L'euthanasie en question

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Raphaël
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Re: L'euthanasie en question

Message par Raphaël »

Sinon dans mon premier post sur le sujet, j'ai parlé de plusieurs choses. Seul le moment où je reprend un mot déjà employé plus haut dans la conversation (le mot économique) et que je parle d'un type de cas en particulier qui n'a aucun rapport avec la folie (je ne parle pas de déraison, mais d'absence de pensée). Et je le fait après le mot "Enfin". Du coup ce n'est pas tant que ça le coeur de mon propos.
Je voulais plutôt parler du suicide assisté et des points positifs qu'il pouvait y avoir à l'institutionnaliser avec les mesures d'accompagnement et de diagnostic qui vont bien. L'euthanasie des personnes atteintes au dernier stade de la maladie d'alzheimer dont l'organisme s'obstine à survivre quand la pensée a déserté son foyer par trop ravagé depuis plusieurs années (ce qui est relativement rare si ce qu'on m'a dit est vrai) était vraiment une pensée subsidiaire.

P.S: Si l'organisme dispose encore de capacités motrices, mais qu'il ne réagit plus aux stimulis, c'est bien que la personnalité pensante a disparu, non?

P.P.S: Si je devais cesser d'avoir des avis tranchés durant les périodes noires, ça signifierait que je ne pourrais m'exprimer qu'un cinquième ou un sixième de mon temps, en fait...

P.P.P.S et à demi-hors sujet: Les gens atteints de la maladie de parkinson, qui vivent le contraire en ce sens que la pensée reste, mais la motricité se réduit, ne semblent pas apprécier d'être mis dans les mêmes endroits que les gens atteints de la maladie d'alzheimer. Il faudrait faire quelque chose pour ça, non?
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Zyghna
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Re: L'euthanasie en question

Message par Zyghna »

Raphael a écrit : P.S: Si l'organisme dispose encore de capacités motrices, mais qu'il ne réagit plus aux stimulis, c'est bien que la personnalité pensante a disparu, non?
La personnalité pensante peut être encore là. Le cas des personnes "coincées" dans leur corps en est un exemple assez flagrant. Les IRM permettent de le détecter, la présence attentive de certains soignants aussi.
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Raphaël
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Re: L'euthanasie en question

Message par Raphaël »

Dans le cas de la maladie d'alzheimer? Depuis le départ je ne parle que d'un cas particulier.
Mais je connais le syndrome d'enfermement, "locked-in syndrome". Et là le patient n'a plus de motricité, non?
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Flavie
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Re: L'euthanasie en question

Message par Flavie »

Raphael je comprends ton point de vue et je le partage à plusieurs égards.

Pour moi ce n’est pas de dire que ces personnes ne valent pas la peine qu’on s’en occupe, bien au contraire, mais je remets plutôt en question la manière dont on le fait. On semble souvent prendre pour acquis que le mieux c’est de traiter la maladie, de prolonger la vie, mais il me semble qu’il y a des situations où il faudrait repenser cette approche. Le rôle de la médecine n’est pas seulement de traiter la maladie, mais aussi de peser le pour et le contre d’un traitement : si le traitement amène plus d’inconvénients et de souffrances que de bénéfices on devrait peut-être en discuter avec les principaux intéressés avant de l’administrer simplement par réflexe… comme cela se fait encore trop souvent. Chez nous il y a peu de médecins qui abordent avec les malades et leurs proches la possibilité des soins de confort (à part dans les cas de cancer évidemment) et je vois plusieurs clients qui souffrent aussi de cette approche. Lorsqu’on m’en parle, je les encourage à en discuter avec le médecin. Mais certains ne veulent pas ouvrir cette discussion avec le médecin (car plusieurs personnes se disent que si le médecin n’a pas abordé la question c’est que ce n’est pas encore le temps…. Ils ne veulent pas non plus être les initiateurs de la question des soins de confort parce que oui c’est encore tabou pour les problématiques qui ne mènent pas à une mort fulgurante).

Il y a certainement des personnes qui voudraient que l’on poursuive des traitements actifs qui prolongeraient leur vie aussi longtemps que possible, même dans un état d’Alzheimer très avancé (pour reprendre cet exemple). D’autre part, il y a aussi des gens qui avaient mentionné à leurs proches qu’ils ne voulaient absolument pas que l’on poursuive les traitements actifs si jamais elles se trouvaient dans cette situation. Toutefois, si le médecin n’aborde même pas la question… on passe à côté de la volonté et du bien-être de la personne. Dans la mesure du possible, je serais d’avis que l’on tente toujours de rechercher la volonté de la personne en demandant si elle en avait déjà parlé ou sinon auprès de son représentant qui connaît bien la personne, les valeurs qu’elle défendait et sa façon de penser.

Dans ma famille nous avons abordé la question et personne ne souhaite poursuivre les soins actifs en cas de très lourde perte d’autonomie (état quasi végétatif). Chez nous… vivement le testament biologique!... encore là il doit être très détaillé, car les médecins n’ont pas tous la même définition du terme « acharnement thérapeutique ».

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Pier Kirool
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Re: L'euthanasie en question

Message par Pier Kirool »

En tous les cas, je pense que l'avis du patient ou de la patiente doit compter plus que celui de la famille. Reste que cet avis a pu changer avec le temps. Il faut donc briser le tabou absolu que représente la mort, le plus souvent décrite comme une catastrophe et un très grand malheur, et occultée, alors qu'il (ne) s'agît (que) de l'aboutissement naturel de la vie.
Aux vivants d'apprendre à vivre en apprenant à mourir et à ne pas perturber la qualité de mort de leurs proches en se donnant bonne conscience.
Il faut libérer la parole des corps pensants avant qu'il ne soit trop tard...
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Re: L'euthanasie en question

Message par Raphaël »

Voilà, je suis pour un encadrement et un cas par cas éclairé et concerté, avec un grand respect de la volonté du patient, et une grande rigueur dans la mise en place d'un accompagnement qui serait ajusté à un diagnostic.
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Kayeza
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Re: L'euthanasie en question

Message par Kayeza »

Ce midi je suis tombée sur une émission de France Culture qui recevait deux personnes qui ont écrit chacune un livre sur le suicide assisté de leurs parents (légal en Suisse ; est-ce la même chose que l'euthanasie active ?).
Leur témoignage est intéressant parce qu'il vient "de l'intérieur", des gens qui restent derrière mais qui décrivent aussi ce qu'ils ont ressenti de la part de leurs parents, des raisons de leur choix, etc. Je n'ai pas écouté le début, mais il me semble bien qu'on parle là de personnes qui décident de mourir alors qu'elles sont en bonne santé, entourées, en pleine possession de leurs moyens intellectuels, etc. Voilà pour apporter un autre éclairage à cette discussion.
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gabriailes
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Re: L'euthanasie en question

Message par gabriailes »

[BBvideo 425,350][/BBvideo]

C'est un spectacle belge (amis belges, si ce thème vous intéresse, n'hésitez pas)
Nous assistons à des histoires mêlées de patients qui se sont battu des années pour obtenir le droit de mourir, des patients qui finalement, après l'avoir cru possible, ce sont avisés, un médecin qui fut important dans la lutte belge pour le droit à mourir dans la dignité, des familles qui ne peuvent pas ou au contraire soutiennent.

C'est très intéressant, cela me semble assez juste, dans cette vision ultra-complexe de l'euthanasie. Mais pour moi, l'euthanasie ne peut pas être une question politique. Elle ne l'est pas. En Belgique, le choix est évidemment laissé au médecin de la pratiquer ou non, quelle force faut-il avoir pour s'avouer vaincu, moins fort que le souffle de vie? Quand ton métier t'as appris que tu devais sauver, que tu pouvais le faire. Mais comme le disait Cyrano, aujourd'hui on est capable de "faire vivre" de manière incroyable. La question de "faire mourir", son répondant direct, se doit d'être requestionnée.

Il y a beaucoup de choses qui me rende honteuse de mon pays, mais ce droit, celui de mourir dans la dignité, j'en suis soulagée et fière.

Des gens, apprenant qu'ils sont malades gravement demandent, parfois directement, si à un moment l'euthanasie sera possible. Ils ne prendront pas forcément cette décision, mais cette porte les rassure. Il ne s'objetiseront pas. Ils ne deviendront les marionnettes de personne. Quand on est actif et indépendant, cette question peut être primordiale.

Et puis on vit avec son nouveau corps. Et là se pose la vraie question. Comment vivre avec ce corps? Et pourquoi vivre? Toutes les réponses du monde existent. Et dans celle-ci toutes celles qui relève des impossibilités.

Le patient qui ne supporte plus sa condition, ni ses traitements, doit être en droit de ne pas devoir, à mon sens toujours, lutter comme un fou, comme un acharné, pour qu'on le laisse partir. La législation permet d'un point de vue pratique et psychologique une facilitation, à mon sens, du processus extrêmement difficile, déjà, en soi, mais qui permis par la loi, est de ce point de vue plus abordable par tous. Le droit individuel du patient est protégé. S'il décide de mourir, en toute conscience, il pourra le faire. Cela redonne à l'individu, le droit de mourir, vraiment. Le DROIT, non juste la possibilité arrangée.

Ado, mon père a fait cette demande-là. Et la question, pour moi ne fut jamais aussi limpide. A bout de forces, il voulait s'arrêter maintenant. Pas après une dégradation de plus de son état, pas après d'autres installations encore mises en place pour diminuer encore et toujours ses souffrances de plus en plus grandes.
Il voulait mourir, les démarches furent faites, le hasard de la mort l'attrapa peu avant. Mais peu importe, il avait fini. Dans sa tête, il avait fini. Il avait donné, il avait vécu, et il avait fini. Dans son lit, il a pensé, sans doute des semaines entières et puis il a décidé qu'il avait fini. Que c'était bon. Qu'il nous avait offert tout ce qu'il avait pu, qu'il ne pouvait plus rien. Qu'il ne pouvait plus lire, manger, cloper, boire du pinard, nous prendre dans les bras.

D'après moi quand un être humain décide que c'est fini, il faut le laisser décider. Il est maître de sa vie. Jusqu'au bout. Des médecins acceptent l'euthanasie, d'autres non et eux sont aussi maître de leurs choix.

Aujourd'hui des "médecins de la douleurs" existent, des médecins chargés de gérer les douleurs de certaines maladies chroniques. Le champs d'action du médecin est aujourd'hui tellement énorme qu'évidemment tout se spécialise. Mais, cela montre peut-être une chose : le traitement de la douleur est aujourd'hui une spécialité à part entière, différentes du traitement des pathologies.
L'euthanasie pour moi se retrouve au sein de cette scission : Il y a sauver de la maladie, à tout prix. Et il y a le traitement de la douleur (ici physique comme mentale). Quand l'espoir d'un traitement est épuisé il ne reste que le champs d'action de la douleur. Et, cela s'éloigne donc du champs d'action du médecin curateur, mais dans ce champs d'action là, l'euthanasie est une réponse qui peut être donnée. Au médecin de réfléchir s'il décide d'être curateur. Ou plus que ça.

(Je remercie le médecin généraliste de mon père qui avait accepté, et pour la première fois de sa vie, d'accompagner mon père dans ses démarches, il fut pour nous d'un soutien qui est, aujourd'hui encore, inestimable.)

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