liberté(s)

l'Humanité, L'Existence, la Métaphysique, la Guerre, la Religion, le Bien, le Mal, la Morale, le Monde, l'Etre, le Non-Etre... Pourquoi, Comment, Qui, Que, Quoi, Dont, Où...?
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Chacoucas
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Re: liberté(s)

Message par Chacoucas »

Intéressants ces points, O'Rêve. Mais je n'y vois pas quelque chose qui me semble au moins tout aussi important, qui est juste envisageable entre les lignes.

Dans quel monde vit on? peut on décider de notre environnement, les gens qu'on connait, le paradigme dans lequel on évolue, les choses que l'on a appris, les émotions que nous avons l'habitude de connaitre et nous servent de repères?
J'ai entendu cette phrase hier qui m'a marquée
nous vivons dans la paranoïa des autres
, dans le sens où les gens nous transmettent leurs peurs, leurs visions du monde, si ils ne transmettent pas forcément directement leur structure identitaire, ils transmettent leur manière de sentir le monde, l'envisager, ce qui indirectement mène à un résultat moins précis mais comparable.

Dès lors, que sont nos désirs? Qui sont nos désirs? Qui est la responsabilité? celle de qui, de quelle personne, dans quel champ s'applique la responsabilité, selon quels critères, facteurs pris en compte? Quelle est ma conscience, où s'arrête t'elle? A n'en pas douter, cette conscience a des limites, un cadre, qu'on peut probablement changer, faire évoluer en prenant conscience des déterminismes de chacun, dont les siens forcément, mais elle n'est pas non plus infinie. Par exemple ces discours que l'on écrit ici ne sont pas "les nôtres", ils viennent d'ailleurs, on les a reçus, puis adaptés et interprétés, en les "percevant", mais dans la perception même de ces discours, notre sensibilité fait une sélection de notions et d'éléments (on dit que chacun n'entend pas les mêmes choses dans un même texte, par exemple).

La conscience reste donc déterminante dans les deux grands points que tu énonces. On sait 1 qu'elle n'est pas infinie, 2 grandement déterminée (exemple simple: le mensonge et la confiance, les deux réunis, si quelqu'un en qui tu as confiance te ment, te font exister dans une "bulle" de "non-réel", ou de "réel alternatif", qu'on peut considérer comme une culture limitée à quelques individus, un ensemble de repères et croyances qui ne sont pas vérifiables ni "réels"... mais néanmoins finissent par influencer ta relation aux autres et au reste du monde, donc influencent le monde indirectement)

Et en particulier ton second point, ainsi que la notion de solitude, peuvent prendre dans le paradigme que je dessine là des interprétations et conséquences très différentes. Selon le "cadre" dans lequel on conçoit nos choix par exemple. Et les conséquences éventuelles qui vont avec, les mécaniques qui suivent, dont la conscience est différente, et par là même la responsabilité (ton premier point).

EDIT (supplément): La prise de conscience du choix et de la responsabilité c'est un discours de base en psychothérapie. Dans la relation entre un thérapeute et un patient dit "en souffrance" ou "difficulté" ça a en effet du sens. Mais cette cellule ne peut se considérer isolément du reste du social. Le thérapeute comme le patient sont déterminés, et ne sont pas non plus "libres": l'un exerce une profession, l'autre souffre d'un manque d'intégration, de solitude, d'incompréhension de lui même et ses relations etc. (ainsi que d'un pouvoir d'achat des soins, et d'une foi en la discipline soignante). Les intérêts de chacun sont dictés par un paradigme plus général. Quelle responsabilité accorder à chacun? Dans quel cadre se définit elle? Où s'arrête la conscience, et donc les choix possibles? Quand ces choix dépassent ce cadre, le déterminisme de ce cadre nuit il à la prise de responsabilité et de conscience? Logiquement, oui. On n'applique pas les mêmes règles et les mêmes lectures à deux cadres différents. On ne regarde pas un échiquier comme on regarde les mouvements d'un cavalier hors de la présence de toute pièce ou de la dynamique de jeu. Ou la vie d'une cellule comme on regarde le fonctionnement du corps.
Pourtant ces domaines sont intriqués, une décision dans un cadre influence l'autre cadre.

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O'Rêve
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Re: liberté(s)

Message par O'Rêve »

Bien entendu, il n’existe pas de perception isolée, pure, non influencée. Toute perception est initialement structurée par des représentations, liées à l’histoire de la personne, à ses expériences dans un milieu donné.

Bien entendu, nous sommes soumis à des déterminismes.
Oui, nous sommes tous soumis aux conventions, traditions, habitudes. Cela rassure. Elles sont d’une certaine manière nécessaire. Quand on est enfant, qu'on entend un principe, une idée à répétition, on l’apprend. Elle devient finalement nôtre et alors qu’on pense en être l’auteur, on peut mécaniquement réciter une leçon. Notre esprit déformé par cet apprentissage sélectionnera les évènements qui conforteront cette vision « déréglée ».

Pour moi la liberté d'être, c’est aussi cette capacité à bousculer, à faire évoluer nos idées.
C’est là qu’intervient notre responsabilité, et notre potentiel à créer notre propre monde.

Question déterminisme, j’apprécie l’idée de déterminisme réciproque (Albert Bandura) qui établit la distinction entre environnement potentiel et réel : bien que toutes les personnes puissent avoir le même environnement potentiel, chacune régule en réalité son environnement. L’environnement créé par chaque individu influence à son tour les comportements ultérieurs. La bi-directionnalité de l’influence signifie aussi que les personnes sont à la fois produits et productrices de leur environnement. Dans cette approche, une place importante est accordée aux facteurs cognitifs, ceux-ci pouvant influer à la fois sur le comportement et sur la perception de l’environnement.
Le comportement d’un individu peut affecter sa façon d’expérimenter l’environnement à partir de son attention. Ainsi, à partir d’une vaste gamme de possibilités, l’individu choisira ses interactions et ses activités selon ses préférences et ses compétences. La capacité d’influencer son propre destin, tout en reconnaissant que tout individu est soumis à certaines règles, s’inscrit dans cette influence bidirectionnelle. Les individus ne sont ni esclaves de leurs pulsions, ni jouets de leur environnement (théorie sociale cognitive).

Ensuite, nous devons bien reconnaitre que certains principes de psychologie (cohérence, réciprocité, sympathie, autorité, rareté) sont indispensables à la vie sociale et ont leur fonction en société. Très régulièrement chacun de nous suit ces principes de manière automatique, et cela est finalement positif pour le groupe et pour nous. Le problème est quand ces principes sont détournés par certains individus (par exemple dans la vente), pour sciemment amener l’autre au consentement (à dire oui à travers des techniques organisées). Dans ce cas, il me semble que c'est l'attention (plus que la conscience) qui peut nous aiguiller vers plus de lucidité face à de telles manœuvres.


La liberté d'être, il me plait de l’appréhender comme une disposition à adopter une forme de curiosité inventive, en cherchant ses propres réponses sensibles. C’est en ça que les émotions (et notre disposition sensible), il me semble, participent à la liberté (elles sont en quelque sorte notre moteur d’existence).
Mais, je ne nie pas non plus que nous devons rester attentif à ce que les représentations ne les amplifient pas, ne les éternisent pas, au point d’en devenir esclave.

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