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par Peterp » dim. 3 févr. 2019 15:47
Bonjour à tous. J'ai envie d'écrire (chose qui m'arrive souvent) donc je vais vous raconter ma passation, qui remonte à un peu moins de trois ans.
Il faut savoir que contrairement à beaucoup d'entre vous, je n'ai pas passé le WAIS pour des questionnements anciens, ni un intérêt particulier pour la douance, mais parce qu'une personne (Asperger) connue sur un forum de "martyrs d'enfance", à commencé a me parler du Mensa, dont elle fait partie, en insistant sur le fait que je devais absolument faire le test pour rentrer dans ce club, très sympathique à ses dires et absolument à ma portée. Comme quoi, j'ai été détecté par cette inconnue qu'en plus je n'ai jamais vue, car après mon test elle a disparu dans le néant. Un ange venu d'une autre dimension ? Va savoir...
Du coup, et en pleine psychothérapie, car j’étais en choc post-traumatique sévère (amnésie traumatique) et alcoolique depuis un an, l'idée à commencé à se frayer un chemin dans ma petite tête agitée, et comme je ne me sentais pas supérieur à une merde écrasée par le destin, j'avais furieusement besoin de retrouver un peu de cet amour propre que je venais de perdre, et surtout, de ne pas réduire ma jeunesse à cette suite de violences qui venaient de remonter douloureusement à la surface. Bien évidemment n'étant pas dans mes meilleures dispositions, j'avais furieusement peur d'être recalé parmi les cons, donc j'ai beaucoup hésité avant de me lancer.
J'ai fait finalement le pré-test Mensa, avec comme résultat : "vous avez des bonnes possibilités de réussir les tests". Bon, là je me suis dit "peut-être que je ne suis pas si con". Et je me suis tout de suite inscrit à une session. Mais le jour J j'étais tellement hors de moi que je ne me suis pas présenté et du coup, conseillé par mon inconnue, j'ai décidé de passer un WAIS, sans être trop convaincu par la démarche (à cause du prix et de mes peurs).
Je précise que j'ignorais tout des tests de QI, du WAIS et de la courbe. Je savais seulement ce que j'avais lu sur le site du Mensa, soit qu'un score proche de 100 nous place dans la moyenne générale, et qu'au dessus de 130 nous sommes considérés comme "très intelligents". J'ignorais même que le test arrive au maximum à 160, désorienté aussi par des articles de journaux qui relatent de QI faramineux de stars américaines, sans préciser qu'il s'agit d'échelle Cattel et non Weschler.
L'avant jour J j'ai essayé de boire moins, pour ne pas arriver totalement dans les vaps, mais je n'ai pas fermé l'œil la nuit par l'agitation, donc je me suis présenté dans un tel état de fatigue et de stress que j'ai tout de suite déclaré à la psy que je voulais renvoyer le RDV, car je n'étais pas en condition, déprimé et au bord de la crise de nerf. Elle m'a fait asseoir, elle m'a laissé exprimer mes attentes et cherché à me calmer (je dirais en vain). Mais finalement nous avons commencé le test, et le chronomètre me stressait tellement que j'ai largement raté la première partie, car mes mains tremblaient et j'avais envie de lui lancer les cubes à la figure. En plus la psy à oublié de me préciser que tous les sous-tests ne sont pas chronométrés. Mais passons...
À la fin de l’IRP j'étais donc tellement démonté que je me suis levé en lui disant "vous voyez ? Je suis trop hors de moi, il vaut mieux renvoyer... nous fixons un autre RDV ?". Elle m'a tranquillisé en me disant que le reste aurait été beaucoup moins stressant. Je l'ai crue et j'ai commencé le verbal un peu plus dans le calme, mais en craignant le pire car je ne suis pas français. Et là surprise, à la fin de l’ICV elle lève la tête et me dit "vous êtes excellent". Je m’interroge... et poursuis avec le test de mémoire auditive, dans lequel je me sens particulièrement à l'aise, je dirais comme une machine en pilotage automatique, tant qu'au dernier item je me dis "c'est tout" ? Elle soulève encore la tête et me dit "dis-donc ! C'est rare de toucher le plafond dans ce sub-test"... Je m'interroge encore avant d'entamer l'arithmétique, en lui annonçant d'emblée que non seulement je déteste les maths, mais qu'en plus j'ai été déscolarisé à 15 ans. Mais encore une fois elle dit "vous êtes excellent en calculs mentaux". Je ne l'ai pas crue ! Mais il faut dire que le mot "arithmétique" m'évoquait des opérations complexes par écrit, et non pas des petites devinettes d'écolier traitées oralement.
Nous passons enfin à l’IVT, que je trouve particulièrement chiant mais que je m'applique à réaliser selon consigne, le plus rapidement possible. Ouuufff !
Elle me fait aussi passer les tests des couleurs, TAT, portrait. Pour voir si j'étais.. psychotique ? Asperger ? Je ne sais pas. En tous cas j'ai commencé à raconter un max d'absurdités sur les images, car c'est apparemment le but, donc cool ! À ce niveau là en général je suis très bon et très sur de moi, donc ces trois tests finalement m'ont amusé, et il était temps, car je n'en pouvais plus et mes prunelles commençaient à se croiser dangereusement. Mais heureusement, c'était fini ! Elle m'a fait un petit sourire et congédié pendant un quart d'heure pour préparer ses résultats.
Je suis sorti attendre dans la cour en aspirant une clope comme la dernière d'un un condamné à mort, dans un état indicible de rage et déception, me disant que j'avais tout raté et jeté par la fenêtre 300 euros pour me faire dire au final que j'étais un mec tout à fait "banal", alors que je voulais me sentir pour une fois un peu "spécial". Je m'étais investi pour me faire du bien, et je venais piteusement de me saboter. Mais j'espérais tout de même d'être catalogué parmi les "légèrement doués", vu qu'elle m'avait dit par trois fois que j'étais bon. Ce quart d'heure a duré une éternité.
Finalement elle m'appelle et m'annonce le score : 144. Très surpris (pour ne pas dire abasourdi) je réponds connement "mais... c'est beaucoup ?". Alors elle commence à m'expliquer ce qui est un écart type, la courbe, les percentiles, l'intervalle de confiance, me disant que pour elle je suis clairement dans les THQI, compte tenu de cet intervalle et de mon stress évident au début de la passation. Je lui demande alors qu'est-ce que c'est un THQI, et quand elle me l'explique, dans l'incrédulité je lui réponds "impossible ! Enfin, doué pour ne pas mentir je l'ai toujours senti, surdoué je l'espérais, mais pas autant quoi ! Il y a surement erreur madame". Elle en a rigolé, et m'a expliqué que si la distribution de mes indices est assez atypique, quoi qu’homogène, ma réaction incrédule est absolument typique des doués qui s'ignorent. Et en vous lisant je constate que je suis loin d'être le seul à réagir ainsi... Du reste, j'ai parfois encore du mal à l'admettre.
J'ai rempli mon chèque en silence, et je suis rentré dans le métro assommé, avec en tête un mélange de fierté enfantine et de rage atavique, la rage de ne pas avoir pu profiter de ce don dans des études pointues, dans ces sciences que j'aime tant. Mais après je me suis finalement convaincu que c'est grâce à ce don que je m'en suis sorti toujours indemne, sorti sans études et réussi ma vie d'adulte, malgré une enfance douteuse et une adolescence de sauvageon. Effet positif : un mois après le WAIS j'en ai terminé avec l'alcool et j'ai mis un peu de côté mon chat à neuf queues médiéval (qui est toujours dans ma pièce, mais dans un petit recoin). Et depuis j'essaye de travailler sur ma conscience en intégrant les implications de la douance dans mon existence, qui sont énormes. J'ai lu un paquet d'articles sur le sujet et bien évidemment je me suis inscrit au Mensa, fort sympathique comme disait ma providentielle inconnue, qui m'a félicité du résultat avant de disparaitre comme un fantôme. Et c'est dommage, j'aurais bien aimé la remercier, car sans son insistance je serais resté dans l'ignorance. En tous cas je me suis fait pleins de potes au Mensa, et je suis vraiment content d'avoir découvert en moi ce bambin si différent du petit martyre qui m'obsédait autant. Si l’inconnue me lit ici (on ne sait jamais) je tiens à lui adresser mon immense et sincère gratitude !