderne), mais ne nécessitent pas. Si A détermine B, chaque fois que A se produit, B se produit aussi. Si A influence B, il arrivera néanmoins que A se produisant, B ne se produise pas. On peut évidemment vouloir changer le sens des mots, à condition cependant de bien prévenir et de maintenir la distinction entre les deux significations. Donc, montrer que X subit une influence n'implique absolument pas qu'il soit déterminé.
(lien)

l3lack0ut
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Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par l3lack0ut »

Hmm donc en gros, on néglige tout ce qui peut se passer dans le subconscient qui a mon avis influence énormément nos choix si ce n'est pas les déterminés car on agira en fonction de ce que ce subconscient nous offrira comme information pour sélectionner la meilleure option.

Ou est-ce que c'est aussi considéré dans la donnée? Mais je ne vois pas comment on pourrait influencer notre subconscient. :whew:

Mais bon, j'ai jamais dit que l'homme n'avait aucune influence, loin de là. Par contre, je remets grandement en cause son libre-arbitre.

Désolé, mais là je crois que je suis perdu par rapport à ce que tu m'as linké Ucralo. :sweat:

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Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par Euthyphron »

l3lack0ut a écrit : Se croire libre, c'est être libre dis-tu.
Mais non, pas du tout. Je suis même prêt à dire le contraire si tu le souhaites : se croire libre et être libre sont deux choses différentes.
Ucralo a écrit : Si on définit la conscience comme une entité immatérielle passive, alors la conscience est au bout de la chaîne causale.
Ce qui est contradictoire car la chaîne causale n'a pas de bouts. Pour lever la contradiction, le déterministe matérialiste est contraint de supprimer la conscience, c'est-à-dire de faire comme si elle n'existait pas.
Ucralo a écrit : Si on définit la conscience de telle sorte qu'elle est active, par exemple si on dit que la conscience ne fait pas que ressentir l'effort mais peut aussi faire un effort qui a un impact sur le monde matériel, alors la conscience est en partie matérielle.
En partie me gêne, parce que ce ne sont pas des parties, l'esprit pensant n'est pas un panaché. Mais je n'ai rien de satisfaisant à proposer. Il est cependant clair qu'il n'y a pas de conscience sans corps. C'est pourquoi d'ailleurs le mot "immatériel" ne fait pas partie de mon vocabulaire. J'ai accepté ta définition parce qu'il est clair que la conscience existe sans occuper d'espace ni avoir une masse, donc en ce sens elle est immatérielle. Mais cela ne veut pas dire qu'elle est coupée de la matière.
Ucralo a écrit : Mais, s'il n'y a pas d'aléatoire, alors tout est déterminé, non ? Or, si le libre arbitre suppose que ce n'est pas tout qui est déterminé, alors le libre arbitre suppose qu'il existe de l'aléatoire, non ? Je ne comprends pas ton "Non".
J'appelle aléatoire ce dont la prévisibilité est purement statistique. Je crois qu'il y a de l'aléatoire, je n'en ai pas la preuve.
Mais l'acte libre n'est pas du tout aléatoire. Il obéit à des raisons, et il peut même être facilement prévisible ("connaissant X, je savais qu'il viendrait", cette proposition affirme la prévisibilité du comportement libre de X).
On peut donc concevoir un monde où il y ait déterminisme des phénomènes, liberté des sujets pensants, et pas de place pour l'aléatoire. Ce n'est pas ce qui me séduit, mais c'est une possibilité.
Ucralo a écrit : "A quoi bon faire des efforts si tout est déterminé ?", c'est du fatalisme. Mais le déterminisme n'implique pas forcément le fatalisme. En effet, le déterminisme ne nie pas que, si on s'efforce de bien décider, alors on a plus de chance de mieux décider. Par contre, il dira que l'effort de bien décider est déterminé.
Je sais bien! Mais cela ne me convainc pas.
Distinguons les deux points de vue, celui d'un observateur du comportement d'autrui, et celui du sujet pensant et agissant, en les supposant tous deux déterministes.
Ce que je reproche au premier c'est justement d'avoir réponse à tout. Smoking, not smoking (je fais allusion à un double film d'Alain Resnais dont hélas je ne me souviens plus 8) ), tout est déterminé. X arrête de fumer. Un paquet traîne sur la table, la tentation est là. Smoking : il cède à la tentation. Notre observateur va dire que c'est parce qu'il est déterminé, et qu'on voit bien justement que c'est le corps qui commande. No smoking : il ne cède pas. C'est parce qu'il était déterminé à ne pas céder, dira le même. La preuve que le déterminisme est une simple croyance est là.
Voyons maintenant les choses du point de vue du sujet pensant, en le supposant déterministe. A, brillant théoricien, est donc déterministe. Forcément, cette croyance a des effets sur son comportement. Il se sent peut-être plus porté à la tolérance, il plaint ses ennemis au lieu de les haïr, il a peut-être gagné en sérénité, bref il n'a pas forcément perdu son temps en devenant déterministe.
Mais il y a une contrepartie. Il a tendance à devenir fataliste. Quand un effort est à produire, il sait (ou croit savoir) que s'il est déterminé à le produire ce sera fait, sinon ce ne sera pas fait. Or, il voudrait bien trouver en lui le courage de produire cet effort. C'est heureusement très possible, car en devenant déterministe A n'a pas perdu son libre arbitre. Mais il va lui falloir croire qu'il peut le faire, et s'il est cohérent, il ne le croira que s'il est déterminé à le croire, et nous voilà partis pour un vertige que A, j'en suis sûr, évitera en mettant son déterminisme en veilleuse le temps d'agir, comme tout le monde. C'est à cette condition qu'il échappera au fatalisme, si Dieu le veut :D !

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Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par arizona »

Bon, prenons un gosse qui subit un traumatisme, et ce traumatisme va le poursuivre toute sa vie, comme si on lui avait coupé une jambe. (bien sur, il n'a rien choisi) Il est ou votre libre-arbitre ?
Le libre arbitre ne se situe pas dans l'acte, dans le traumatisme, mais dans le comment il va vivre avec. Comment il va gérer ce traumatisme. N'est ce pas évident ? Et bien sûr, sa façon d'y répondre dépendra de tout un tas de choses. Mais néanmoins, sa part d'action, de choix, est grande. Tu donnes toute la part à l'inconscient. ( car on agira en fonction de ce que ce subconscient nous offrira comme information pour sélectionner la meilleure option. )

Cela ne te parait pas un peu trop ?
Si nous n'étions pas d'ici, nous serions l'infini.
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Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par Ucralo »

Euthyphron a écrit :
Ucralo a écrit : Si on définit la conscience comme une entité immatérielle passive, alors la conscience est au bout de la chaîne causale.
Ce qui est contradictoire car la chaîne causale n'a pas de bouts. Pour lever la contradiction, le déterministe matérialiste est contraint de supprimer la conscience, c'est-à-dire de faire comme si elle n'existait pas.
Le mot "chaîne" était incorrect. En fait, je pensais à un truc comme ça :

L'état de l'univers à un instant t détermine l'état de cet univers aux instants ultérieurs. A moins qu'il y ait un Big Crunch, quand on avance dans le temps, il n'y a pas d'instant final, donc pas de bout sur l'axe temporel.
L'état de l'univers à un instant t détermine ce que ressentent les consciences qui existent lors de cet instant t.

Si on fait une analogie en remplaçant le temps par la hauteur, alors c'est un peu comme si on avait un arbre infiniment haut avec, à chaque hauteur, plein de petites branches horizontale qui ont un bout.

Les états de la conscience seraient sur des bouts, dans le sens au bout de petites branches, mais ne seraient pas au bout, dans le sens au sommet de l'arbre.

Le déterministe matérialiste n'est pas contraint de couper les petites branches.
Euthyphron a écrit :
Ucralo a écrit : Mais, s'il n'y a pas d'aléatoire, alors tout est déterminé, non ? Or, si le libre arbitre suppose que ce n'est pas tout qui est déterminé, alors le libre arbitre suppose qu'il existe de l'aléatoire, non ? Je ne comprends pas ton "Non".
J'appelle aléatoire ce dont la prévisibilité est purement statistique. Je crois qu'il y a de l'aléatoire, je n'en ai pas la preuve.
Mais l'acte libre n'est pas du tout aléatoire. Il obéit à des raisons, et il peut même être facilement prévisible ("connaissant X, je savais qu'il viendrait", cette proposition affirme la prévisibilité du comportement libre de X).
On peut donc concevoir un monde où il y ait déterminisme des phénomènes, liberté des sujets pensants, et pas de place pour l'aléatoire. Ce n'est pas ce qui me séduit, mais c'est une possibilité.
Je n'arrive pas à comprendre en prenant en compte ceci :
Euthyphron a écrit :Remarquons qu'il y a trois manières très différentes (et non une seule) de "ne pas pouvoir faire un autre choix".
1) je ne peux pas faire un autre choix parce que je suis contraint, j'ai le couteau sous la gorge.
2) je ne peux pas faire un autre choix parce qu'en réalité ce n'est pas un choix, je suis déterminé, et qui connaîtrait dans son intégralité l'état de mon corps pourrait déduire ce que je vais faire.
3) je ne peux pas faire un autre choix parce que le choix que je fais librement est à l'évidence le meilleur.
Le premier et le dernier cas ne sont absolument pas incompatibles avec le libre arbitre, seul le deuxième l'est.
Si un acte est prévisible à 100%, alors il est forcément déterminé, non ? Or, tu dis que le libre arbitre suppose que l'acte n'est pas déterminé.
Euthyphron a écrit :Voyons maintenant les choses du point de vue du sujet pensant, en le supposant déterministe. A, brillant théoricien, est donc déterministe. Forcément, cette croyance a des effets sur son comportement. Il se sent peut-être plus porté à la tolérance, il plaint ses ennemis au lieu de les haïr, il a peut-être gagné en sérénité, bref il n'a pas forcément perdu son temps en devenant déterministe.
Mais il y a une contrepartie. Il a tendance à devenir fataliste. Quand un effort est à produire, il sait (ou croit savoir) que s'il est déterminé à le produire ce sera fait, sinon ce ne sera pas fait. Or, il voudrait bien trouver en lui le courage de produire cet effort.
Je pense que, si A se comporte ainsi, c'est qu'il ne croit pas assez au déterminisme matérialiste. :D

Je m'explique.

Je pense que, quelque part, en nous, nous avons tendance à croire au dualisme cartésien, avec :
-d'un côté l'âme, active et immatérielle, siège du moi, qui pense, effectue un effort, agit en étant responsable,
-de l'autre le corps, matériel, qui est commandé par l'âme, mais qui perturbe l'âme de temps en temps avec des pulsions.

Si on croit que le corps détermine les pensées, les choix, etc, tout en croyant à ce dualisme, alors on tombe sur des raisonnements dans lesquels :
-Personne n'est moralement responsable, ni des bonnes actions, ni des mauvaises. Car le moi ne peut rien faire : le corps commande tout.
-Les efforts n'ont pas d'effet. Le corps est entièrement déterminé par l'état de ce corps aux instants précédents.

Cependant, si on croit que le corps détermine les pensées, les choix, etc, alors, pour être cohérent, il faut casser ce dualisme-là.
Quand j'agis, c'est moi qui agit. Or, c'est mon cerveau matériel qui agit. Donc je suis en partie matériel. Je suis en partie mon corps matériel.
Quand je fait un effort, ça a des effets. Or, ce qui a un effet, ce n'est pas le ressenti conscient de l'effort, mais mon cerveau qui envoie des signaux. Donc, quand je fais un effort, je suis en partie matériel.
Parmi ce qui fait partie de moi, il y a à la fois une partie immatérielle passive qui reçoit des images, des sensations, etc, et une partie matérielle, support de mes motivations, goûts, efforts, etc.
En pratique, il y a certaines choses de mon corps que je peux avoir tendance à voir comme extérieurs au moi, par exemple certaines pulsions (Sartre dirait peut-être que je suis de mauvaise foi.), mais il y a une partie de mon corps que j'accepte comme étant moi.

Dans mon cas personnel, pour être plus précis, je ne sais pas si la matière est entièrement déterministe (à cause de la physique quantique), mais je pense que la matière commande aux pensées, aux choix, etc. Je crois que je peux me dire matérialiste.

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Euthyphron
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Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par Euthyphron »

Ucralo a écrit :Si un acte est prévisible à 100%, alors il est forcément déterminé, non ?
Non, pas s'il est libre! ;)
Un comportement déterminé peut être totalement imprévisible, si l'humanité est dans l'incapacité de connaître les déterminismes en cause. Je pense que tu es d'accord. Inversement, quand on dit qu'un acte est libre cela ne dit rien de sa prévisibilité, mais seulement que la simple connaissance, même, par impossible, exhaustive, de l'état du corps du sujet ne suffit pas à établir que l'acte sera accompli.
Quelqu'un qui me connaîtrait très bien prévoirait ce que je vais faire librement dans telle circonstance. C'est qu'il connaît mes raisons.
Prenons un exemple un peu idiot. X gagne le gros lot au loto de la vie, le truc (ou la personne) qui rend heureux, s'il le veut. Va-t-il accepter? Oui, sans aucun doute. Librement? Bien entendu, personne ne le force, et il a la possibilité de refuser, simplement a priori on ne voit pas pourquoi.
Imaginons en parallèle que les progrès de la médecine permettent de rendre heureuse toute personne disposant d'un corps humain, grâce à la piqûre magique, sans effets indésirables. Imaginons qu'un médecin décide de pratiquer cette piqûre contre la volonté de son patient. Le cas est-il le même? Non. Pourtant, le résultat est le même, et sa prévisibilité est approximativement la même (le risque de mauvaise réaction est au même degré d'improbabilité pour la piqûre que le risque d'un refus dans le premier cas).
C'est donc aller trop vite que d'associer, comme on l'a si souvent fait, la liberté à l'imprévisibilité. Bien sûr, le 100% n'existe pas. On s'en rapprochera sans doute davantage en physique ou en chimie. Mais le résidu n'est pas de l'aléatoire. Si l'expérience scientifique échoue par rapport aux prévisions, l'expérimentateur cherchera la cause de cet échec, si l'homme libre ne fait pas ce qu'on attendait de lui, on en cherchera la raison. Dans les deux cas il m'étonnerait qu'on attribue le comportement surprenant à de l'aléatoire.
Ucralo a écrit :Dans mon cas personnel, pour être plus précis, je ne sais pas si la matière est entièrement déterministe (à cause de la physique quantique), mais je pense que la matière commande aux pensées, aux choix, etc. Je crois que je peux me dire matérialiste.
Je trouve que tu as exprimé ta croyance de façon très claire. Si elle ne peut être la mienne (bien qu'elle le fut jadis), c'est d'une part à cause de tout ce qui est nié (la liberté, donc aussi la conscience comme activité, donc aussi la réflexion autonome) et d'autre part parce que je ne comprends pas le sens du mot "matière" ni le sens du mot "commander" dans la phrase de récapitulation "la matière commande aux pensées".
arizona a écrit :Le libre arbitre ne se situe pas dans l'acte, dans le traumatisme, mais dans le comment il va vivre avec. Comment il va gérer ce traumatisme. N'est ce pas évident ? Et bien sûr, sa façon d'y répondre dépendra de tout un tas de choses. Mais néanmoins, sa part d'action, de choix, est grande.
Je plussoie avec enthousiasme. :clap:

helix

Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par helix »

après réflexion, il me semble que le bipartisme entre matérialisme déterministe et libre-arbitre d'une conscience qui serait d'une essence immatérielle stérilise le débat.

La conscience est une création matérielle sélectionnée au fil des processus évolutifs (la chair a fait le verbe) et a semble-t-il, d'après les avancées des neurosciences et notamment la théorie de la sélection des groupes neuronaux, des composantes probabilistes liées à la conservation de valeurs biologiques internes favorables. Ce genre de fonctionnement probabiliste n'est possible que grâce à l'extraordinaire diversité des connexions neuronales, tant inter- qu'intra-cerveaux. (de la même façon que la sélection naturelle s'appuie sur celle des organismes)

Moi j'appellerais plutôt liberté cette diversité, qui permet le développement potentiel quasiment infini de notre imagination, ainsi que nos capacités de réparations.

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Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par Ucralo »

Euthyphron a écrit :Inversement, quand on dit qu'un acte est libre cela ne dit rien de sa prévisibilité, mais seulement que la simple connaissance, même, par impossible, exhaustive, de l'état du corps du sujet ne suffit pas à établir que l'acte sera accompli.
Quelqu'un qui me connaîtrait très bien prévoirait ce que je vais faire librement dans telle circonstance. C'est qu'il connaît mes raisons.
Prenons un exemple un peu idiot. X gagne le gros lot au loto de la vie, le truc (ou la personne) qui rend heureux, s'il le veut. Va-t-il accepter? Oui, sans aucun doute. Librement? Bien entendu, personne ne le force, et il a la possibilité de refuser, simplement a priori on ne voit pas pourquoi.
Voici ce que je comprends de ton exemple :
-Connaître entièrement l'état du corps de X ne permet pas de déduire qu'il va accepter.
-Connaître les "raisons" de X permet de déduire qu'il va accepter.
-Donc connaître entièrement l'état du corps de X ne permet pas de déduire les "raisons" de X.

L'exemple que tu décris, c'est ce que j'appellerais un acte déterminé, mais pas déterminé entièrement par l'état du corps.

Au fait, Euthyphron, comment te représentes-tu le cerveau ? Plus précisément, comment interviennent les "raisons" sur les actes, si ceux-ci ne sont pas déterminés par le cerveau ? Même question pour l'effort que tu attribuais à la conscience.
La seule possibilité qui me vient à l'esprit serait l'existence d'une âme qui agirait sur le cerveau. Alors, les lois physiques et chimiques ne marcheraient pas de la même manière dans le cerveau qu'en dehors.

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Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par Euthyphron »

Ucralo a écrit : Voici ce que je comprends de ton exemple :
-Connaître entièrement l'état du corps de X ne permet pas de déduire qu'il va accepter.
-Connaître les "raisons" de X permet de déduire qu'il va accepter.
-Donc connaître entièrement l'état du corps de X ne permet pas de déduire les "raisons" de X.
Cette reformulation me convient, à ceci près que je dirais "induire" et non "déduire", au moins pour la deuxième proposition.
Ucralo a écrit :L'exemple que tu décris, c'est ce que j'appellerais un acte déterminé, mais pas déterminé entièrement par l'état du corps.
Il y a donc autre chose que l'état du corps?
Ucralo a écrit :Au fait, Euthyphron, comment te représentes-tu le cerveau ? Plus précisément, comment interviennent les "raisons" sur les actes, si ceux-ci ne sont pas déterminés par le cerveau ? Même question pour l'effort que tu attribuais à la conscience.
La seule possibilité qui me vient à l'esprit serait l'existence d'une âme qui agirait sur le cerveau. Alors, les lois physiques et chimiques ne marcheraient pas de la même manière dans le cerveau qu'en dehors.
C'est évidemment une question difficile,dont je n'ai pas la réponse.
Je ne vois aucune image adéquate pour exprimer la relation entre le cerveau et la pensée. Ni l'image du piano dont on joue (car justement on n'utilise pas son cerveau, je veux dire qu'on ne le commande pas) ni l'image de l'ordinateur (car justement l'ordinateur n'est personne, il n'y a pas en lui d'esprit conscient de lui-même), pour prendre les deux exemples qui me viennent spontanément à l'esprit.
L'idée d'une âme qui agit sur le cerveau est étrange du point de vue des termes employés, elle est fausse si c'est une version de l'image du piano, mais elle a le mérite d'ouvrir une piste qu'intuitivement je trouve très intéressante, celle de l'interaction. J'aime assez en effet me représenter le cerveau comme une éponge, ou disons comme quelque chose qui se construit au contact du réel. Mais ce ne sont que fantaisies de mon imagination.

helix

Re: libre arbitre ou déterminisme? Sartre vs.Spinoza

Message par helix »

quelque chose qui se construit et se reconstruit au contact du réel en effet, et par la communication avec ses congénères.
Et le réel du cerveau c'est son fonctionnement biologique, il est passionnant d'y frotter son imaginaire en le frottant à celui des biologistes notamment, même (et surtout ?) pour un philosophe ;-)

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