Mlle Rose a écrit :Je vois quand même un problème majeur avec ce type de réflexion : d'une part c'est très tranché et donc ne me paraît pas refléter la réalité, d'autre part cela saborde la notion de responsabilité personnelle qui est à mon sens essentielle à la construction d'une société saine et juste dans laquelle on n'excuse pas tout par des déterminismes.
Si l'on adopte définitivement ce point de vue, dans ce cas on supprime par exemple les tribunaux, les sanctions, etc... à terme ce point de vue me paraît délétère pour l'équilibre du monde.
Effectivement. On parlerait alors d'un changement complet de société. Cela peut faire peur car cette théorie remet en question les fondements qui nous guident depuis des siècles. Mais pour autant, l'humanité a déja opéré ce genre de révolution.
Un jour, l'homme singe regarda l'oiseau et eu l'envie de voler et se jeta d'une falaise. Il tomba et mourut.
Plus tard, un mec nommé Icare comprit que notre morphologie n'était pas faite pour voler, il décida de la transformer en s'inspirant des oiseaux. Il se jeta, tomba, et mourut.
Puis, durant encore plusieurs siècles nombres de scientifiques accumulèrent des bribes de connaissances qui se cristallisèrent dans l'esprit d'un homme, aboutissant à la théorie de la gravité. Grâce à la compréhension de cette lois universelle, l'homme pu enfin réaliser son rêve : voler.
Et pourtant...Et pourtant, aller dire à l'homo erectus que dans plusieurs centaines de milliers d'année il réussira à voler jusqu'à la Lune. Jamais il ne vous croira. Il ne vous croira tout simplement pas car cela remet en question les fondements qu'on lui a transmit depuis sa jeunesse : "si tu sautes d'une falaise tu t'écraseras la tronche".
Remettre en question la liberté aboutit effectivement à nier la notion si chèrement défendue de responsabilité individuelles et de libre choix. Mais au final, qu'est ce que la liberté ? De quoi parle t on réellement ?
Le principal problème lorsqu'on aborde ce thème est que cette notion est porteuse de bien trop de jugements de valeurs, d'émotion, ou de dogme. Ainsi, pour rebondir sur ce que tu dis Mllerose, dire que la liberté existe ou est nécessaire à l'individu est, à mon sens, tout autant dogmatique que de dire qu'elle n'existe pas dans l'absolu. La preuve est faite par simple expérience empirique, balancez sans préavis que la liberté n'existe pas au milieu d'une conversation, vous observerez des réactions bien plus émotives que rationnelles.
Il est donc nécessaire de bien préciser de quoi l'on parle.
Quand je dis que "la liberté n'existe pas", je parle de la liberté que j'appelle
absolue. C'est à dire celle qui n'est atteignable que par deux personnes : l'ignorant et l'omniscient.
L'ignorant étant libre puisque n'ayant pas conscience d'être soumis à des lois universelles qui le régissent et régissent le monde, tout en étant persuadé d'avoir découvert toutes les lois universelles.
L'omniscient étant libre puisque, connaissant toutes les lois universelles qui le déterminent il peut jouer avec.
Entre les deux, nous tous, la liberté absolue n'existe pas. Ainsi, la liberté dont nous causons, celle que l'on défend et inscrivons sur les frontons de nos mairie n'est, tout au plus qu'une liberté partielle et/ou illusoire.
En effet, nous déclarons un tueur coupable, donc responsable de ses actes tant que rien ne vient prouver qu'il n'était pas libre de ne pas tuer. Or, à partir du moment où l'on découvre qu'il n'était pas libre dans sa décision, induit ou commandé par x ou y, sa responsabilité est lavée de toute punition.
En d'autres termes, nous nous déclarons libre à l'heure actuelle jusqu'à ce que nous découvrions que ceci ou cela rendait nos actions inconsciemment déterminées et donc non libres...et à chaque découverte, dévoilant toujours un peu plus le déterminisme auquel nous sommes soumis, nous déclarerons toujours plus fort, sincèrement et en tout lucidité, que cette fois ci, "ça y est nous sommes enfin libre !"
Or, lorsque l'on admet que le seul et unique but dans la vie d'un organisme, d'un système, d'un groupe ou d'un ensemble est simplement de conserver sa structure et qu'il n'y arrive que dans l'assouvissement des pulsions inconscientes qui régissent les actions de l'entité, l'on comprend immédiatement que ses actions n'ont aucune liberté puisque ignorée du système acteur.
Je rajouterais que, pour moi, tout actes est forcément né d'une motivation. On ne fait rien gratuitement. Mieux encore, je suis partiellement persuadé que nous agissons tout le temps simplement pour nous, et nous uniquement.
(Faisant ainsi voler en éclat la notion de bienveillance au passage.)
Et cela serait fort logique puisque je suis persuadé aujourd'hui que notre seul objectif dans la vie est de continuer à vivre, continuer à maintenir notre structure d'individu, et que, pour cela, nous somme soumis à des pulsions que l'on ne peut réellement contrôler ou rejeter :
manger, boire, se reproduire., rien de plus, la liberté n'intervenant donc absolument pas. En assouvissant ces trois pulsions vous maintiendrez à coup sur votre entité physique mais aussi psychologique. Notre organisme comme tout les autres organismes n'ont besoin de rien d'autre.
Pour l'homme, faisant obligatoirement parti d'une socioculture (ensemble des normes et valeurs propre à groupe) alors on vous aura appris (dans l'optique de survivre grâce à l'organisme supérieur (en niveau) dont vous êtes partie prenante) des comportements, des actes gratifiants (qui permettent la survie de l'organisme supérieure) et d'autres qui seront punis puisque ne contribuant pas à conserver la structure de l'organisme dont vous faites parti.
Ainsi, la contradiction saute au yeux, plus un être se dit libre, plus il sera en fin de compte déterminé, car il cherchera pour sa survie, en faite, à faire parti d'un organisme qui y contribua mais qui, en contre partie, lui demandera de se soumettre à des règles, des lois et des comportements qui conserveront la structure de ce dernier, faisant ainsi de la liberté rien moins qu'un lointain souvenir.
Néanmoins vous pourrez me dire que l'individu a le choix, le libre choix de ne pas se soumettre. Mais, toujours dans l'optique de survivre, il sera en faite bien déterminé à se soumettre, et si ce n'est pas grâce à ce groupe ci, cela le sera grâce au suivant (dans le groupe contestant le premier par exemple)...et ainsi de suite...et tout ça, dans le simple mais au combien puissant objectif de continuer à vivre.
Pour en revenir à la remarque de Mllerose et à mon introduction, admettre ceci remet donc en question toute notre vision des choses. Une vision des choses qui, il me semble, aurait bien besoin d'être remit à jour aux vus des dernières découvertes scientifiques (qui ne sont, en faite, pas vraiment des découverte, puisque nombre de religions en avaient parlé bien avant, mais qui néanmoins sont les seules à êtres exposées dans un langage (mathématiques) où l'impossibilité d'interprétation et la reproductibilité des expériences empêche toute contestation).
Ce que je crois c'est que l'homme s'apprête à franchir un nouveau pallier dans la connaissance qu'il a du monde. Que cette révolution entraînera des changements colossaux qui amèneront l'humanité toujours plus proche de cette omniscience utopique (?), et donc, de cette liberté absolue.
Il nous ait difficile d'imaginer ce que pourrait être une société basée sur ce genre de théorie tel qu'il nous ait impossible d'imaginer ce qu'est la vie après la mort, ou ce qu'était l'univers avant le Big Bang. Cela fait parti de ces questions, qui, à la simple pensée vous donne le vertige. Ce vertige est compréhensible, et surement aussi vieux que les premières pensée mystiques : notre cerveau imaginant, associatif ne pouvant construire de scénarios imaginaires (et donc nouveaux) qu'à partir d'expériences mémorisées (via le vécu ou une transmission quelconque). N'ayant connu que cela jusqu'à nos jours il faudra plusieurs décennies encore, avant que, d'expériences individuelles en expériences individuelles ou en groupe, s'amassent un terreau fertile où poussera la graine vivace d'un esprit ou d'un groupe d'esprits qui, s’imprégnant de toutes les connaissances transmises passés, et qui aboutiront à cette nouvelle société, cette fleure d'espoir, ce fruit au gout d'évolution ou de progrès...jusqu'au jour ou cela sera encore remit en question...encore...et encore...
Alors, à moins qu'un jour nous ne soyons en possessions de tous les facteurs qui régissent l'univers, alors jamais nous ne serons libre réellement. Et ce "nous" s'applique au système que nous sommes, comme à tous les autres.