La philosophie comme thérapeutique

l'Humanité, L'Existence, la Métaphysique, la Guerre, la Religion, le Bien, le Mal, la Morale, le Monde, l'Etre, le Non-Etre... Pourquoi, Comment, Qui, Que, Quoi, Dont, Où...?
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Euthyphron
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La philosophie comme thérapeutique

Message par Euthyphron »

Que la philosophie ait une valeur thérapeutique, que le philosophe soit une sorte de médecin de l'âme, c'est un lieu commun qui remonte aux origines. Comme chacun sait, le mot "philosophe" signifie qui aime (ou recherche) la sagesse, par opposition à ceux qui croient la posséder. La philosophie dans l'Antiquité a pour tâche de soigner deux maladies inéluctables, deux faiblesses humaines universelles : l'incapacité à comprendre au-delà des apparences, et l'incapacité à dominer ses désirs.
Or, il m'est venu l'idée (à vrai dire, ce serait plutôt un souvenir qu'une idée) que l'on pourrait réactualiser ce thème, en l'appliquant aux surdoués. A la condition de bien lever le Grand Malentendu, c'est-à-dire de bien comprendre que la philosophie n'a pas pour fonction d'énoncer la vérité. Elle se tient en amont de la vérité, à sa recherche, et non en aval, pour la donner aux hommes. Le philosophe n'est pas un prophète.
Si l'on accepte ce postulat, alors un surdoué qui voudrait se réconcilier avec lui-même pourrait tirer trois bénéfices importants de la pratique de la philosophie.
1) réfléchir pour le plaisir, sans la pression de l'urgence. Très bon pour mettre de l'ordre dans ses pensées d'être libéré de cette pression.
2) ne plus se sentir obligé d'accepter l'absurde, sous le prétexte que "c'est comme ça".
3) apprendre à formuler ses pensées de façon intelligible pour autrui, ce qui est l'occasion de découvrir une possibilité parfois inattendue, celle d'être intéressant pour quelqu'un d'autre que soi.
Aussi me posé-je la question de savoir si cette valeur thérapeutique de la philosophie est quelque chose qui m'est totalement personnel, ou si d'autres peuvent l'éprouver, et même en bénéficier, à condition de trouver bien sûr le moyen de pratiquer la philosophie, ce qui n'est pas la même chose que lire des ouvrages de philosophie, et qui n'est pas gagné d'avance.
Qu'en pensez-vous? Quelle relation entretenez-vous avec la philosophie?

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Cyrielle
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Cyrielle »

Je crois pratiquer la philosophie "sans le savoir" (en tout cas sans aucune base théorique) et d'aussi loin que je me souvienne ; moi j'appelle ça mes "gamberges". Car le mot philosophie m'intimide :lol: et je ne prétends pas la pratiquer. Par contre je partage rarement mes réflexions, sauf avec mes très proches (avec lesquels je n'ai besoin d'aucun effort pour me faire comprendre^^).
Et la plupart du temps, en effet, cela m'aide de chercher un sens au monde qui m'entoure... mais pas toujours.

A ce sujet, j'ai reçu cette info aujourd'hui sur un festival de philosophie en Gironde ; est-ce qu'il est connu parmi les pro ?
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Euthyphron
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Euthyphron »

Je ne connais pas le festival de Saint-Emilion, mais je suis allé voir sur le site, et manifestement vue la notoriété des participants c'est un gros truc. Je me demande comment cela se traduit dans la ville, s'il y a une ambiance spéciale, c'est sans doute une expérience à vivre.
Sinon, ce que tu dis de tes rapports à la philosophie me paraît très intéressant et très typique. D'une part, une quasi absence de partage (hors discussions avec des proches), d'autre part une sorte de timidité. Il me semble que ces deux perceptions sont très répandues chez les gens, disons, qui aiment les choses de l'esprit.
Pour la première, j'ai une explication toute bête : je crois que ce qui manque ce sont les lieux publics. Les partages de philosophie sont donc nécessairement privés, sauf exceptions lycéennes (qui ne s'en félicitent pas toujours d'ailleurs, ces ingrats 8) ).
Pour la seconde, la timidité, les raisons peuvent en être très différentes, de la simple peur d'être mal jugé par quelques crétins prétentieux à la pudeur de révéler quelque chose de profondément soi. La philosophie souffre ici du même toxique que l'art : on a pris l'habitude de considérer que de l'art (ou de la philosophie) pratiqué à l'humble petit niveau d'un débutant ce n'était pas de l'art (ou de la philosophie), et on a eu bien tort, en oubliant la richesse que présente le fait d'être pour tous, pour tout être humain qui le souhaite pourvu qu'il dispose du temps nécessaire. Je rêve d'une société où tout être humain aurait la disponibilité suffisante pour pratiquer à ses heures art et philosophie. C'est d'ailleurs, pour tout dire, mon seul côté marxiste.

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Za
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Za »

Ca me parle bien, ce que tu dis là, Euthyphron !
Il se trouve que je pense être en train de renouer avec mon penchant philosophique personnel, que j'avais gentiment mis au placard durant quelques années. Et AS n'y est pas pour rien.
Parce que bien sûr, la philo tout seul dans son coin, ça ne mène pas à grand chose. Et les personnes en face ne sont pas toujours (pas souvent) réceptives à notre envie de discuter, non pas pour convaincre, mais juste pour... discuter. Réfléchir. Confronter des opinions, chercher la cohérence, la beauté du raisonnement, explorer le réseau des possibles. Et ma classe de philo de terminale a sans doute été le pire endroit pour ça.
Donc en résumé, depuis l'enfance mes tentatives de philo réussies se sont limitées à des échanges avec mon père et certaines personnes que j'ai eu le plaisir de croiser, mais jamais bien longtemps.
J'ai donc ravalé un peu cet élan. Il faut dire que, même si je crois profondément, comme toi, que la philosophie a des vertus thérapeutiques, j'ai jusqu'à présent été surtout confrontée aux effets secondaires indésirables... à savoir un état hypomaniaque avec obnubilation, perte de contact avec la réalité, arrêt indéterminé de la satisfaction des besoins naturels (genre... manger, boire, dormir...) dont je me retrouve coupée ^^.
Philosopher seule est donc mauvais pour ma santé.

Je cherche des espaces bien définis où faire ça. De plus en plus, j'ose me relancer avec mes proches et moins proches sur le terrain de la réflexion. Ce forum est aussi un lieu propice à cet exercice. Ça fait du bien !!! Mais bon sang, ça n'a jamais l'ampleur, la place, le temps que ça mériterait...
J'ai mis mon képi dans la cage
et je suis sorti avec l'oiseau sur la tête...
J. Prévert

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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Euthyphron »

Je te remercie pour ta réponse.
En fait, la quasi absence de la philosophie est pour moi un grand mystère. Imaginez un musicien qui vivrait dans un monde où 99% des gens environ ignoreraient l'existence de la musique, qu'ils confondraient avec une simple production de signaux sonores. Eh bien c'est moi! C'est pour cela que je lance cette discussion, pour mieux savoir ce qu'il en est.
J'ai tout de même un embryon d'explication, mais qui peut sembler dérisoire : la plupart des gens ayant le goût de la réflexion renoncent à la philosophie parce qu'ils ne savent pas ils pourraient la pratiquer. Et d'ailleurs, là où je peux, j'essaie de créer des espaces possibles de philosophie, comme ici.
Ta réponse, *Za*, me conforte dans cette hypothèse. Je pense aussi comme toi qu'il est dangereux pour la santé mentale de philosopher tout seul, que ce soit par peur de la confrontation ou par solitude affective. On oublie parfois que la philosophie telle qu'elle est apparue dans l'Antiquité était une pratique communautaire. Penser par soi-même, oui, mais face au regard critique des autres, qui rappelle la nécessaire confrontation au réel que le solitaire peut avoir tendance à occulter.

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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Cyrielle »

Je croyais qu'il y avait des cafés philo un peu partout ?
En tout cas, à Bordeaux on est bien servis... même si je n'ai jamais osé y mettre les pieds (cf. mon post précédent^^).
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par arizona »

Mon message s'est perdu dans le grand tout :(
Plus le temps de recommencer, mais je reviendrai.
Si nous n'étions pas d'ici, nous serions l'infini.
D'une chanson.

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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Euthyphron »

Cyrielle,
j'ai participé à des cafés-philo dans les années 90, et j'en ai un bon souvenir. Je croyais que la mode en était un peu passée. Tant mieux si ce n'est pas le cas.
Cela dit, il subsiste souvent une certaine ambiguïté, que j'ai mentionné rapidement dans mon post initial. Trop de gens pensent que faire de la philosophie c'est énoncer des opinions, comme des vérités que le monde devrait être reconnaissant d'entendre. Et si ceux-ci dominent, le café-philo reste au mieux un lieu de convivialité (au pire une exposition-défilé d'égos) mais la soif de philosophie reste inassouvie. Les astuces utilisées pour lutter contre ce mal commençaient à me lasser un peu au bout d'un certain temps, je l'avoue. Mais si le patron du café n'avait pas vendu sa boutique j'aurais continué, le positif l'emportant sur le négatif à mon avis.
Arizona,
arggh, le grand tout noir qui bouffe tout! je vois ce que tu veux dire, cela me fait hurler devant mon clavier lorsque ça m'arrive. A bientôt alors!

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Zéphyr
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Zéphyr »

Cyrielle a écrit :Je crois pratiquer la philosophie "sans le savoir" (en tout cas sans aucune base théorique) et d'aussi loin que je me souvienne ; moi j'appelle ça mes "gamberges". Car le mot philosophie m'intimide :lol: et je ne prétends pas la pratiquer.
Je rejoins Cyrielle sur les "gamberges" de mon cerveau. Je ne sais pas si c'est "vraiment" de la philosophie, vu que je ne sais pas exactement ce que ça veut dire. Mais je me suis toujours beaucoup posé de questions (pourquoi j'existe, pourquoi l'Homme est comme ça...).
J'ai bien vite compris qu'il ne fallait pas trop parler de tout ça, à force de m'entendre répondre : "arrête de penser à ça" ou bien "tu te poses trop de questions...". Est-ce que c'est parce que je n'avais pas l'âge normal pour ce genre de question ? Je ne sais pas, mais j'ai commencé à les garder pour moi au collège.
Après, j'ai beaucoup aimé les cours de philo de terminal. Mais là non plus, ça ne se dit pas, en tout cas, pas en terminal S. Et puis c'était la guerre ouverte entre le prof et la classe. Je n'appréciais pas du tout le remplaçant qu'on a eu (tout juste sortis de l'école, qui ne comprenait pas pourquoi on ne connaissait pas les mots qu'il utilisait, et avec une méthode pédagogique que je ne supportais pas : résultat, gros clash, rencontre de deux mondes très différents, je pense qu'il a bien souffert, et nous, on n'a pas eu beaucoup de cours complets), mais j'ai quand même beaucoup aimé la matière qu'il enseignait.
Plus tard, lors d'une soirée étudiante, avec un collègue de promo, on a fait fuir les autres : "trop sérieux ici" "font peur ces deux-là" "prise de tête". Il est devenu un ami que je respect beaucoup. On a pu avoir des discussions passionnantes sans jugement, où même si je ne connaissait pas le sujet, mon avis était écouté avec sérieux. Ces discussions me manques.

Maintenant, je ne pense pas que je rechercherais des groupes du genre "café-philo". Pourquoi ? Parce que j'ai trop peur d'être jugé dans mon ignorance du sujet. Parce que je ne connais rien de ces grands courants philosophiques auxquels il faut adhérer. Parce que j'ai horreur du par-cœur, et que si je retiens sans trop de difficulté l'idée, je ne suis pas capable de retenir celui qui l'a dit, encore moi de le citer. Et pire, je mixe les idées, je les arrange à ma façon. Et dans un groupe, je pense qu'il faut avoir un minimum de connaissances de base pour parler de la même chose et se comprendre.
Euthyphron a écrit :Aussi me posé-je la question de savoir si cette valeur thérapeutique de la philosophie est quelque chose qui m'est totalement personnel, ou si d'autres peuvent l'éprouver, et même en bénéficier, à condition de trouver bien sûr le moyen de pratiquer la philosophie, ce qui n'est pas la même chose que lire des ouvrages de philosophie, et qui n'est pas gagné d'avance.
Je pense que petit à petit, j'avance. Un peu seule dans mon coin, mais j'arrive à trouver des débuts de réponses qui me permettent de moins souffrir de ces questionnements. Par contre, je n'ai jamais lu de livres sur la philosophie, donc je ne prétends pas trouver les "réponses universelles", juste que j'arrive a grappiller suffisamment d'idées pour m'apaiser moi, qui s'appliquent à mon monde à moi. En général, ces questions reviennent plus fort quand je ne vais pas bien, quand je doute de moi.

Bref, pas sure d'avoir répondu à ta question en fait :1cache:

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Euthyphron
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Euthyphron »

Je me demande alors à partir de quand tu as le sentiment d'avoir répondu à une question! Ce que tu as dit m'intéresse beaucoup en tous cas. Quelqu'un qui est capable de vider tout le monde superflu dans une soirée étudiante sans la moindre violence est forcément quelqu'un de précieux! :D
Je trouve qu'il y a un paradoxe qui mérite d'être regardé d'un peu plus près dans ce que tu dis : tu sembles avoir vraiment peur de ne pas être suffisamment érudite pour pouvoir t'exprimer de façon intéressante, comme s'il n'y avait que l'érudition qui puisse intéresser. Tu ressens le manque de connaissances comme un obstacle terrible, là où justement ces connaissances ne sont pas nécessaires.
Entendons-nous bien : les connaissances en histoire de la pensée sont évidemment nécessaires si on veut produire une conférence de haut niveau sur l'histoire de quoi que ce soit qui ait rapport avec la pensée, c'est logique. Mais quand il s'agit seulement de pratiquer la réflexion avec d'autres, on a toujours assez avec ce qu'on sait sans avoir besoin de fantasmer sur l'énormité de sa propre ignorance, sinon on ne commence jamais. C'est là qu'est le paradoxe dont je parlais : je ne peux pas bien jouer, dis-tu, parce que je n'ai pas ce qu'on ne me demande pas pour pouvoir jouer. J'ai souvent remarqué que beaucoup de gens intimidés par la philosophie prenaient les choses dans ce que je juge être le mauvais sens. On aura le droit d'essayer que quand on aura bien lu beaucoup de textes, croient-ils. C'est le contraire en fait : on ne peut goûter vraiment les grands textes que si on a déjà réfléchi par soi-même aux sujets qu'ils traitent.
Merci encore pour ta soi-disant non réponse :-) .
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par TourneLune »

Ceci est un message inutile mais Euthyphron, tu me fais drôlement plaisir et presque tu me réconcilierais avec la philo !

:* :inlove: :inlove:

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Euthyphron
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Euthyphron »

Merci beaucoup, cela me touche. :$
Toi et la philo vous êtes donc fâchées? :prisedebec:

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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par TourneLune »

Non, moi et certains "philosophes"^^

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sanders
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par sanders »

Je trouve Euthyphron ta réponse à celle de zéphyr :
* très intéressante,
* particulièrement accordée à une des réflexions du moment sur le forum, même si cette dernière ne concerne pas la philosophie mais les évènements du monde.

Je ne pense pas avoir déjà fait de philosophie, cette discussion m'intéresse donc pour en apprendre un peu plus.
Par contre, je suis hermétique aux écrits philosophiques que j'ai pu lire (durant le lycée et quelques fois après). J'ai beau lire et relire, je ne comprends pas, je ne vois pas le sens en fait (Edit, ici sens = direction).
Le premier jour du reste de ma vie : Un jour, J'ai pu observer que la poutre que je voyais dans l'oeil de mon voisin, je l'avais fait devenir paille dans le mien. Alors même que nous buttions sur les mêmes (em)bûches. Depuis, plus rien n'est pareil..

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Kayeza
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Kayeza »

Personnellement, c'est un peu le contraire de TourneLune : "la philo" en soi, ça ne me parle pas plus que ça. Mais certains philosophes, oui, carrément. J'aime beaucoup écouter Michel Onfray, par exemple, je le trouve très rafraichissant dans le PAF actuel. Quant à la question de savoir si la philosophie rend heureux, il y a répondu dans l'émission sur France Inter à laquelle il a participé récemment (La bande originale, avec Nagui - si, si - le 25 mars dernier) en disant que le bonheur n'était pas un mot qu'on trouverait souvent sous sa plume.

Si je reprends tes questions,
1) réfléchir pour le plaisir, sans la pression de l'urgence. Très bon pour mettre de l'ordre dans ses pensées d'être libéré de cette pression.
> Ça me parle, mais à moitié seulement : pour le plaisir, certes, mais il y a forcément autre chose pour moi. Si je réfléchis, c'est pour répondre à une question ou à un besoin, ne serait-ce que pour accéder à une forme de certitude temporaire, ou pour arriver à la conclusion que je n'ai pas d'avis. Ce qui est en soi un plaisir pour moi. Mais donc ce n'est pas "seulement" pour le plaisir, j'en retire forcément un autre bénéfice.

2) ne plus se sentir obligé d'accepter l'absurde, sous le prétexte que "c'est comme ça".
> Ça, je le fais tout le temps, et je n'ai pas l'impression d'avoir besoin de "faire de la philo" pour ça. Ou alors je fais de la philo comme M. Jourdain fait de la prose, sans m'en rendre compte.

3) apprendre à formuler ses pensées de façon intelligible pour autrui, ce qui est l'occasion de découvrir une possibilité parfois inattendue, celle d'être intéressant pour quelqu'un d'autre que soi.
> Voilà qui me parait utile, voire nécessaire, pour toutes les interactions sociales quelles qu'elles soient.

Je reviens à ce que je disais en 2 : je ne sais pas trop ce que signifie "faire de la philo" - peut-être parce que la recherche de la sagesse et de ma vérité, transitoire, éphémère, est le moteur principal de la majorité de mes actes ?
Mais pour répondre à ta question initiale, je pense que cette démarche s'accorde bien avec certaines caractéristiques de ma façon de vivre ma douance. Mais je ne prendrais pas le risque de l'étendre à l'ensemble des surdoués...
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Cyrielle »

Tout à fait d'accord avec Tournesol, Sanders, Kayeza (sauf que, même si je suis souvent d'accord avec Onfray, j'ai plus l'impression d'écouter un idéologue, ce qui me semble à l'opposé de la philosophie) et les autres : j'aime beaucoup ta façon de présenter les choses.

Eutyphron, s'il vous plait dessine-moi rend-nous la philosophie familière ! :blonde2:
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Kliban »

Ah ! La philo ne m'a pas rendu plus clair, ça non. Ca a toujours pour moi été un art de la remontée aux fondements. Et quand on va vers les fondements, c'est un peu comme avec la physique : ce qu'on rencontre est difficilement exprimable dans le langage de tous les jours.

Indépendamment de cela, j'ai une histoire compliquée avec la philo. Je l'ai adorée, encensée, puis crainte, et haïe, et me suis réconcilié enfin, mi goguenard mi respectueux.

J'y fus certes comme un poisson dans l'eau. Mais j'aime de plus en plus faire l'expérience de la terre ferme ou de l'espace nu, où elle n'a rien à dire. Drôle de poisson :D

Deux de mes amis l'ont également traversée ainsi - jusqu'à la connaître bien, et la délaisser. Question de tempérament. Tous trois, qui n'avons pas étudié ensemble, Tous trois l'avions pratiqué, avec un engagement certain, mais avons fini par la trouver qui trop lente, qui myope, qui étriquée. Nos ressentis, bien sûr.

Aujourd'hui, y aller me promener est encore source de grand plaisir. Mais alors que j'avais cette motivation, toujours, d'essayer de comprendre ce qu'il fallait être pour pouvoir penser selon telle ou telle ligne de pensée, cela m'a quitté. Sans doute aussi parce que je ne crois plus en l'intérêt, pour moi, d'essayer de cultiver une ligne de pensée. Du coup j'ai de plus en plus de mal à aider certains de mes amis plus jeunes, en licence, maîtrise ou thèse. C'est dommage. J'aimais beaucoup. Mais je m'y ennuie trop, désormais, pour proposer autre chose qu'une relecture orthographique (bon... c'est faux : je suis incapable de relire un texte en ne corrigeant que l'orthographe, quand le concept est mal ficelé : ça me fait littéralement mal au ventre - donc je ne me propose même plus pour une relecture typo :( ).

Pour autant, j'ai beaucoup de respect pour ceux et celles qui s'y adonnent avec coeur, détermination et rigueur (ordre d'importance décroissant). Il y a là quelque chose d'une humanité profonde, qui me touche intensément. Certains de mes amis s'en sont vu ainsi transformés. Moi aussi, assurément, mais je n'y suis pas vraiment resté. Compagnon de route de la philosophie :lol: cela se peut-il ?
De main gauche à main droite, le flux des savoirs - en mes nuits, le règne du sans-sommeil - en mon coeur, ah, if only!, le sans-pourquoi des roses.

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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par axolotl »

Moi aussi, je suis un peu timide vis-à-vis de la philosophie, mais j'ai envie de m'y replonger et ton topic, Euthyphron, m'a convaincue de renouer des liens anciens, pour en retirer les bénéfices que tu énonces dans ton premier post (le second tout particulièrement, je n'ai jamais pu accepter l'asphyxiant "c'est comme ça") et les partager avec d'autres.

Je suis régulièrement des MOOCs sur la plateforme France Université Numérique, et me voilà inscrite à celui-ci :

Philosophie et modes de vie ; de Socrate à Pierre Hadot et Michel Foucault
FUN a écrit :Pourquoi philosopher ? Qu’est-ce que philosopher ? Est-ce comprendre le monde ? Est-ce seulement cela ? A partir du renouvellement de l’approche de la philosophie ancienne initié par Pierre Hadot et discuté notamment par Michel Foucault, il s’agira de voir si la philosophie n’est pas avant tout une recherche du meilleur mode de vie.

Ainsi, ce cours traite des origines et de l’histoire de la philosophie avec un accent mis sur les liens entre vie et philosophie. L’objectif est donc de retracer à grands traits les manières antiques d’aborder cette question ainsi que sa relecture contemporaine. De cette manière, c’est la conception même de la philosophie qui se trouve renouvelée.
Qu'en penses-tu ?
Cela me semble être un bon début (même si, en fait, la présentation est vraiment succincte), et un tout petit investissement en temps.
« J’aimerais pouvoir m’exprimer avec mes sens. Les mots sont parfois très handicapants. »
(Björk)

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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par lady space »

Merci pour ce topic Euthyphron !

C'est drôle de voir les barrières que l'on peut parfois se mettre tout seul. Tu écris ceci : "Comme chacun sait, le mot "philosophe" signifie qui aime (ou recherche) la sagesse..."

Et, plus loin, on trouve l'interrogation de Kayeza : "...je ne sais pas trop ce que signifie "faire de la philo" - peut-être parce que la recherche de la sagesse et de ma vérité, transitoire, éphémère, est le moteur principal de la majorité de mes actes ?" En fait, à mon avis, ce qui est décrit dans cette phrase dépasse le simple "faire de la philosophie" pour devenir "vivre la philosophie". Que demander de plus ?

Avec, entretemps, plusieurs personnes qui pensent ne pas pratiquer la philosophie, vu que leur pratique ne correspond pas à l'idée qu'elles se font de cette discipline.

Alors que, justement, la philosophie en tant que recherche de la sagesse consiste à pousser très loin le bouchon du pourquoi du comment (ce qui, en soi, pourrait parler à un certain nombre de membres de ce forum ;) ), en fournissant des outils et des techniques pour ne pas s'égarer en route. Elle tente de répondre (et je dis bien tente) aux questions que l'on peut se poser comme celle du sens de la vie avec, dans son sillage, la question du bien et du mal, histoire de dégager éventuellement une idée de vers où les choses pourraient être censées aller (philosophie - volet morale et éthique), la question de ce qu'il est possible de savoir et comment (volets métaphysique et logique), et, plus largement, elle s'efforce à chercher des explications quant au fonctionnement du monde et des gens.

Après, il y a des gens qui se penchent vraiment en détail sur l'une ou l'autre de ces questions (ou encore d'autres questionnements - ma liste n'est pas exhaustive) et il leur arrive d'écrire de (très) gros livres que certains ont plaisir (et le temps) de lire. Mais, comme l'a expliqué Euthyphron, ça n'a rien d'obligatoire. Ce qui est important, c'est la recherche et non la production/productivité.

Sinon, pour revenir à la question contenue dans ton titre, la philosophie peut effectivement être une thérapeutique parce que, d'une part, elle donne des pistes et outils pour que chacun puisse trouver sa réponse à la question du sens de la vie, question bien souvent à l'origine d'angoisses et de mal-être. Et, de l'autre, elle permet de structurer les choses, le flot des idées et réflexions qui s'emmêlent les pinceaux quand on n'a pas de méthode pour les trier, hiérarchiser, etc.

Dans ce contexte, je suis tombée sur Irvin D. Yalom, psychiatre américain et auteur (entre autres) de : Thérapie existentielle, Et Nietzsche a pleuré, La Méthode Schopenhauer, Le Jardin d'Épicure, Le Problème Spinoza, qui fait ce lien entre philosophie et psychothérapie. Et ça a l'air de fonctionner. Je ne sais pas s'il a fait beaucoup d'émules mais, au moins, ces livres sont traduits en français, ce qui me fait supposer que les éditeurs français s'attendaient à ce qu'ils rencontrent un certain succès en France, probablement parce qu'ils s'étaient bien vendus dans les pays anglophones.

Sur un registre plus personnel : ce que vous dites sur la solitude et l'impossibilité ou du moins la rareté des discussions à caractère philosophique me parle beaucoup. Et je me demande aussi pourquoi je rencontre si peu d'écho quand j'essaie, avec toutes les précautions qui s'imposent pour ne pas froisser l'interlocuteur d'entrée de jeu, d'aborder des choses qui me touchent et qui me motivent vraiment. En gros, c'est l'éternelle question "Mais pourquoi tant de gens préfèrent rester à la surface des choses et ne cherchent pas à comprendre ce qu'il y a en-dessous ?" La seule réponse que j'ai trouvée pour l'instant c'est la supposition que ces remises en question doivent être trop anxiogènes pour pas mal de gens, qui préfèrent alors ne pas trop chercher un sens à leur vie, de peur de ne pas en trouver. Ou d'en trouver un qui rend caduc tout ce sur quoi ils s'étaient basés jusque là, ce qu'ils ont fait, construit.
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Kliban
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Kliban »

Sur un registre plus personnel : ce que vous dites sur la solitude et l'impossibilité ou du moins la rareté des discussions à caractère philosophique me parle beaucoup. Et je me demande aussi pourquoi je rencontre si peu d'écho quand j'essaie, avec toutes les précautions qui s'imposent pour ne pas froisser l'interlocuteur d'entrée de jeu, d'aborder des choses qui me touchent et qui me motivent vraiment. En gros, c'est l'éternelle question "Mais pourquoi tant de gens préfèrent rester à la surface des choses et ne cherchent pas à comprendre ce qu'il y a en-dessous ?" La seule réponse que j'ai trouvée pour l'instant c'est la supposition que ces remises en question doivent être trop anxiogènes pour pas mal de gens, qui préfèrent alors ne pas trop chercher un sens à leur vie, de peur de ne pas en trouver. Ou d'en trouver un qui rend caduc tout ce sur quoi ils s'étaient basés jusque là, ce qu'ils ont fait, construit.
J'ai longtemps eu cette même interrogation, avec des lignes réponses similaires. Je ne suis plus si sûr aujourd'hui.

D'une part, le mode conceptuel n'est pas universel - et ce n'est pas une question de capacité, plus une question de mode d'accès à ce qui répond à nos déséquilibres, à nos attentes, à notre curiosité. La philosophie est inscrite dans le verbal, le conceptuel et l'argumentatif. Il y a d'autres modes d'accès aux choses, à leur épaisseur ou profondeur, comme on voudra. Même les antiques la couplaient à des exercices de vie, psychologiques ou spirituels.

Et puis au delà de son mode, même en elle-même, philosophie a des limites. Le concept ne peut pas tout, ne voit pas tout et réduit - sublimement, pratiquement, mais réduit quand même. Il faut voir l'effort que font certains philosophes pour revenir à la surface des choses par le concept - et le trajet n'est pas inintéressant, loin s'en faut, mais il est si ardu qu'au final il continue à faire écran, par exemple à ce que je pense être désormais une forme de simplicité profonde des choses. Qu'on ne se méprenne pas. Je ne critique pas la philosophie comme trop complexe, prise de tête ou autre. Cette complexité est bien souvent nécessaire, relève d'un trajet que chacun peut faire s'il s'en sent le désir ou le besoin, engendre des splendeurs, parfois. Je veux juste indiquer que ce n'est qu'un (formidable) outil et que comme tel, elle a ses propres limites - elle déforme aussi la main que elle contribue à former.

Tout cela fait que certains n'y cherchent pas de réponses - ni de sagesse.

Note : Evidemment, c'est très différent de chercher des réponses ailleurs que dans la philo que de se contenter des lieux communs. Et je suis d'accord, aussi, que certains ont peur d'aller chercher plus loin que l'évidence commune. La philo peut jouer là son rôle d'aiguillon. Encore faut-il qu'elle trouve ses pédagogues - j'ai beaucoup d'admiration pour les bons pédagogues en la matière, et d'émotions quand leur action ouvre des espaces de liberté chez d'autres.
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Oxymora »

La philosophie pour moi, c'est, plus que de la vérité, une recherche de ses propres valeurs. Un façon de construire un monde intérieur cohérent, de trouver ce qu'on pense être une "bonne vie" et de lutter contre la peur la mort. Les autres façons de le faire, c'est la religion qui promet le salut, et la distraction (ou l'abrutissement) qui empêche d'y penser (au moins provisoirement).
Si notre fonctionnement cognitif ne nous permet pas de trouver l'apaisement d'une de ces deux manières, la philosophie est une voie cérébrale pour surmonter la souffrance existentielle.
Alors je suis d'accord qu'on ne peut pas forcément philosopher tout seul, (quoique... avec un bon livre on n'est pas vraiment tout seul ;) ) mais cela dit, je ne sais pas non plus comment la pratiquer dans l'échange avec les autres, car il me semble que si l'on n'a pas acquis l'histoire des idées, ce qui est quand même un gros morceau, et profondément réfléchi à certaines notions, on risque de rester sur des échanges de lieux communs ou sur des dialogues de sourds...
Enfin, peut-être pas ici après tout, je dis ça parce que je n'ai toujours pas appris à distinguer ce qui est une parole qui intéresse les autres d'une parole qui n'est pas assez construite pour être communiquée :sweat: :x
Effectivement il y a la un apprentissage vital à réussir à se confronter à la parole et à la pensée des autres, ou plutôt de s'y confronter et s'y accorder.

Je ne retrouve pas la citation exacte, (si vous l'avez, je suis preneuse) mais quelqu'un a dit "Non, la philosophie ne guérit pas, mais c'est un bon soin palliatif" :D
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Euthyphron
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Euthyphron »

Je voudrais d'abord vous remercier, et même éprouver publiquement un moment de fierté collective, car vous êtes onze et demi à m'avoir répondu (la demie est pour arizona dont le message présumé substantiel a été intercepté par les dieux) et personne n'a fait son "moi je", n'a prétendu avoir tout compris ni n'a regardé avec condescendance les contributions des autres, et je ne sais pas où en dehors de ce forum on peut rencontrer une ouverture d'esprit aussi largement partagée. Vive nous, donc. :vague:
Pour essayer de répondre rapidement ("on va y revenir", comme dit Pujadas), trois petites choses.
1) je voudrais insister sur la distinction entre faire de la philosophie et étudier la philosophie. Je n'ai rien contre la deuxième activité, bien au contraire, et un sujet analogue (étudier la philosophie, est-ce une thérapeutique?) aurait été possible.
Mais c'est tout à fait volontairement que j'ai préféré que la question porte sur la pratique de la philosophie, sachant bien entendu que c'est plus facile de faire les deux, en fait, et que c'est probablement pour cela, donc aussi pour faire de la philosophie, que certains choisissent de l'étudier malgré la réputation de non rentabilité qui s'attache à cette discipline. C'est entendu, mais ma question s'intéresse à ceux qui aimeraient pratiquer directement la philosophie, et qui sans doute ne savent pas trop comment faire ni même en quoi ça consiste, donc, si j'ai bien compris, à beaucoup d'entre vous.
2) je n'ai pas abordé les obstacles psychologiques (l'anxiété par exemple) qui empêcheraient la pratique de la philosophie. C'est parce qu'en fait je n'y crois pas trop (on peut être à la fois angoissé et brillant philosophe) sauf à un seul : l'hypertrophie de l'amour-propre, qui nous pousse tous à vouloir avoir raison même quand nous avons tort, obstacle évidemment majeur à la recherche de la vérité.
3) je n'ai pas non plus dit ce que c'était à mon avis que pratiquer la philosophie, et je conçois bien qu'on peut m'en faire le reproche, mais c'est aussi que je ne veux pas avoir l'air d'imposer la réponse, d'autant que la philosophie est diverse dans ses styles et ses méthodes. C'est pour cela, entre parenthèses, que le rejet prétendu de la philosophie n'est en réalité que le rejet d'une manière de concevoir la philosophie. A défaut d'en dire plus pour l'instant, j'oserai une sorte de pari. C'est qu'on peut pratiquer la philosophie avant d'en avoir formulé explicitement les règles, pourvu qu'il y ait deux choses respectées : le souci de vérité (donc l'honnêteté intellectuelle) et le sujet dont on traite (donc après chaque intervention voir où l'on en est de la réflexion sur le sujet proposé). Je me dis que ce serait à tenter.
Un petit mot rapide à ceux à qui je n'ai pas encore pu répondre personnellement.
Sanders : je crois que pour bien lire un grand texte de philosophie il faut des clés, il faut au minimum comprendre pourquoi l'auteur s'est posé la question qu'il traite. Est-ce cela qui t'a manqué?
Kayeza : tant qu'à réfléchir, il est logique en effet de préférer le faire à propos de questions vitales qu'à propos de questions indifférentes. Cependant, les vertus du détachement ne sont pas à négliger, je pense que tu en conviendras. Si bien que paradoxalement en réfléchissant pour le plaisir on peut arriver à comprendre des choses essentielles pour soi qu'on n'aurait pas comprises en se demandant directement quel est le sens de la vie par exemple.
Kliban : je me trompe peut-être, mais je crois deviner quelqu'un qui s'est essayé à la phénoménologie. Est-ce le cas? Sinon, je pense que la philosophie est bien universelle, même si elle n'est pas unique (on peut aborder les mêmes questions autrement).
Axolotl : tes références sont à fond dans le sujet, et moi aussi tout petit déjà j'avais horreur qu'on me dise c'est comme ça, comme si je ne pouvais pas comprendre pourquoi c'était comme ça, alors pourquoi on ne m'expliquait pas, hein? Nous devons être quelques-uns à avoir ce tempérament sur AS.
Lady Space : je ne connais pas Irvin D. Yalom, mais d'après ce que tu en dis si j'ai bien compris cela concerne le lien entre étudier une philosophie (dans l'attitude d'un disciple) et se soigner, plutôt qu'entre pratiquer la philosophie et en tirer un bénéfice psychologique. Cela ne veut évidemment pas dire que ce n'est pas intéressant.
Oxymora : j'ignore tout de cette citation. Ta question sur les moyens de savoir ce qui peut intéresser autrui est très riche. C'est que concrètement elle rencontre un paradoxe (à relier sans doute au rôle de la communication en politique) : pour être intéressant il ne faut pas vouloir intéresser à tout prix. C'est une application de l'idée selon laquelle il n'y a pas de séduction plus réussie que la séduction involontaire.

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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par lady space »

Euthyphron a écrit : Lady Space : je ne connais pas Irvin D. Yalom, mais d'après ce que tu en dis si j'ai bien compris cela concerne le lien entre étudier une philosophie (dans l'attitude d'un disciple) et se soigner, plutôt qu'entre pratiquer la philosophie et en tirer un bénéfice psychologique. Cela ne veut évidemment pas dire que ce n'est pas intéressant.
J'ai dû mal m'exprimer (dans un souci de ne pas pondre un pavé encore plus gros). L'approche de Yalom consiste justement à s'appuyer sur certains philosophes pour en retirer un bénéfice psychologique, d'où la thérapie existentielle (enfin je suppose, ce livre est sur ma liste des bouquins à commander quand j'aurai réduit la pile de ceux à lire). Sachant que la méthode Schopenhauer s'appelle "The Schopenhauer Cure" en anglais et que ce livre a fait beaucoup pour me réconcilier avec un philosophe que je ressentais comme l'éternel pleurnicheur. Mais celui qui m'a le plus marquée/aidée c'est le jardin d'Épicure (facing the sun en anglais) qui décrit bel et bien une démarche thérapeutique basée sur l'épicurisme, mais aussi sur l'existentialisme (et peut-être d'autres courants - je suis loin de tous les connaître). En gros, cette approche permet de remettre dans un contexte plus grand que sa seule souffrance une personne consultant un psychiatre ou de lui proposer une lecture différente des choses qui la chagrinent.

Puis, j'aurais tant de choses à répondre sur les autres considérations dans ton dernier post que c'est vraiment désespérant d'être prise par mon travail et de ne pas avoir le temps ni ma tête pour formuler tout cela correctement :doh:
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Kliban
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Kliban »

Kliban : je me trompe peut-être, mais je crois deviner quelqu'un qui s'est essayé à la phénoménologie. Est-ce le cas? Sinon, je pense que la philosophie est bien universelle, même si elle n'est pas unique (on peut aborder les mêmes questions autrement).
En effet. Le style m'a tuer :D ?

Elle fait partie de mon tempérament philosophique spontané, la façon dont se sont très tôt (onze ans ?) posés les problèmes ("tout ce qui se manifeste le fait dans la conscience" en gros, et ce qui s'ensuit), qui m'a fait concevoir ses opérations, quand je les ai découvertes plus tard, comme évidentes et allant de soi. Il n'en va pas ainsi pour tout le monde, bien évidemment.

Je ne me sens pas pour autant "phénoménologue". Je garde, par exemple, un attrait pour la précision des analytiques dans ma façon d'aborder certaines questions. Il y a aussi encore, malgré une formation scientifique et un intérêt pour les questions relatives à la connaissance, un goût marqué pour les approches radicales ou aux limites - ce sont celles qui me bousculent le plus les étagères proprètes et qui m'ont aussi, en leur temps, le plus aidé.

Note : Me touche assez que tu partages la position que j'avais avant ma transition vers un espace plus neutre au regard de l'engagement dans l'activité conceptuel, notamment dans la recherche d'un espace commun où chacun puisse, dans le respect de l'argumentation, venir s'essayer à comprendre et organiser ses propres raisons et détecter ses déraisons. Si je n'ai plus ce désir - ou plus le feu pour le porter, je ne sais pas encore - j'en reconnais la valeur et suis très disposé à m'y inscrire, dès lors qu'il reste animé du respect de la dynamique de chacun.
Hors-sujet
Nous pourrions faire un topic entier, sinon, sur la question de l'universalité. Il faudrait déjà s'entendre sur ce que l'on entend par là. Mais va essayer de faire de la philosophie avec un moine zen. Ce peut être rigolo :D De façon moins exotique, je connais des tas de gens qui résolvent leurs problèmes dans le silence, dans l'action, dans la production artistique, et pour qui l'approche philosophique n'est au mieux qu'un vague outil imparfait, au pire, un bavardage nuisible.
Je passe, pour ne pas faire augmenter ce off-topic au-delà du raisonnable :). Il nous entraine vers la nature de l'activité philosophique, ce qui n'est pas l'enjeu, asteur.
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Euthyphron »

Lady Space,
c'est moi qui me suis mal exprimé, car ce que tu décris correspond bien à ce que j'imaginais. Je trouve que c'est effectivement intéressant mais très différent de ce que j'avais en vue en créant ce topic, car il s'agit bien de s'appuyer sur la pensée achevée de grands auteurs, et non sur la pratique directe de la philosophie.
Kliban,
je trouve ton hors-sujet pas si hors-sujet que cela. En effet, il existe quelque chose qui se présente plus directement que la philosophie comme une thérapeutique de l'âme, et c'est la religion, qui donc pourrait entrer en concurrence avec la philosophie, voire la rendre inutile. Ce n'est pas par hasard que tu parles d'un moine zen. Alors, est-ce que cela exclut la démarche philosophique? Je ne crois pas. Je crois plutôt que les moines zen aiment beaucoup méditer à partir de paradoxes, comme les philosophes. Je crois même que si un moine zen tenait le discours que tu lui prêtes à propos de la philosophie, il viserait la philosophie occidentale de 1637 (date de parution du Discours de la Méthode de Descartes) jusqu'à disons la fin de la première guerre mondiale, plus tout ce qui depuis continue à s'en inspirer. C'est la période de loin la plus étudiée à l'université, mais ce n'est pas le tout de la philosophie. Et j'oserais la caractériser en disant que c'est la période où les philosophes se sont cru investis du devoir d'apporter la vérité au monde; l'erreur qui fait se gausser notre moine est peut-être là.

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