Les rites de passage

l'Humanité, L'Existence, la Métaphysique, la Guerre, la Religion, le Bien, le Mal, la Morale, le Monde, l'Etre, le Non-Etre... Pourquoi, Comment, Qui, Que, Quoi, Dont, Où...?
Répondre
Avatar de l’utilisateur
Gail
Messages : 872
Inscription : ven. 14 juin 2019 23:08
Présentation : viewtopic.php?f=9&t=10205#p302753
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Localisation : Vendée
Âge : 41

Les rites de passage

Message par Gail »

J'avais partagé mon sentiment que notre société manque cruellement de rites de passage sur le fil "A vous qui avez passé le test: comment l'avez-vous vécu?"
Comme certains ont eu l'air intéressés, je développe un peu plus.

Je pense qu'en France, particulièrement, et dans de nombreuses sociétés occidentales, les rites de passage ont quasiment disparu, ce qui rend difficile de trouver sa place dans la société. J'imagine qu'aux USA, le bal de promo, le sweet sixteen, la remise des diplômes et le Spring Break, bien que très discutables, permettent d'avoir des comportements adolescents connus et reconnus par la société. Il y a un avant (l'enfance) et un après (l'âge adulte). A travers ma vision frenchy, j'imagine que ça peut aider à mieux trouver sa place, à se sentir un peu moins seule.

Mais peut-être faut-il commencer par développer ce qu'est un rite de passage. Je n'ai pas fait de revue de la littérature exhaustive, j'ai juste utilisé quelques articles disponibles en ligne pour planter le décor.

Définition des rites de passage
Source: Rites de passage et adolescence Jonathan Ahovi et Marie Rose Moro Dans Adolescence 2010/4 (n° 74), pages 861 à 871
https://www.cairn.info/revue-adolescenc ... ge-861.htm

"Ce sont « toutes les séquences cérémonielles qui accompagnent le passage d’une situation à une autre et d’un monde (cosmique ou social) à un autre ».(...) Selon A. Van Gennep, une cérémonie de passage obéit à un schéma constitué de trois moments : séparation, marge, agrégation."
Les rites de passage humains ont comme principal but, même et surtout dans les moments de séparation, d’assurer une union, une agrégation et non une exclusion.


Les rites de passage ont donc pour but de faciliter le passage d'un état à un autre en amplifiant la rupture avec l'état antérieur et l'appartenance au groupe de l'état suivant et en donnant le script de ce passage.

Exemples de rites de passage
- Rites exotiques
Source Global Citizen https://www.globalcitizen.org/fr/conten ... around-th/
Les Masaï: Les Maasai du Kenya et de la Tanzanie ont plusieurs rites de passage qui transportent les garçons à l'âge adulte. Les garçons âgés de 10 à 20 ans sont réunis pour être initiés comme nouveaux «guerriers » de la tribu, placés dans des dizaines de maisons construites pour l'occasion. La nuit avant la cérémonie, les garçons dorment dehors dans la forêt, et à l'aube, ils reviennent pour une journée de chant et de danse. Ils boivent un mélange d'alcool, de sang de vache et de lait, tout en consommant de grandes portions de viande. Après ces festivités, ils sont prêts à être circoncis, ce qui rend officielle leur transformation en homme, guerrier et protecteur. Comme dans d'autres rites de passage, les garçons ne peuvent pas flancher, car cela serait la honte pour leurs familles et montrerait leur manque de bravoure.
Pour les 10 prochaines années, les garçons vont rester au camp des guerriers où ils apprennent diverses compétences. Après la cérémonie marquant leur passage de guerrier à guerrier supérieur, ils ont droit d’épouser la femme de leur choix.


- Rites français du XIXe siècle
Source: Des rites de passage aux « premières fois ». Une expérimentation sans fins [article] Michel Bozon
Agora débats/jeunesses  Année 2002  28  pp. 22-33

La première communion, célébrée vers 12 ou 13 ans, avait une signification profane autant que religieuse. Elle constituait une ritualisation du passage à l'âge pubère, autrement dit de l'enfance à la jeunesse. Le jour de la communion, les filles, habillées de blanc, étaient comme de petites mariées, symbole très clair de la puberté. Quant aux garçons, ils se mettaient à porter des pantalons.

L'article cite aussi le service militaire pour les hommes et le mariage avec les transferts des biens, de la femme "de la maison de son père à celle de son époux" et l'initiation sexuelle de la femme.

Réflexions
Peu à peu, ces derniers rites de passage ont disparu. Avec 30% d'athées et d'agnostiques en France et avec une société volontairement laïque, les rites religieux sont quasiment rentrés dans la sphère privée.

Grossièrement, les rites de passage permettaient de dire: "nous sommes tous passés par là, vous y arriverez et vous serez des nôtres. "
Dans nos sociétés individualistes, ce serait plutôt : " on est tous passés par là, nous faites pas ch** avec vos états d'âme !" Naissance, deuil, adolescence, on est prié de gérer ça vite et bien, et en silence de préférence!

Le plus complexe autour de l'adolescence, ce sont ces injonctions contraires. L'alcool est à la fois encouragé et dénoncé. Les jeunes filles doivent devenir séduisantes, savoir se mettre en valeur, ne pas être "coincées" ou "sainte Nitouche" mais sont priées de ne pas avoir de vie sexuelle avant 17 ou 18 ans. Les jeunes hommes doivent être à l'aise, avoir confiance en eux et enchaîner les conquêtes...tout en étant sensible et respectueux envers la gente féminine.
Il me semble qu'un bon vieux rite de passage permettrait d'établir des repères, au moins pour ceux qui se posent trop de questions...

Dans ma petite vie toute simple, je pense n'avoir vécu qu'un seul rite de passage: la classe de dissection en 2ème année de médecine. Même si de nos jours, il y aurait moyen d'apprendre l'anatomie différemment et qu'il est difficile d'avoir des corps ( Ben oui, on ne peut plus simplement aller les voler la nuit dans les cimetières, comme au XIXe siècle), je pense que ce moment est important. On est coupé du monde, pour vivre une épreuve et, en sortant de là, on fait partie de cette communauté étrange qui côtoie la souffrance, la merde et la mort. A mon avis, ce sentiment d'appartenance aide à gérer le poids de ce qu'on peut vivre en tant que soignant.

De la même façon, les pompiers, les forces de l'ordre ont besoin de cette cohésion, de cette appartenance. C'était le rôle des bizutages, un rite de passage pour intégrer les nouvelles recrues. Malheureusement, les dérives ont jeté le doute sur tout le processus...

Alors faut-il réintroduire quelques rites de passage dans nos fonctionnements? Finalement, le problème ne vient il pas plutôt de la disparition du collectif au profit de l'individu ?

Malheureusement, on a pu voir qu'une agression extérieure est nécessaire et suffisante pour voir renaître une forme de patriotisme. Mais la mémoire du peuple est courte et les agressions des forces de l'ordre et des pompiers ont vite repris.
Ça embrouille mais c'est pas si bête, ça met des grelots dans la tête
Les Elles - Milo

Avatar de l’utilisateur
Napirisha
Messages : 4113
Inscription : lun. 22 juin 2015 12:15
Profil : Bilan +
Test : WAIS

Ancien Membre de l'équipe

Re: Les rites de passage

Message par Napirisha »

:? Je voulais répondre à ce sujet et j'attendais de prendre le temps pour le faire bien ... Et j'ai oublié. Alors que je faisais partie des gens qui ont dit que ce serait intéressant de créer ce sujet.... :1cache: je réponds donc un peu rapidement, avant d'oublier à nouveau...

On assiste en parallèle à ce délitement des rites traditionnels (communion, etc....) à une invention, voire un bidouillage de nouveaux rites sur mesure, en piochant où on veut. Des rites familiaux, amicaux, basés sur des rites préexistants, souvent d'origine religieuse, ou sur des influences culturelles (les films ou séries). Dans mon entourage, plusieurs couples se sont mariés à la mairie, mais avec une cérémonie laïque sur le lieu de la réception. Les obsèques laïques sont moins cadrées qu'une messe, mais des choses plus personnelles émergent. Des familles font appel à la mairie pour des baptêmes républicains qui n'ont pas d'autre valeur que symbolique.
Par ailleurs, des éléments plus anciens subsistent. J'ai l'impression que le bac, même s'il ne concerne pas l'ensemble d'une classe d'âge, est toujours considéré comme tel. Dans certaines régions, on fête encore les catherinettes, les conscrits se réunissent toujours, etc...

Quand au "bon vieux rite de passage", il ne vaut que si on y adhère... Quand on n'y trouve pas de sens, est ce qu'on ne se sent pas encore davantage isolé dans le groupe qui ne le remet pas en question ? C'est structurant, mais pas sans effets négatifs, j'imagine...
wonderbra de la recherche Google (c) Miss Souris

Avatar de l’utilisateur
Bulle d'o
Messages : 2754
Inscription : sam. 3 nov. 2018 01:10
Présentation : [url=https://adulte-surdoue.fr/viewtopic.php?f=9&t=9657] un bout de moi [/url]
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Localisation : bof
Âge : 45

Re: Les rites de passage

Message par Bulle d'o »

joli premier essai Gaïl! Hihi, je suis gênée et ravie de la méthode,à la fois, je la comprends :).

Oui sur la notion de rite de passage comme soutenant. Toutefois, ils renvoyaient à des sociétés souvent, je crois, basées sur des règles de co-dépendance qui se délitent dans nos sociétés individualistes (en opposition à société holiste). Est ce que le besoin d'agrégation a changé pour autant, certainement pas. Comme le souligne bien Napi, d’autres légers rites de passages sont reproduits mais il faut y redonner du sens. Sans sens, ils présenteraient aujourd'hui les traits d'un simulacre proche de la convention morale normative plutôt que celui du versant de l'acceptation de l'autre côté de la barrière.

Je viens d'une famille "clan", et l'on a des rites de rencontres mais notre grand-mère nous a tous fait un rite de passage de l'adolescence à l'âge adulte en nous confectionnant à chacun de ses 8 petits enfants : un coffre-trousseau. Et dans ce coffre qui fut à chacun notre premier meuble, il y avait tout un nécessaire de cuisine, de torchon, de premier draps, d'assiettes; de couverts, de verres.... pour notre premier appartement. Ma mère reproduira pour nos enfants ce même "rite familial". Ces rites-là, parce qu'ils sont reconnus même en micro-société (là, mon "clan") ont du sens, celui qui a été donné car nous y sommes TOUS passés. :)
"Je ne communique pas mes jugements, je ne suis pas un donneur de leçons, l'observation du monde ne suscite chez moi qu'un dialogue intérieur, un interminable dialogue avec moi-même."

Les désorientés (2012) de Amin Maalouf

Avatar de l’utilisateur
Bulle d'o
Messages : 2754
Inscription : sam. 3 nov. 2018 01:10
Présentation : [url=https://adulte-surdoue.fr/viewtopic.php?f=9&t=9657] un bout de moi [/url]
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Localisation : bof
Âge : 45

Re: Les rites de passage

Message par Bulle d'o »

https://halshs.archives-ouvertes.fr/hal ... 4/document

j'ai trouvé ce lien qui me semble intéressant traitant du sujet des "nouveaux rites de passage".
"Je ne communique pas mes jugements, je ne suis pas un donneur de leçons, l'observation du monde ne suscite chez moi qu'un dialogue intérieur, un interminable dialogue avec moi-même."

Les désorientés (2012) de Amin Maalouf

Avatar de l’utilisateur
madeleine
Ninja Traductor
Messages : 4310
Inscription : jeu. 9 janv. 2014 10:16
Présentation : http://adulte-surdoue.fr/presentations/ ... t4411.html
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Localisation : clermont-ferrand
Âge : 57

Ancien Membre de l'équipe

Re: Les rites de passage

Message par madeleine »

Je voudrais ajouter un avis personnel et non expert sur les rites de passage : je suis depuis longtemps frappée par la brutalité qui les accompagne, symbolique et/ou physique. Mais aussi par l'âge très précoce et à mes yeux forcé de cette mutation, qui permet dans certaines sociétés à des fillettes de se trouver mère à 13 ans.
L'évolution de notre société occidentale va vers moins de brutalité envers les enfants, moins d'arbitraire, moins d'injonction de genre.
Les rites familiaux comme celui que Bulle évoque sont désirables parce qu'ils valident avant tout le choix de l'individu à se revendiquer adulte en quittant le nid.
le chemin est long et la pente est rude, oui, mais le mieux, c'est le chemin, parce que l'arrivée, c'est la même pour tout le monde... Aooouuuh yeaah...
avec l'aimable autorisation de P.Kirool

Avatar de l’utilisateur
Laurène Bancale
Messages : 75
Inscription : mer. 20 févr. 2019 13:03
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Âge : 30

Re: Les rites de passage

Message par Laurène Bancale »

... ou, selon l'adolescent qui reçoit le fameux coffre, peut être vu comme une tentative d'ingérence insupportable de ses aînés dans sa future vie d'adulte.

J'ai le sentiment que, comme vous l'avez souligné, la force du rite de passage tient essentiellement au sens que l'individu qui "passe" met derrière.
Personnellement - mais sans doute étais-je une adolescente particulièrement maugréante :monkey: , je me suis (un peu) soignée depuis - je n'ai pas le souvenir d'avoir accueilli une seule manifestation symbolique collective avec autre-chose que du dédain.

Sinon, je pense que le service militaire était aussi un rite de passage important en France. Il avait en outre l'intérêt de mettre en contact toutes les classes sociales. A l'heure où, avec le télescopage de l'offre audiovisuelle qui permet à chacun de regarder ce qu'il veut quand il veut parmi 10 000 choix et de bien s'enfermer dans sa bulle sociale, on ne peut même plus mobiliser ce qui constituait à une époque le référent commun quasi-absolu, à savoir "t'as vu ce qu'il y avait à la télé hier soir ?", ça laisse presque rêveur.
Gail a écrit :Finalement, le problème ne vient il pas plutôt de la disparition du collectif au profit de l'individu ?
Je pense que, au-delà de la question des rites de passage, la question est bien là.

Après, je ne sais pas si c'est un "problème" ; disons que c'est une mutation de la société qui présente ses avantages et ses inconvénients.

Avatar de l’utilisateur
Swinn
Messages : 2202
Inscription : lun. 24 sept. 2018 21:13
Présentation : [url=https://adulte-surdoue.fr/viewtopic.php?f=9&p=279551#p279551]Tel Monsieur Jourdain...[/url]
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Âge : 58

Re: Les rites de passage

Message par Swinn »

Il y avait en France un rite de passage commun à l'ensemble de la moitié de la population du pays,le service militaire, qui était perçu le passage de la vie d'enfant à la vie d'homme avec pour beaucoup, des "micros-rites" la première cigarette, le crapahutage dans la gadoue, la corvée de chiotte,s la première cuite et parfois le dépucelage avec le premier passage au bordel. Toute choses faisant qu'un adolescent (les jeunes n'existaient pas alors il y a 30 ans) "s'endurcissait" et gagnait leur galon d'homme.
Rite de passage qui permettait de se présenter à un autre rite de passage, puisqu'on était un homme on pouvait se marier.
Quoique l'on pense de la chose militaire, la charge symbolique de ce rite était très importante, à tel point que le service a été sous une forme plus simple et plus légère et surtout mixte, réhabilitée par l'actuel gouvernement.
Il me semble que tout groupe ou toute société a ses propres rites de passage qu'ils soient formalisés selon des rituels bien précis et formalisés, dans le cadre de sociétés traditionnelles ou de groupes totalement informels. Ils'agit d'une cooptation, d'une reconnaissance de pair à se regroupant autour de valeurs communes et d'un code symbolique commun à caractère secret et sacré.
Plus le rite de passage est difficile, plus le groupe qu'il permet d'intégrer aura une structure fermée et solide et permet un entre-soi basé (en principe) sur l’entraide la solidarité et la protection. En protégeant le groupe on protège chacun et en protégeant chacun on protège le groupe lui même.
Un groupe qui perd la notion de la symbolique de son intégration finit par perdre sa cohésion, et là où il y avait des comportement collectifs, se trouvent à l'opposé des comportement des plus en plus individualistes qui peuvent conduire à la déliquescence voir la disparition de celui-ci.

[edit] [mention]Laurène Bancale[/mention] tu as parlé du service militaire pendant que j'écrivais mon post, le mien fait un peu doublon mais je le laisse tel quel e, apportant je l’espère un autre éclairage.
"Nous sommes tous des farceurs : nous survivons à nos problèmes"
Cioran

Avatar de l’utilisateur
Gail
Messages : 872
Inscription : ven. 14 juin 2019 23:08
Présentation : viewtopic.php?f=9&t=10205#p302753
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Localisation : Vendée
Âge : 41

Re: Les rites de passage

Message par Gail »

[mention]Bulle d'o[/mention] Merci :honte: Il faudra que tu me dises ce qui t'a gêné, ça m'aidera pour me lancer une prochaine fois...
J'aime beaucoup ton rite de passage familial... Je pense qu'effectivement, une famille "clan" assure ce besoin de reconnaissance et d'appartenance qui semble fréquent chez l'être humain. ( Après tout, l'homme est un animal grégaire)

[mention]Napirisha[/mention] Effectivement, des cérémonies non religieuses sont apparues pour permettre de marquer ces évènements de vie sans faire appel à la religion. Mais j'ai tendance à ne pas les voir comme des rites de passage dans la mesure où c'est l'individu qui choisit la façon dont il va montrer à la société l'étape qu'il vient de franchir ( et non la société qui impose une façon de faire et reconnait l'étape franchie - je ne suis pas sûre d'être très claire :1cache: )

[mention]Laurène Bancale[/mention] Swinn exprime parfaitement où apparait le problème du passage du collectif à l'individuel.
Swinn a écrit : mer. 16 oct. 2019 08:54 Un groupe qui perd la notion de la symbolique de son intégration finit par perdre sa cohésion et là où il y avait des comportement collectifs se trouvent à l'opposé des comportement des plus en plus individualistes peuvent conduire à la déliquescence voir la disparition de celui-ci.
Nous vivons en société, pour que cela "fonctionne " il faut que les comportements collectifs prennent le dessus par rapport aux comportements individuels. Or, actuellement, il y a une tendance à une attitude consommatrice, on veut tout, tout de suite, sans être prêts à donner en échange pour la collectivité. On veut une médecine de qualité 7jours/7, 24h/24, une école pédagogue et bienveillante, qui accueille la différence mais qui gère aussi les horaires décalés et les enfants malades, des forces de l'ordre qui assurent la sécurité sans jamais être dans le contrôle... Il y a du coup une souffrance de ce qui ont fait le choix de travailler pour le collectif à qui on exige toujours plus. Et on se retrouve face à une crise des vocations puisqu'en plus, on nous apprends que le bonheur c'est d'avoir du temps pour soi et de partir en WE!
Peut-être qu'un service national mixte et allégé permettra de réinstaurer une certaine cohésion dans notre société ?
Ça embrouille mais c'est pas si bête, ça met des grelots dans la tête
Les Elles - Milo

Avatar de l’utilisateur
Bulle d'o
Messages : 2754
Inscription : sam. 3 nov. 2018 01:10
Présentation : [url=https://adulte-surdoue.fr/viewtopic.php?f=9&t=9657] un bout de moi [/url]
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Localisation : bof
Âge : 45

Re: Les rites de passage

Message par Bulle d'o »

Sur cette question des rites de passages, et sur les questions de l'affaissement de ces rites dû à l'individualisme, je rejoins cette idée.

Sur cette confrontation de société holiste vs société individualiste, je crois qu'effectivement la notion du rite de passage avait moins de sens, d’intérêt pour la société individualiste.

Dans ce contexte-ci :
La théorie sociologique des sociétés holistes voudraient qu'on fasse le postulat à leur égard, que le collectif prime sur l'individu car la totalité (le tout de la société) prévaudrait sur la somme des parties (soit le cumul des individualités ). Et là, les passages rituels permettraient d'avoir un certain contrôle sur les agents qui composent la société.
► Afficher le texte
Cairn, Bourdieu, sur l'holisme.

Ex (imaginaire): à un temps T avec chute de la démographie, il semblerait important de relancer la natalité pour le collectif et imposer ainsi l'enfantement. Aux fins que l'idée puisse être saisie (et reprise), imprègne les agents qui forment la société, le rite de passage pourra être très marqué. Il appuierait sur une transition forte par exemple de la fillette à la jeune femme, avec sa puberté et ainsi mettrait en avant le moment de la première fertilité. Ainsi l'âge de devenir femme servirait fortement le collectif. Plus dru, rêche serait-il, ce rite, dans sa forme démonstrative, plus loin d'un possible choix (c'est là où on retrouve la dureté, l'agressivité, la moralité culpabilisante en cas d’échec, jouant sur le "tu te dois d'être pour être"... [mention]madeleine[/mention] , je crois ) plus il s'imposerait à l'individu au profit du "commun/collectif".

À contrario, la société individualiste, plus prompte à défendre que la personne est un point de référence indépassable, empruntera de moins en moins ces "rites de passage" contraignants et aurait peu à peu abandonné cette tradition qui n'avait plus de finalités.
► Afficher le texte

Cairn, Boudon, sur l'individualisme (qu'on oppose souvent à Bourdieu son contradicteur, en somme....)

Sauf que c'est alors totalement oublier l'instinct grégaire probable et/ou ce besoin que l'on a tout de même, en qualité d'animal social, de s'identifier à une "image" pour passer d'un stade à un autre. D'y voir une sorte de plus-value à grandir, entre autre. C'est à dire qu'aura été oubliée la finalité symbolique qu'avaient, à grande échelle, ces rites de passages.

Donc je me dis que oui, réinstaurer à ce titre, des rites, ça pourrait être intéressant mais je pense qu'on peut sortir du côté brutal et coercitif (comme le soulignait [mention]madeleine[/mention] ) qui peut être proposé par les sociétés holistes.

[mention]Gail[/mention] Je me dis aussi que le rite doit garder une fonction, celle de prendre en compte la dimension collective, dans l'agrégation des "nouveaux arrivés dans la bande". Sortir de la référence unique égocentrée. Mais encore faudrait il définir les principes que ces rites sous-tendent.
Et la valeur "argent" ou "guerrière" qui peuvent être intriquées dans ces nouvelles sociétés individualistes "modernes" sont des choses auxquelles je n'arrive pas à adhérer. Du coup, je suis assez contente que les rites, que je risquerais qualifier de "sauvages", ne soient plus instaurés en l’état de la situation.

Si je devais recréer un rite de passage idéal, dans une société idéale (et dictatoriale : LA MIENNE!), j'irais jusqu'au bout de la démarche réalisée dans le cadre du service civique. Et que ça ne s’inscrive pas sur une démarche volontaire mais sur un caractère primordial, incontournable, obligatoire. Que l'on puisse faire de cet acte de civisme, à proprement dit, un des rites du passage du monde de l'enfant à celui d'adulte, en y mettant tous les schèmes de la représentation de ce passage : processus, transformation, fête nationale (et fête de familles, fête de promos, hein, allons-y!, forçons tous les traits) et donc félicitations pour le dépassement de soi. Ainsi, indiquer à bas mots à contrario : "si tu n'as pas encore réalisé cela.... tu ne seras pas encore reconnu adulte!". (ou plus positivement, quand tu auras réalisé cela, tu deviendras....)

Pourquoi? Pour porter cette valeur d'entraide dont parle [mention]Swinn[/mention] qui redistribuerait la définition d'être adulte ainsi : "adulte : être qui sait prendre ses responsabilités personnelles et prendre en compte les autres en même temps.". Ça donnerait à mon sens, une autre latitude. Mais bon.... Ça, c'est moi. Je n'arriverais plus aujourd'hui à nier les avantages de la société individualiste dont je profite comme quiconque, cette jouissance de libertés (relatives, hein). Mais ce sujet m'intéressait à la base pour cela : cette raréfaction de rites m'interpelle également, comme s'il n'y avait plus de commun.
Vous ne pouvez pas consulter les pièces jointes insérées à ce message.
"Je ne communique pas mes jugements, je ne suis pas un donneur de leçons, l'observation du monde ne suscite chez moi qu'un dialogue intérieur, un interminable dialogue avec moi-même."

Les désorientés (2012) de Amin Maalouf

Avatar de l’utilisateur
Calvinethobbes
Messages : 313
Inscription : jeu. 20 déc. 2018 15:53
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Âge : 47

Re: Les rites de passage

Message par Calvinethobbes »

"Quoique l'on pense de la chose militaire, la charge symbolique de ce rite était très importante, à tel point que le service a été sous une forme plus simple et plus légère et surtout mixte, réhabilitée par l'actuel gouvernement."
Bien que je partage vos points de vue sur le rôle rituel de feu le service militaire, sa forme actuelle ne me semble pas du tout répondre à la définition d'un rite de passage. La "Journée Citoyen" est bien trop brève, trop "administrative" pour pouvoir être assimilée à un rite. Elle tient plus d'une formalité obligatoire et un peu barbante qu'autre chose dans l'esprit des ados autour de moi. Il n'y a pas de cohésion qui se crée, on n'en parle même pas. C'est une journée d'information, sans aucun enjeu derrière (étape vers l'âge adulte...)

Il me semble plutôt que le passage du bac joue ce rôle, comme cela a déjà été dit, au niveau "société". Je le constate autour de moi, l'année du bac et son passage marque vraiment la transition entre l'adolescent et l'adulte (enfin...proto-adulte ;) ) Les cérémonies de remise de diplôme, éventuellement la fête de fin d'année du lycée, tout ça me semble relever des rites tels que vous les définissez....

Avatar de l’utilisateur
Napirisha
Messages : 4113
Inscription : lun. 22 juin 2015 12:15
Profil : Bilan +
Test : WAIS

Ancien Membre de l'équipe

Re: Les rites de passage

Message par Napirisha »

On parlait sur un autre fil des rites autour de la mort, et de comment ça se passe quand le rite "traditionnel" n'est pas possible. Je poste pour ceux que ça intéresse un article déjà un peu ancien sur l'émergence de nouvelles formes de ritualisation de la mort face au sida. (22 pages)
https://www.erudit.org/en/journals/as/1 ... /015601ar/
Soins et lien social. À propos du Patchwork des Noms ; Christophe Broqua and Françoise Loux ; An article of the journal Anthropologie et Sociétés , Volume 23, Issue 2, 1999, p. 79–99
"La mobilisation collective face au sida et la ritualisation publique autour de la mort permettent d'envisager différemment la question des soins. Du soin considéré comme le geste unilatéral d'un soignant vers un soigné, nous passerons ici à une conception élargie, définissant le soin comme activité de restauration du lien social. Celui-ci apparaîtra dès lors sous différentes formes : celle du geste porté sur soi - l'individu sur lui-même ou le groupe sur lui-même -, celle du geste porté vers l'extérieur - de l'individu ou du groupe vers la société -, puis, dans une phase ultime, et comme par principe de réciprocité différée, celle du geste porté par la société - par l'intermédiaire d'instances qui l'incarnent - vers l'intérieur, c'est-à-dire les individus ou les groupes concernés."
wonderbra de la recherche Google (c) Miss Souris

Avatar de l’utilisateur
Bulle d'o
Messages : 2754
Inscription : sam. 3 nov. 2018 01:10
Présentation : [url=https://adulte-surdoue.fr/viewtopic.php?f=9&t=9657] un bout de moi [/url]
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Localisation : bof
Âge : 45

Re: Les rites de passage

Message par Bulle d'o »

Cette question du rite et du passage me revient en force en ce moment dans le cadre du contexte actuel.

Outre les effets d’appréhension du contexte sanitaire différent d’une personne à une autre, avec les effets de la méthode de gestion au « pas à pas » de notre société (qui n’a pu que ce qu’elle a pu dans sa logique propre de gestion, je crois), je me demande fortement ce qu’on arrivera à saisir de mouvement pour s’extraire d’une certaine passivité ambiante, et hors rites....Comment ça va pouvoir repartir?

J’ai cette impression qu’on ne sortira pas de cette période, nébuleuse, et qu’on ne conservera plus que le doute et la peur, qu’on ne conservera que l’immobilisme ou la provocation stérile, une sorte d'opposition de principe fondée sur aucune investiture personnelle (on ne se positionne pas, on s’oppose sans réel but à ce qui est) ou à l’autre bout, une adhésion certaine au repli sur soi (on se sent dans le besoin du risque zero).

J’ai l’impression qu’en l’absence de repère de « droit/pas droit » et « secure/pas secure », on restera sur cet état de dépendance au seul mouvement de l’objet de crainte et non plus au mouvement possible de l’Homme.

Je me demandais du coup si le rite, en servant l’émancipation d’un état vers un autre, pouvait se trouver ici, devait se recréer ici pour « se penser à nouveau » autrement que soumis aux aléas d’un contexte que nous ne maitrisons pas. Je me demande aussi comment les sociétés avant nous ont fait pour sortir de ces crises sanitaires. Qu’est-ce qu’il leur est resté après, est-ce que des déterminants sont restés après ça? Est-ce que les rites de passages ont évolués?

Je me demande aussi les traces que vont laisser ces mises en suspend, sur la génération devenant adulte actuellement, durant cette période. Et je me demande cela en lien avec les rites car je trouve que leurs peu de rites, s’effacent pleinement en ce moment :
- Pas de bac : pas d’épreuve finale d’évaluation, pas de performance : une transformation de l’auto-évaluation de progression placé comme justificatif de l’obtention de son ticket d’entrée dans le monde estudiantin et professionnel.
- Et aprés, l’émancipation : le départ de chez soi pour la primo-indépendance est on ne peut plus incertaine. Les trousseaux sont constitués petit à petit, les choix indiqués, les séparations préparées psychiquement mais il y a au terme d’un an une incertitude forte sur la faisabilité concrète de séparation. Tout peut être prévu pour acter ce petit rite de « partir à l’université/au travail» mais qu’en sera-t-il si l’université n’ouvre pas et que le départ se fait dans le retour dans la chambre d’enfant pour toute émancipation. Sans ami, sans prof, mais avec un ordi, assurément. Sans patron, sans piôle à soi...
- Et enfin, le troisième point : pas trop d’amour non plus, comme le premier acte intime de partage avec autrui. Pas que cette génération ne se soit pas adonné au plaisir de cette rencontre mais j’avoue rester très interloquée de les voir s’embrasser avec masque et respirer un peu de plastique remplaçant le contact sensuel (au sens du sens, le toucher) de la peau. Vont ils finir pr faire l’amour sous vide? Plus de bravade à indiquer « je rentre dans le monde des grands car j’ai fait l’amour » car sanitairement, cet espace que je pourrais qualifier de rite aussi, serait vu comme une inconscience individuelle à charge du collectif et de ce fait plus honteux moralement que la marque d’un nouveau monde qui s’ouvre.

Foncièrement, je ne saurais dire là : comment va-t-on sortir de ça? Est-ce ma vue des rites de passages qui est faussée ou un pessimisme ambiant lié à une perte d’opportunité individuelle (et sure que ça pèse et ça donne mon biais)? Je pourrais me satisfaire de revenir à un état de partage à néant dans mes habitudes pour le bien du collectif mais j’ai du mal à le faire devant l’incertitude d’un après qui reprendrait ou d’un après qui serait différent mais dans lequel, je me sens aucune possibilité de penser ni de comprendre. L’impression de n’avoir qu’une information tronquée. Je voudrais certainement, qu’à l’instar d’une adaptation en tout distanciel que nous avons eu pour nos emplois, nous pensions aussi ces passages, ces rites, pour reprendre une certaine «émancipation intellectuelle », pour moi, mais pas que pour moi. Pour ne pas sombrer et projeter à nouveau.

J’en suis un peu à rechercher cela : https://www.cairn.info/revue-de-neurops ... ge-238.htm ---------------------------------------------------------------------------------------

Et pour comprendre aussi pourquoi j’ai ces questions, sans lien avec le rite de passage, voici un bout d'explication de mon objet professionnel « l’habitat et ses effets sur les populations précarisés ». Un an que nous sommes au second front pour tenter de faire accéder à un toit ceux qui n’en ont pas, pour se préserver soi de cette maladie, pour préserver autrui de sa diffusion. https://www.persee.fr/docAsPDF/vilpa_02 ... 1_1813.pdf
"Je ne communique pas mes jugements, je ne suis pas un donneur de leçons, l'observation du monde ne suscite chez moi qu'un dialogue intérieur, un interminable dialogue avec moi-même."

Les désorientés (2012) de Amin Maalouf

Avatar de l’utilisateur
madeleine
Ninja Traductor
Messages : 4310
Inscription : jeu. 9 janv. 2014 10:16
Présentation : http://adulte-surdoue.fr/presentations/ ... t4411.html
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Localisation : clermont-ferrand
Âge : 57

Ancien Membre de l'équipe

Re: Les rites de passage

Message par madeleine »

Bulle ton sujet/objet professionnel est pile pareil que le mien mais je ne peux pas ouvrir ton lien :(
Par mp ?
le chemin est long et la pente est rude, oui, mais le mieux, c'est le chemin, parce que l'arrivée, c'est la même pour tout le monde... Aooouuuh yeaah...
avec l'aimable autorisation de P.Kirool

Avatar de l’utilisateur
Napirisha
Messages : 4113
Inscription : lun. 22 juin 2015 12:15
Profil : Bilan +
Test : WAIS

Ancien Membre de l'équipe

Re: Les rites de passage

Message par Napirisha »

Orfeuil Jean-Pierre. Aménager le pays avant et après la crise du COVID-19 : éviter le déni, susciter la confiance. In: Villes en parallèle, n°49-50,2020. Matériaux pour la ville de demain. pp. 158-179.

DOI : https://doi.org/10.3406/vilpa.2020.1813

www.persee.fr/doc/vilpa_0242-2794_2020_num_49_1_1813

Et comme ça ?
wonderbra de la recherche Google (c) Miss Souris

Avatar de l’utilisateur
Pascalita
Messages : 3189
Inscription : dim. 14 août 2016 11:26
Présentation : viewtopic.php?f=78&t=7720&p=228775#p228775
Profil : Bilan +
Test : WAIS

Re: Les rites de passage

Message par Pascalita »

Merci, @Napirisha ! Moi non plus, je n'arrivais pas à ouvrir le lien de Bulle, mais le tien, c'est bon (les deux).

Avatar de l’utilisateur
Bulle d'o
Messages : 2754
Inscription : sam. 3 nov. 2018 01:10
Présentation : [url=https://adulte-surdoue.fr/viewtopic.php?f=9&t=9657] un bout de moi [/url]
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Localisation : bof
Âge : 45

Re: Les rites de passage

Message par Bulle d'o »

Merci Napi.
"Je ne communique pas mes jugements, je ne suis pas un donneur de leçons, l'observation du monde ne suscite chez moi qu'un dialogue intérieur, un interminable dialogue avec moi-même."

Les désorientés (2012) de Amin Maalouf

Avatar de l’utilisateur
Traum
Messages : 638
Inscription : jeu. 15 janv. 2015 22:22
Présentation : viewtopic.php?f=9&t=6895
Profil : Bilan +
Test : WAIS
Localisation : Tout droit jusqu'à l'étoile du matin
Âge : 37

Re: Les rites de passage

Message par Traum »

Post très intéressant que j'ai enfin pris le temps de lire en entier.
Effectivement, en France, les rites de passage me paraissent tendre à disparaître de plus en plus.

Pour ma génération, il y avait encore :
  • le bac (que l'on dévaluait déjà beaucoup : « il est donné à tout le monde », et c'était le diplôme qu'il fallait avoir mais qui ne se suffisait plus à lui-même. Je ne parle même pas du brevet, tant on en fait peu de cas.
  • le permis de conduire : on n'en parle pas beaucoup, mais quand on ne l'a pas à la sortie de l'adolescence, on se sent souvent mis de côté, comme si on avait manqué une étape dans le « devenir adulte ». (C'est moins vrai en milieu citadin, bien desservi par les transports.)
Je fais partie de la génération pour laquelle le départ de chez ses parents est devenu de plus en plus difficile, pour des raisons financières, que ce soit pour les études, le premier emploi ou la mise en couple. J'ai quitté le nid familial assez tôt, même si j'aurais pu partir encore plus tard, à l'occasion de mes études.
Dans la sphère intime, il y a la première fois, avec toutes les injonctions contraires qui pèsent sur les garçons et les filles (dont a fort bien parlé @Gail), et aujourd'hui une multiplication encore croissante de perspectives amoureuses et sexuelles. (Je ne suis pas si vieille, mais on parlait moins de polyamour il n'y a seulement quelques années… ou alors j'ai été très aveugle.)
Pour ceux qui croyants, il y a encore les rites propres à leur confession ; mais il est vrai que ces rites sont de plus en plus relégués à la sphère intime.

Dans une société de plus en plus atomisée, on ne parle pourtant jamais autant de communautarisme, et la dimension de rite et de rituel a le vent en poupe, certes, plus dans la sphère intime, mais c'est plus présent.
Je pense notamment à ce que j'observe autour du féminin et dans le monde des naissances. J'entends de plus en plus émerger tout un phénomène autour du féminin sacré qui appelle une certaine ritualisation. Il en est de même durant la grossesse, l'accouchement, le post-partum, ou encore en amont, autour des premières règles (« premières lunes »), de la conception… La dimension commerciale tend à s'estomper (moins de baby shower, plutôt un blessingway, au moins en France), même si ces rites sont souvent portées par des femmes qui reçoivent une rétribution (professionnalisation du rituel qui n'est plus portée par une communauté en tant que telle, mais par une femme qui en fait son métier, souvent une doula).
J'entends aussi parler de ritualisation autour de la mort, en dehors des sentiers battus de l'inhumation religieuse.
Certaines sociétés discrètes, porteuses d'une démarche initiatique et de rituel, comme la Franc-Maçonnerie, semblent aussi avoir le vent en poupe ces derniers temps.

J'ai l'impression que moins il y a de rites imposés par une société et par les pairs, moins il y a de normes spirituelles qui organisent et structurent cette société, et plus il s'en crée. Moins il y a de coercition (apparente) par le collectif, plus il y a retour d'une forme de collectif au travers de lois, comme celle sur les séparatismes, l'abaissement de l'âge de la scolarisation et l'allongement de cette dernière…
Moins il y a de rites collectifs, et plus les gens se tournent vers des rites et rituels plus individualisés, plus cachés ; plus il y a de « scientificité », et plus on suit l'émergence d'autres formes de spiritualité, qui ne sont plus nécessairement sous des formes religieuses…

Ce ne sont que des impressions, toutefois. Je n'ai aucune compétence en sociologie, aucun argument vraiment solide que mes propres observations et impressions, ce qui est franchement plutôt maigre.

Mais toutes ces démarches relèvent de la sphère privée et ne sont pas solubles dans la sphère publique.
« Ils ne savaient pas que c'était impossible, alors ils l'ont fait. » Mark Twain

Répondre