La philosophie comme thérapeutique

l'Humanité, L'Existence, la Métaphysique, la Guerre, la Religion, le Bien, le Mal, la Morale, le Monde, l'Etre, le Non-Etre... Pourquoi, Comment, Qui, Que, Quoi, Dont, Où...?
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moussaillon
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par moussaillon »

Euthyphron a écrit :Pour la seconde, la timidité, les raisons peuvent en être très différentes, de la simple peur d'être mal jugé par quelques crétins prétentieux à la pudeur de révéler quelque chose de profondément soi. La philosophie souffre ici du même toxique que l'art : on a pris l'habitude de considérer que de l'art (ou de la philosophie) pratiqué à l'humble petit niveau d'un débutant ce n'était pas de l'art (ou de la philosophie), et on a eu bien tort, en oubliant la richesse que présente le fait d'être pour tous, pour tout être humain qui le souhaite pourvu qu'il dispose du temps nécessaire. Je rêve d'une société où tout être humain aurait la disponibilité suffisante pour pratiquer à ses heures art et philosophie. C'est d'ailleurs, pour tout dire, mon seul côté marxiste.
Te lire m'a fait penser à des objections qu'auraient eues certains philosophes par rapport à cette idée que philosopher puisse être profitable à tout le monde et que chacun serait capable de philosopher. Je les cite en spoiler au cas où cela intéresserait quelqu'un.
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Je suis convaincu que les penseurs sont des accidentés de la vie – que ce soit un deuil, une maladie invalidante, une incapacité à se sentir bien en société... - qui se retrouvent en position de spectateurs. Ils ont perdu en grande partie leur volonté de participer au monde et, pour tenter de guérir leur chagrin ou combler leur solitude, ils recherchent sans relâche le sens caché de ce qui arrive. Ils jouent aux alchimistes, ils veulent trouver une explication au fait que la réalité se soit trompée, qu'elle ait trahi leur volonté de sens, que l'univers reste silencieux à leurs peines et indifférent à leur existence (ou alors ils restent pessimistes, c'est-à-dire des idéalistes déçus).
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Autrement dit, je crois que la philosophie c'est un sport de frustrés, et que tant qu'on est dans le bouillonnement de la vie, avec la part de naïveté (positive !) que ça implique, on n'a pas spécialement intérêt à philosopher.

Je vais reparcourir tout le sujet pour essayer de le comprendre et de réagir plus à-propos. Là, c'est seulement à la lecture d'un passage que j'ai voulu retrouver quelques idées qui me semblent en lien, mais il se peut que j'aie mal compris, mal interprété. Il faudra me dire si je suis HS avec ce message-ci. :-)

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Kliban
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Kliban »

Il existe quelque chose qui se présente plus directement que la philosophie comme une thérapeutique de l'âme, et c'est la religion, qui donc pourrait entrer en concurrence avec la philosophie, voire la rendre inutile. Ce n'est pas par hasard que tu parles d'un moine zen. Alors, est-ce que cela exclut la démarche philosophique? Je ne crois pas.
Je ne parlerais pas d'exclure la philosophie. L'appétit de l'intellect pour les questions fait qu'il n'est aucun domaine où la philosophie ne s'introduise. Ce qui ne signifie pas qu'elle y soit toujours efficace, ni même pertinente. A chaque domaine ses façon de faire.

Cela dit, il n'est pas que la religion qui lui fasse concurrence. L'art le peut encore. Et simplement un art de vivre. Cela dit, si, reprenant le sens antique, on entend par "philosophie", un certain art de vivre qui sait faire chemin dans la violence des passions humaines (par exemple), alors certaine religion est philosophie. De façon à ne pas trop étendre le champ, je garde, dans ces conversations, cette idée que la philoosphie conserve un lien fort avec une pratique discursive, argumentative ou conceptuelle. En ce cas, oui, je connaît des gens pour qui elle n'est d'utilité qu'accessoire, voire totalement inutile.
Je crois plutôt que les moines zen aiment beaucoup méditer à partir de paradoxes, comme les philosophes. Je crois même que si un moine zen tenait le discours que tu lui prêtes à propos de la philosophie, il viserait la philosophie occidentale de 1637 (date de parution du Discours de la Méthode de Descartes) jusqu'à disons la fin de la première guerre mondiale, plus tout ce qui depuis continue à s'en inspirer. C'est la période de loin la plus étudiée à l'université, mais ce n'est pas le tout de la philosophie. Et j'oserais la caractériser en disant que c'est la période où les philosophes se sont cru investis du devoir d'apporter la vérité au monde; l'erreur qui fait se gausser notre moine est peut-être là
Ah ! :) Le sens du zen, c'est de s'asseoir en zazen :lol: et c'est tout. Je ne lui prête pas de discours ouh lala, je me prendrais un coup de bâton ou un poème, ... ou un éclat de rire.
Le koan, pour ce que j'en comprends, est d'abord un exercice de frustration de l'intellet. Il n'a pas de réponse sinon celle que la maître valide parce qu'il saisit dans son disciple que la réponse qu'il lui fait jaillit de la spontanéité du vide, et non de l'agilité d'un esprit bien fait. Si tu appelles cela "philosopher" - cet exercice accessoire et vide (ne produisant aucune pensée réutilisable) qui permet de progresser plus vite dans la pratique de la méditation jusqu'à l'installer en dehors des périodes de zazen, jusqu'à faire zazen de ces période où lon est pas assis - alors je puis admettre qu'à l'occasion, oui, le moine zen philoosphe. mAIS Bien des maîtres zen ont enseigné à coup de bâton. Bien des sages ont transmis dans le silence. Bien des mystiques, parlant, se sont dits blasphémer tant la parole n'était rien au regard de l'expérience. Philosophie encore ? Je ne sais pas. Tu diras ?

Bien sûr, tout ceci est loin de nos expériences quotidiennes, et désormais de nos cultures. Plus près de nous, j'y reviens, il est des artistes, qui trouvent dans leur art suffisamment de matière pour n'avoir pas besoin de mots (et je prends à dessein des exemples où les mots disparaissent, on pourrait étendre tout ça aux champs du langage). Philosophie, encore ? Peut-être. Mais alors, vraiment, il nous faut définir ce mot :)
De main gauche à main droite, le flux des savoirs - en mes nuits, le règne du sans-sommeil - en mon coeur, ah, if only!, le sans-pourquoi des roses.

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Euthyphron
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Euthyphron »

moussaillon a écrit :Je suis convaincu que les penseurs sont des accidentés de la vie – que ce soit un deuil, une maladie invalidante, une incapacité à se sentir bien en société... - qui se retrouvent en position de spectateurs. Ils ont perdu en grande partie leur volonté de participer au monde et, pour tenter de guérir leur chagrin ou combler leur solitude, ils recherchent sans relâche le sens caché de ce qui arrive. Ils jouent aux alchimistes, ils veulent trouver une explication au fait que la réalité se soit trompée, qu'elle ait trahi leur volonté de sens, que l'univers reste silencieux à leurs peines et indifférent à leur existence (ou alors ils restent pessimistes, c'est-à-dire des idéalistes déçus).
C'est ce que l'on appelle une généralité. Mais il est remarquable qu'on ne peut dire sans contradiction que toute généralité est fausse, il faut donc l'examiner.
Le problème est de savoir à partir de quand on est un accidenté de la vie. Si le simple fait d'avoir connu la souffrance suffit, alors le penseur est un accidenté de la vie, mais cela ne le caractérise pas. Il faudrait donc supposer quelque chose d'exceptionnel, qui se traduirait d'après ton message par une impuissance à vivre.
Comment alors comprendre qu'un traumatisme profond produirait une richesse créatrice totalement hors de portée de ceux qui ne l'ont pas vécu? Quel est cet accident miraculeux qui rend intelligent?
A moins que tu ne veuilles dire le contraire, qui serait que tous les philosophes sont bêtes, car infirmes?
Mais alors, quel est le statut de celui qui pense la même chose que toi, se faisant ainsi une idée du sens de la vie? Est-il infirme puisqu'il pense, ou bien non pensant puisqu'il vit la vraie vie?
En fait, on voit mal à quelle réalité correspond ce que tu imagines, connais-tu de ces infirmes imbéciles géniaux dont tu parles? Ou bien si ce n'est par expérience, est-ce en vertu d'une déduction logique, qui commencerait par postuler que pour vivre il faut surtout ne pas penser? Ou bien est-ce par ouï-dire, est-ce un effet de lectures nietzschéennes par exemple (Nietzsche ayant d'ailleurs raté sa vie autant qu'on peut)? Bref, comment le sais-tu?


Kliban,
non je ne prétends pas que tout est philosophie, mais que la philosophie peut trouver sa place partout, c'est-à-dire à peu près la même chose que toi si j'ai bien compris. Et je suis d'accord évidemment pour dire que dans certaines circonstances il y a mieux à faire que philosopher. Enfin, et surtout, je suis d'accord pour relier philosophie et discours. Il n'y a philosophie que s'il y a tentative de formulation de ce que l'on pense.
Donc, un mystique ne fait de la philosophie qu'en dehors de ses états d'extase (s'il en éprouve), mais il peut en faire. Et un artiste n'est pas un philosophe (sauf peut-être à ses moments perdus) mais je ne vois pas en quoi ce serait un problème ni pour lui ni pour son public ni pour les philosophes amateurs.

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moussaillon
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par moussaillon »

Euthyphron a écrit :Le problème est de savoir à partir de quand on est un accidenté de la vie. Si le simple fait d'avoir connu la souffrance suffit, alors le penseur est un accidenté de la vie, mais cela ne le caractérise pas. Il faudrait donc supposer quelque chose d'exceptionnel, qui se traduirait d'après ton message par une impuissance à vivre.
Comment alors comprendre qu'un traumatisme profond produirait une richesse créatrice totalement hors de portée de ceux qui ne l'ont pas vécu? Quel est cet accident miraculeux qui rend intelligent?
A moins que tu ne veuilles dire le contraire, qui serait que tous les philosophes sont bêtes, car infirmes?
Mais alors, quel est le statut de celui qui pense la même chose que toi, se faisant ainsi une idée du sens de la vie? Est-il infirme puisqu'il pense, ou bien non pensant puisqu'il vit la vraie vie?
En fait, on voit mal à quelle réalité correspond ce que tu imagines, connais-tu de ces infirmes imbéciles géniaux dont tu parles? Ou bien si ce n'est par expérience, est-ce en vertu d'une déduction logique, qui commencerait par postuler que pour vivre il faut surtout ne pas penser? Ou bien est-ce par ouï-dire, est-ce un effet de lectures nietzschéennes par exemple (Nietzsche ayant d'ailleurs raté sa vie autant qu'on peut)? Bref, comment le sais-tu?
Je n'avais pas en tête cette considération binaire selon laquelle les personnes enclines à philosopher (terme pompeux pour dire "réfléchir sur son rapport au monde") seraient soit intelligentes soit stupides. Pas plus que je ne pense que les philosophes disposent d' "une richesse créatrice totalement hors de portée" des autres. Ni que souffrir rende intelligent.

Je ne te suis pas du tout. :^)

En réalité, j'ai cité des auteurs parce qu'ils me parlent et que du coup je partage leur avis sur le sujet (c'est même eux qui ne sont pas loin de m'avoir donné un avis sur le sujet, car je ne pense pas être du niveau des personnes que je lis et considère comme des inspirations pour leurs idées et leur clarté (raison pour laquelle je me suis passé de citer Nietzsche :lol: )). Le petit paragraphe que j'ai écrit est un résumé (en partie (le reste, c'est mon avis ou encore un résumé d'autres lectures ;) )) de ce que j'ai lu et cité, et je veux bien admettre qu'il est possible que je n'ai pas tout à fait bien lu, mais c'est étrange que tu me demandes ce que je suis parti imaginé alors que justement j'ai signalé que j'avais mis ces citations car c'est cela que m'a évoqué le sujet. Mon petit paragraphe venant à la suite des citations, je croyais évident que les lecteurs comprennent qu'il avait un rapport avec celles-ci. Un message est à lire en entier pour être bien compris, non ? (Dis-je alors que je n'ai pas lu tout le sujet :-) (je l'avais indiqué dans mon premier message, d'ailleurs, en précisant que je pouvais être à côté de la plaque...)). Bref, disons que je suis effectivement à côté de la plaque. Pardon.

Tant pis, A+

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Euthyphron
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Euthyphron »

Il est effectivement possible de réfléchir à la pensée d'un auteur et dans ce cas il est certainement préférable de le citer, mais l'idée pour ce faire d'en citer cinq en même temps qui ne disent pas la même chose ne me seraient pas venue à l'esprit je l'avoue. Et comme de plus tu as présenté ces citations en spoiler, il m'a semblé évident qu'elles n'étaient là que pour illustrer ton propos à toi.
C'est pourquoi j'ai questionné ton propos à toi, étant par surcroît incapable de discuter avec les morts, afin de savoir s'il y avait quelque chose derrière, ou pas. C'est tout. Par principe je réponds à tout le monde, sauf à ceux dont je ne comprends rien à ce qu'ils racontent ce qui n'est pas ton cas. J'ai peut-être tort.

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moussaillon
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par moussaillon »

À Euthyphron, et sous spoiler, car sans grande importance :
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Zéphyr
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Zéphyr »

Il y a eu beaucoup de réponses, vous m'avez déjà perdu. Du coup, je vais juste essayer de répondre aux questions d'Euthyphron (c'est pas que je snob les autres, c'est juste que je ne m'en sens pas capable :$ , et puis je viens de passer l'après midi à faire ce message alors je m'arrete là :lol: ).
Euthyphron a écrit :Je me demande alors à partir de quand tu as le sentiment d'avoir répondu à une question!
Heu... Jamais ? :tmi:
Je ne pense pas un jour arriver à trouver une réponse. En ce moment (ben oui, ça change très souvent, c'est toujours en mouvement dans ma tête, il n'y a rien de figé), je ne pense pas qu'il n'y a qu'une seule réponse, je pense qu'il y a autant de réponse qu'il y a d'être humain. Je trouve des morceaux de réponses de temps en temps, des pistes, des petites idées qui pourraient avoir leur place dans le "tout". Mais je n'aurais pas la prétention de dire que c'est la réponse. Juste que ces début d'idées me permette de m'apaiser et de vivre en paix avec ces questions, de moins en souffrir.
Euthyphron a écrit :Quelqu'un qui est capable de vider tout le monde superflu dans une soirée étudiante sans la moindre violence est forcément quelqu'un de précieux!
À l'époque, je cherchais plutôt à me faire des amis :D Et parmi ceux qui ont fui, il y en a, avec qui j'ai pu avoir des discussions très interressantes par la suite ;)
Euthyphron a écrit :Je trouve qu'il y a un paradoxe qui mérite d'être regardé d'un peu plus près dans ce que tu dis : tu sembles avoir vraiment peur de ne pas être suffisamment érudite pour pouvoir t'exprimer de façon intéressante, comme s'il n'y avait que l'érudition qui puisse intéresser. Tu ressens le manque de connaissances comme un obstacle terrible, là où justement ces connaissances ne sont pas nécessaires.
Ben voui, mais les messages arrivés depuis m'ont perdu, et je n'ai pas forcément l'envie de faire une recherche sur tous les termes que je ne comprend pas, j'en aurais pour bien trop longtemps. Du coup, je lis en diagonale, sans approfondir, et je ne suis pas capable de répondre. Pour expliquer leurs idées, et au passage raccourcir les messages, les différents intervenants utilise des références à différents courants de pensée. Je n'ai pas le courage de m'y plonger pour arriver à comprendre les messages ici. Du coup, si je ne fais pas cet effort, ça ne sert pas à grand chose de vouloir rejoindre un cercle de philosophe, car je serais autant perdue. Et puis ma façon de réfléchir n'est pas aussi structurée. Je me laisse porter par mes réflexions, je ne les dirige pas. Ils y en a beaucoup que je "ressens", mais que je n'ai pas envie de réduire à des mots. D'autre qui se ballade en arrière plan mais sur lesquelles je ne suis pas capable de mettre la main. Je sais juste qu'elles sont là, et quand j'en aurais besoin (je ne sais pas quand), elles seront prètes à sortir. Je ne veux pas me forcer à leur donner une forme pour les montrer aux autres.
Et il y a aussi le fait qu'expliquer ces pensées, c'est m'exposer énormément, me mettre à nue. Et je ne suis pas prête à le faire devant n'importe qui (besoin de me protéger). C'est clairement de la peur de l'autre, du jugement.
Mais ça n'empêche pas que je vais continuer à vous lire avec plaisir, j'apprendrais surement plein de choses :vgeek: . Je vais vous lire et laisser mes pensées gamberger toute seules :wasntme: Peut-être que quand elles auront bien couru, je pourrais mieux répondre à Euthyphron... :rock:

Au passage, merci Lady Space, ton explication sur ce qu'est la philosophie m'a bien aidé :-) .

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madeleine
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par madeleine »

je voudrais à mon tour questionner ce que tu mets derrière "thérapeutique", Eutyphron, est-ce l'aspect artistique du soigner, la philosophie comme "art-thérapie" ?
Et pourquoi ce lien avec le soin, qui n'est pas évident à mes yeux ? Les questionnements relèveraient-ils d'une pathologie ?
le chemin est long et la pente est rude, oui, mais le mieux, c'est le chemin, parce que l'arrivée, c'est la même pour tout le monde... Aooouuuh yeaah...
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Euthyphron »

A vrai dire, Madeleine, je ne mets rien derrière le mot "thérapeutique", rien d'autre que le sens trivial du terme. Je veux dire que la philosophie peut faire du bien, voire produire une forme de guérison si l'on est en situation pathologique, pas à l'aise avec soi-même et sa propre intelligence.
Cela ne signifie pas que la philosophie serait réservée aux malades. Ni aux malades, ni à quelque catégorie que ce soit. Il est sans doute vrai que les épreuves de la vie conduisent à réfléchir, mais tout le monde en a subi je crois. C'est bien dans l'autre sens que j'envisage la philosophie comme thérapeutique, c'est-à-dire non pas au sens où les philosophes seraient des malades mais au sens où certains troubles, en particulier de ceux qui affectent ordinairement les personnes dites à haut potentiel, pourraient être soignés par la pratique de la philosophie, simple hypothèse qui m'intéresse en raison de ce qu'elle a de personnel, parce que pour moi "ça a marché".
Il y aurait une double idée derrière cette hypothèse : 1) pour se soigner, mieux vaut quelque chose qui soit de l'ordre du faire qu'un éternel diagnostic ou qu'une éternelle description de soi-même. 2) parmi les actions possibles, l'exercice de la philosophie, en raison du bien qu'il procure à l'intelligence, est tout indiqué.
Je ne songeais donc pas à une forme spéciale de thérapie à breveter qui s'inspirerait de la philosophie, mais bien à la pratique ordinaire, normale, de la philosophie (oui, je sais que je ne l'ai pas définie :-) ), sans différence entre bien portant et malade (surtout pas!) dont un des effets collatéraux pourrait être de s'apercevoir qu'entre un surdoué et un individu ordinaire la différence n'est pas si grande qu'on ne puisse au moins discuter.
Zéphyr,
je crois comprendre ce que tu veux dire quand tu dis qu'exposer ses pensées c'est comme se mettre à nu, et tu m'aides à voir plus clair dans ce que j'ai dit (ce qui est ce que je cherche en priorité, pour répondre à Moussaillon tout en respectant sa volonté que je ne lui réponde plus) dans ce qui fut mon premier point : réfléchir pour le plaisir sans la pression de l'urgence. On peut dire en effet ce que tu as dit (exposer ses pensées c'est se mettre à nu) mais aussi bien tout le contraire : réfléchir n'engage à rien, et l'on peut penser avec rigueur et intérêt tout à fait en dehors de ses préoccupations intimes, quitte à les retrouver par des détours surprenants.

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Riffifi
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Riffifi »

Euthyphron a écrit : Il y aurait une double idée derrière cette hypothèse : 1) pour se soigner, mieux vaut quelque chose qui soit de l'ordre du faire qu'un éternel diagnostic ou qu'une éternelle description de soi-même. 2) parmi les actions possibles, l'exercice de la philosophie, en raison du bien qu'il procure à l'intelligence, est tout indiqué.
En-dehors de mon envie de te voir développer le point 1 (ce serait quoi, concrètement, un éternel diagnostic ou une éternelle description de soi-même ?), je suis personnellement d'accord avec le constat : faire peut soigner (sachant que parfois diagnostiquer est un véritable acte).


J'apporte mon grain de sel car cette phrase met le doigt (si je puis dire) sur quelque chose qui me chatouillait depuis le début de ce sujet.
Dans les actions possibles, les réponses déjà données dans ce sujet en ont évoqué des différentes : la philosophie, l'art, la religion, l'immersion dans le "bouillonnement de la vie"... Pour toi Euthyphron, l'exercice de la philosophie est "tout indiqué".
J'ai du mal à percevoir le bien que ferait particulièrement la philosophie à l'intelligence, et du coup la dimension thérapeutique. En ce qui me concerne la pratique philosophique fait travailler l'intelligence, oui, peut mener à une compréhension et une attitude différente, aussi, mais pas de manière plus forte que des approches liées aux sciences humaines par exemple.
Je ne vois pas de spécificité de la philosophie pour cela et pour moi elle est loin d'être "tout indiquée".

Par ailleurs pour soigner, pour faire du bien à l'intelligence, pour ouvrir sa compréhension, je conçois mieux, et c'est probablement très personnel, d'intégrer des perceptions (science, art, vie quotidienne aussi...) plutôt que d'approfondir des réflexions.

Par rapport à ce que disent Zéphir et Euthyphron, je vois moins l'exposition de sa réflexion comme une mise à nu que comme une construction, justement pas pour le simple plaisir. Partager une réflexion avec quelqu'un, ce n'est pas avoir une réflexion gratuite, et c'est peut-être ça qui peut créer une appréhension.
Où que tu sois, creuse profond. En bas, c’est la source.
Laisse les hommes noirs crier : « En bas, c’est toujours l’enfer".

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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Euthyphron »

Riffifi a écrit : En-dehors de mon envie de te voir développer le point 1 (ce serait quoi, concrètement, un éternel diagnostic ou une éternelle description de soi-même ?), je suis personnellement d'accord avec le constat : faire peut soigner (sachant que parfois diagnostiquer est un véritable acte).
Mon propos est un peu ambigu, je le reconnais , car on pourrait l'interpréter comme une allusion critique, alors qu'en réalité je ne visais personne, mais j'ai laissé transparaître ma grande méfiance à l'égard de la question "qui suis-je?". Un diagnostic n'est d'ailleurs pas forcément une réponse à cette question, il me semble.
Riffifi a écrit :J'ai du mal à percevoir le bien que ferait particulièrement la philosophie à l'intelligence, et du coup la dimension thérapeutique. En ce qui me concerne la pratique philosophique fait travailler l'intelligence, oui, peut mener à une compréhension et une attitude différente, aussi, mais pas de manière plus forte que des approches liées aux sciences humaines par exemple.
Je ne vois pas de spécificité de la philosophie pour cela et pour moi elle est loin d'être "tout indiquée".
Tout d'abord, cela va sans dire mais peut-être mieux en le disant, conseiller la philosophie ne veut pas dire déconseiller tout le reste. Je rappelle aussi que j'ai revendiqué le caractère subjectif de ce topic. Je conseille la philosophie parce que je connais ses effets positifs, ce que je ne connais pas je laisse évidemment d'autres en parler.

Mais la spécificité de la philosophie c'est de ne pas être une science, tout en étant une recherche rigoureuse de la vérité. Je crois qu'elle est seule à concilier ces deux caractéristiques.
Si les hommes pratiquent la philosophie, c'est parce qu'ils ne savent pas ce qu'ils pensent et ne comprennent pas ce qu'ils disent. Entendons-nous bien : ils ne sont pas complètement ignorants non plus, ce n'est pas ce que je veux dire. Mais bon, supposons que tu me demandes ce que je pense, sur ce que tu veux, la philosophie par exemple, eh bien j'en fais l'expérience en ce moment même, je ne suis pas totalement ignorant du sujet mais au moment où tu poses la question je ne sais pas ce que je vais dire ni encore moins ce que je devrais dire pour être pleinement satisfait de ma réponse.
La philosophie est donc l'art d'élucider ses propres pensées. On peut préférer d'autres activités, mais celle-ci entretient un rapport à soi qui me paraît sain, et essentiel.
Riffifi a écrit :Par rapport à ce que disent Zéphir et Euthyphron, je vois moins l'exposition de sa réflexion comme une mise à nu que comme une construction, justement pas pour le simple plaisir. Partager une réflexion avec quelqu'un, ce n'est pas avoir une réflexion gratuite, et c'est peut-être ça qui peut créer une appréhension.
La possibilité de remuer des choses capitales peut créer l'appréhension, mais la liberté de réfléchir sans la pression de l'urgence ou du résultat peut être libératrice et désinhibitrice, les deux sont vrais il me semble. Et prendre l'habitude de réflexions libres et désinhibées peut aider progressivement à vaincre l'appréhension.

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madeleine
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par madeleine »

Merci de ta réponse, Eutyphron :-)
Je me suis permis d'intervenir parce que l'usage du mot thérapeutique, dans ce contexte et dans tout autre, fait référence à la guérison d'une maladie, trivialement défini ainsi par le Larousse. Il ne s'agit pas de "faire du bien", dans le sens couramment admis de ce mot. L'usage que tu en fais me paraît clairement introduire un biais ; non pas que je dénie à la philosophie ou à quoi que ce soit d'autre la capacité à favoriser une guérison, je souhaitais élucider la direction que tu souhaites donner à ce post, s'il s'agit d'un éventuel débat sur la capacité de la philosophie à guérir (de quoi ?), s'il s'agit même d'un débat. En somme, si le centre de gravité est plutôt côté philosophie ou côté thérapeutique.
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Euthyphron »

Il est clair que je ne demande pas aux philosophes d'organiser une concurrence aux psychiatres, qui serait déloyale. Si thérapie philosophique il y a (et je crois que cela peut exister, l'ayant vécu) ce ne saurait être que dans un cadre non médical. Donc, c'est peut-être ce que tu veux dire, le mot apparaît mal choisi, la philosophie n'étant un remède que secondairement, car on la cultive pour elle-même et non pour en tirer un bénéfice extérieur, mais c'est peut-être aussi pour cela, justement, qu'elle est bénéfique.
Car je ne veux pas non plus seulement dire que la philosophie fait du bien, en général. Il me semble qu'elle est particulièrement adaptée aux souffrances psychologiques liées à la douance, si l'on part du postulat que celles-ci tiennent à la difficulté qu'il y a à épanouir son intelligence dans la relation à autrui (difficulté qui peut aussi concerner des personnes ordinaires, mais peut-être pas de la même façon).
Je ne peux donc pas répondre à ta question qui demande si l'accent est sur philosophique ou sur thérapeutique, ma question étant sur le rapport entre les deux. C'est à chacun des participants de déplacer le centre de gravité selon ce qu'il juge bon.

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Roka Ouran
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Roka Ouran »

Salut.
Je trouve le sujet intéressant.

Pour reprendre l'idée que "faire peut soigner", ça me fait penser à Bachelard (la Terre et les rêveries de la volonté pour être précis).

"Qu'on ne s'étonne donc pas que rêver d'images matérielles - oui, simplement les rêver -, c'est aussitôt tonifier la volonté" (p28 corti, 2004)

Le travail avec une intention est complètement différent de l'action gratuite. Avec l'intention, c'est l'imagination qui projette de dominer la matière.

"Dans la solitude active, l'homme veut creuser la terre, percer la pierre, tailler le bois. Il veut travailler la matière, transformer la matière. Alors l'homme n'est plus un simple philosophe devant l'univers, il est une force infatigable contre l'univers, contre la substance des choses." p34

En l'occurrence, j'espère ne pas caricaturer sa pensée, mais ce que j'en ai retenu c'est plutôt qu'il opposait le faire matériel au travail intellectuel ; et que si l'action sur la matière a une action libératrice sur la psyché, ce n'est pas le cas du travail intellectuel :
"Le projet empenné par une jeune énergie se fiche droit dans l'objet, il s'y accroche, il s'y attache. Aussi le projet en voie d'exécution (le projet matériel) a, tout compte fait, une autre structure temporelle que le projet intellectuel. Le projet intellectuel, bien souvent, se distingue trop de l'exécution. Il reste le projet d'un chef qui commande à des exécutants." p28

et plus loin :

"Quand une matière toujours neuve en sa résistance l'empêche de devenir machinal, le travail de nos mains redonne à notre corps, à nos énergies, à nos expressions, aux mots mêmes de notre langage, des forces originelles. Par le travail de la matière, notre caractère se ressoude à notre tempérament. En effet, les exploits sociaux tendent le plus souvent à créer en nous un caractère opposé à notre tempérament. Le caractère est alors le groupe des compensations qui doivent masquer toutes les faiblesses du tempérament. Quand les compensations sont par trop mal faites, vraiment mal associées, la psychanalyse doit entrer en scène? Mais que de désharmonies lui échappent, du seul fait qu'elle ne s'occupe guère que des instances sociales du caractère ! La psychanalyse, née en milieu bourgeois, néglige bien souvent l'aspect réaliste, l'aspect matérialiste de la volonté humaine. Le travail sur des objets, contre la matière, est une sorte de psychanalyse naturelle. Il offre des chances de guérison rapide parce que la matière ne nous permet pas de nous tromper sur nos propres forces." p35


Ce n'est pas clair s'il inclut la philosophie dans le travail intellectuel, mais je pense que ce serait "oui" pour ce qui est de l'écriture construite d'un bouquin, mais pas forcément pour les idées à la base du questionnement.
Quand je lis La Terre et les rêveries de la volonté, il me paraît clair que ce qui guérit instantanément la psyché lorsqu'on frappe une pierre avec un burin, qu'on jette un caillou dans l'eau, qu'on façonne la glaise, qu'on surveille le levain... c'est bien la fulgurance philosophique qui apparaît à cet instant, la conscience que l'imagination et la force fusionnent pour nous faire exister en tant qu'être agissant sur la matière :

"Bien entendu, la volonté de travail ne peut se déléguer, elle ne peut jouir du travail des autres. Elle aime mieux faire que faire faire. Alors le travail crée les images de ses forces, il anime le travailleur par les images matérielles. Le travail met le travailleur au centre d'un univers et non plus au centre d'une société." p36

A mon avis, la pensée philosophique ne naît que dans l'action. Les concepts du philosophe naissent sur le vif, dans une situation, face à un obstacle, face à une observation.

Nietzsche a imaginé son concept de l'éternel retour alors qu'il marchait.

Je suis d'accord qu'il faut déjà philosopher soi-même pour qu'on puisse apprendre quelque chose des philosophes ; on apprend quelque chose lorsque qu'à la lecture d'une phrase une cloche retentit et qu'on se dit "mais oui !!". Ça me paraît impossible si on a une approche purement intellectuelle et consumériste de la philo.
On ne trouve que si on cherche...


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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Chacoucas »

Je pensais dire quelque chose du genre "mais la philo c'est comme la prose" on en fait surement tous, et renoncer à se questionner est probablement déjà un choix philosophique (même si peu conscientisé). Mais en fait ton intervention, Roka Ouran est juste cool ^^.
Ca fait plaisir de voir Bachelard se promener par ici.

Lord Arthur Savile
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Lord Arthur Savile »

Euthyphron a écrit :Aussi me posé-je la question de savoir si cette valeur thérapeutique de la philosophie est quelque chose qui m'est totalement personnel
Non, je me dis parfois - avec humour, certes - qu'il faut toujours avoir une bibliographie philosophique à la place d'une psychanalyse, d'un cacheton de deroxat ou d'un carré de chocolat pour se consoler. Vous perdez moins d'argent, de neurones et vous prenez moins de poids.

Si vous êtes seuls, par exemple, célibataires sans le vouloir:
Schopenhauer, Métaphysique de l'amour

Si vous n'étiez pas seuls, mais que votre ami/e vous a largué/e et que vous êtes désormais alcoolique:
Aristote, Éthique à Nicomaque

etc.

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O'Rêve
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par O'Rêve »

C’est un sujet qui m’inspire et m’intéresse particulièrement en ce moment :)

J’ai dernièrement lu un livre d’Irvin Yalom (déjà cité) : « Le jardin d’Epicure ». Selon l’auteur, l’approche existentielle est une des nombreuses approches de la psychothérapie, qui ont toutes la même raison d’être-soigner le désespoir humain. Ce qu’il définit comme la thérapie existentielle est fondé sur le principe, qu’outre les autres sources de désespoir, nous souffrons aussi de notre inévitable confrontation avec la condition humaine- les « données » de l’existence.
« Le jardin d’Epicure » aborde plus précisément l’angoisse de mort.
Je n’ai pas encore lu ses autres livres, mais j’ai pu comprendre que de son point de vue quatre préoccupations ultimes sont particulièrement pertinentes pour la pratique de la thérapie : la mort, l’isolement, le besoin de sens et la liberté. C’est dans son essai « Thérapie existentielle » que l’auteur parle en détail de ces différentes préoccupations.

Par ailleurs, je suis tombée sur une autre petite perle, un livre dont j’ai débuté la lecture tout récemment, vraiment intéressant. Il s’agit du livre de Laurence Boucher « Philosopher pour se retrouver ». Si le titre peut être repoussant (ça a été mon cas, je me suis dit au premier abord : « encore un de ces livres pour nous apprendre à être heureux, je passe… »). Et puis, je l’ai tout de même feuilleté et je me suis dit « quand même il a l’air d’aborder les choses sous un angle différent que celui de l’injonction du : soit positif, soit heureux ! » Alors je l’ai acheté et ne regrette absolument pas mon achat (pour le moment, car je n’en suis qu’au début).
Le livre de Laurence Bouchet propose une approche de la philosophie qui « me parle » : elle explique que dans son approche, il ne s’agit pas d’apprendre sur les auteurs et d’expliquer telle ou telle pensée afin d’ajouter une connaissance nouvelle. Elle souhaite inviter le lecteur à mettre en pratique la philosophie, à faire vivre ses idées en lui, à les questionner, à les expérimenter. Selon cet auteur, philosopher, ce n’est pas accumuler des connaissances sur les philosophes, lire tous leur livres, ce n’est pas seulement mettre en œuvre certaines compétences intellectuelles s’appuyant sur la raison. Philosopher, c’est d’abord et avant tout se lancer dans une quête existentielle, une recherche exigeante d’authenticité et de vérité. La philosophie est une pratique vivante sur soi et en lien avec les autres (on se construit en se confrontant avec l’altérité) et non une pure théorie coupée de la réalité.
L’auteur développe l’idée que c’est une pratique qui implique un travail sur soi, le développement de compétences ou savoir-faire (analyse, synthèse, argumentation, mise à jour des présupposés, problématisation, conceptualisation…) et des attitudes philosophiques ou savoir-être dans une confrontation à l’altérité (authenticité, engagement, capacité à sortir de sa zone de confort). De plus, en travaillant sur les attitudes, on peut apprendre à observer ce qui empêche le développement de compétences (ex : la peur de paraître idiot, le désir d’avoir raison…)

L’auteur évoque les formes que peuvent prendre la pratique philosophique.
Elle évoque l’atelier philosophique comme un lieu permettant à chaque participant, en se confrontant aux autres de développer des compétences et des attitudes qui lui seront bénéfiques dans la cadre de la pratique philosophique mais également dans sa vie quotidienne.

Une autre forme est la consultation philosophique. La consultation doit nous amener à plus de lucidité sur nous –même, non pas pour nous procurer avant tout du bien-être (en cela l’auteur écrit que la consultation philosophique diffère du développement personnel), mais afin d’assumer avec le plus d’authenticité possible nos choix et donc notre liberté. La consultation philosophique peut avoir pour conséquence d’apaiser un certain mal être du à la confusion, à l’énergie inutilement dépensée, à la difficulté d s’engager dans ses choix et par conséquent d’agir mais elle n’a pas d’abord pour but d’apaiser ou de guérir des souffrances.
Ainsi la consultation s’adresse à tous ceux qui désirent acquérir la sagesse et sont conscients de ne pas la posséder (on en revient à l’étymologie du mot philosophie qui signifie amour de la sagesse).
L’auteur mentionne que la consultation philosophique se rapproche de ce que Sartre définissait comme la psychanalyse existentielle. Mais en consultation philosophique, il n’est pas question de faire revenir au jour ce qui serait dissimulé dans l’inconscient. La consultation philosophique utilise les compétences philosophiques (citées un peu plus haut), elle ne s’élabore pas sur une parole libre et sans retenue, mais sur des réponses à des questions précises posées par le philosophe consultant. Le philosophe remarque une attitude, souligne les contradictions, fait passer du général au particulier et du particulier au général, il met en confrontation ce que disent les paroles et les expressions du corps, ce qui est affirmé et ce qui est montré. En consultation philosophique (à la différence de la psychanalyse par exemple), il s’agit de penser ce que l’on dit et non de dire tout ce que l’on pense.

A la lecture de ces deux livres, très différents, j’ai le sentiment qu’il existe différentes façons de s’approprier la pratique philosophique selon les objectifs du professionnel:
-La thérapie existentielle, pratiquée par des soignants (ex : Irvin Yalom, psychiatre) qui a pour but de soigner le désespoir humain
-La consultation philosophique (ex : Laurence Bouchet, philosophe) qui n’a pas pour but de guérir des souffrances mais qui nous conduit vers plus de lucidité

Rostay
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Rostay »

Bonjour à tous !
Je pense qu'il est important de distinguer l'introspection de la philosophie.
Ce qui répondrait aux personnes qui ne pensent pas réellement faire de la philosophie mais "gamberger" (pour Cyrielle) ou autres. Car, en soit, je pense que beaucoup plus de gens sont enclin à l'introspection (méditation profonde interne) qu'à la philosophie qui tend vers une réflexion beaucoup plus universelle sur des sujets communs. Néanmoins, l'une amène à l'autre, et, elle semble presque indissociable. Car la philosophie nécessite une approche réaliste et impartiale, or qui peut avoir ses qualités s'il ne fait pas au préalable un travail sur lui-même ? De plus, les premières questions existentielles nous viennent d'abord dans la phase d'introspection ("Qui suis-je ?" qui deviendra ensuite "L'homme est-il ?"). Mais notre vision biaisée de nous-même et de notre réalité ne peuvent pas permettre une bonne approche de la philosophie car notre pensée est encore trop brimée et restreinte.

Sinon, j'ai toujours songé que la philosophie était ce qui pourrait sauver le devenir de l'humanité. L'homme passe moins de temps à réfléchir à sa vie, et, encore moins à celle de l'humanité. Je rejoins l'idée d'une personne sur ce topic qui a dit qu'elle était "marxiste sur ce point" (j'écris vite ce message, j'ai retenu les citations mais pas les noms, mille excuses !). Dans mes souvenirs, on peut relier ce texte issu du Contrat Social, avec De la démocratie en Amérique de Tocqueville. Car, il n'y a pas QUE le problème de la fatigue physique et psychologique du au travail qui limite les réflexions, mais aussi la course au bonheur matériel qui "amollissent les volontés particulières". L'homme se contente de se complaire dans une vie facile du à l'ingérence de l'état dans leur affaire. Ils lui délèguent les tâches des plus fastidieuses au plus faciles (héritage, justice...)
Ainsi, de mon point de vu, les hommes ne font que jouer le rôle d'homme mais ne l'assume pas. Très peu sont capables d'expliquer pour quelles raisons voler c'est mal, tuer quelqu'un c'est mal. Et ils savent encore moins ce qui en découle.

Ensuite, on est très peu éduqué à penser, pour moi, il est important d'avoir des bases philosophiques. Non pas pour copier, s'inspirer, non non. C'est pour se rendre compte par soi-même qu'il y a divers avis, et que, par conséquence, on puisse avoir NOTRE avis. Un avis non endoctriné.
Or, les encadrements sont mauvais et trop tardifs. Apprendre ce genre de disciplines en terminal est trop tard... Par contre on nous apprendre l'éducation civique dès la 5ème, en nous disant "On ne vole pas, c'est la République". Nous acquérons des opinions (idée non fondée) plutôt que des avis constructifs et personnels.
J'ai eu la chance d'avoir une professeur de philosophie incroyable, intéressante, une femme juste, légitime, époustouflante. Mais je sais que beaucoup n'ont pas cette chance...
Ma classe de terminale était un ramassis des pires humains au monde (je vous trace, toute en satire quelques portraits (oui j'avais principalement des filles dans ma classe)) :
- une Barbie, plus jolie qu'intelligente mais qui aime Sartre car c'est cool
- une princesse, insolente et grande bouche, car parler pour ne rien dire c'est toujours constructif !
- une torturée, un génie incompris mais qui aime le faire comprendre, ses opinions sont indétrônables bien entendu
- une cultivée, qui pense que la philosophie on l'a dans le sang, mais la justice, la légitimité c'est...Relatif, non ?

Je me sentais rejetée parmi ces gens qui osaient dire ce qu'ils pensaient, ne se souciant des incohérences, des conséquences de leur dires, alors que leur propos n'étaient là que pour flatter leur égo : "Je parle donc je suis intelligente".

Plusieurs fois la philosophie est traînée dans la boue, par les scientifiques obtus qui pensent que la philosophie freine la "VRAIE" connaissance, par les adolescents trop ethnocentriques et narcissiques, n'arrivant guère à s'élever au delà de leur monde.

Alors, que je vois la philosophie comme une cure. Mon cerveau bouillonne quand je songe à ces questions, me sortant de ma torpeur du quotidien. La philosophie est une chose merveilleuse bien souvent sous-estimée, malmenée, oubliée.
Nous forçant à nous exclure de notre propre société, de nous cloître dans un silence mortel (car sans partage, que devient la philosophie ?)...

Je désespère parfois de ce monde, où la philosophie, la réflexion se plongent dans des abysses profondes. Quelques courageux s'obstinent à la secourir, mais il y en a si peu. Je ne trouve personne pour écouter et partager ces réflexions. Même sur ce forum, je ressens cette incapacité à partager. Alors, peut-être la philosophie devient dangereuse maintenant, elle enferme les gens, ça devient une drogue.
'La philosophie est l'opium des fous !" Qui vous dit que ce n'est pas nous qui nous trompons en voulant réfléchir ? Car, on est si peu et on se sent si isolé...
Au plaisir d'avoir une réponse, désolée pour la semi-déprime du soir !
^-^
Dostoeivski - Plus j'aime l'humanité en général, moi j'aime les gens en particulier.

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Roka Ouran
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Roka Ouran »

"Je parle donc je suis" elle est pas mal celle-là !

Je suis d'accord avec toi sur le distinguo entre introspection et philosophie, je me suis fait la remarque quelques messages plus haut avant de poster, et puis j'ai renoncé à aborder ce sujet, me disant que c'était indissociable : pour les raisons que tu cites (l'une est indispensable à l'autre) et aussi parce que la Philo des uns, avec un gros P (comme dans gros mot), n'est pour d'autres que lettre morte dans un livre, une connaissance figée que l'on se gargarise égotiquement de connaître. Dit autrement, l'introspection d'aujourd'hui est la philo de demain, la philo d'hier est le lieu commun d'aujourd'hui.

Je ne renie pas la possibilité de vraiment faire des découvertes philosophiques, avec un grand P (comme dans grande dame), mais je ne peux que constater avec toi que 1- beaucoup de gens interpréteront les philosophes dans un sens qui les rassure intellectuellement, et 2- la philosophie, telle que je la conçois, est un peu résistante à la fossilisation dans un bouquin : il n'y a qu'à voir les âneries écrites par Schopenhauer sur les femmes, ou certaines démonstrations bien foireuses de Kant ; la philo est souvent inscrite dans son temps et vieillit ; pour la rajeunir, il ne suffit pas de la lire, il faut qu'elle résonne en nous, qu'on se l'approprie, qu'on la mette à l'épreuve du feu.

Souvent, un livre nous touche parce qu'il traite d'un sujet qu'on avait déjà exploré par nous-mêmes. Il nous apporte juste la dernière pièce qui manquait à notre puzzle.
Quelqu'un qui lit le bouquin sans avoir gambergé du tout par lui-même, ne verra qu'un édifice entièrement constitué. Il pourra être d'accord ou pas (avoir une "opinion") mais difficilement justifier la cohérence d'ensemble, les rapports de force des concepts.
A moins que le bouquin ne soit spécifiquement un traité pour apprendre à penser par soi-même (quelqu'un connaît un philosophe qui aurait écrit ce genre de chose ??)

Je suis donc entièrement d'accord avec toi qu'il est complètement idiot de prétendre apprendre la philo à des terminales, ainsi qu'on gave des oies, alors qu'on sait très bien que c'est le moment le moins adéquat pour essayer de commencer à ouvrir l'esprit des jeunes : le cerveau est en pleine restructuration, la pression du BAC est à son maximum. C'est trop tard ou trop tôt.
Comme disait l'autre, si les anciens Grecs étaient encore vivants, ils se retourneraient dans leur tombe.
100% d'accord que ça devrait venir bien avant, de préférence avant la fin du collège.

Comment se fait-il que notre société considère que :
ou bien a) l'aptitude à penser par soi-même n'est pas suffisamment importante pour l'aborder aussi tôt que l'éducation civique, le dessin, la musique, la physique-chimie ou l'éducation sexuelle
ou bien b) les gamins sont trop stupides pour apprendre à penser par eux-mêmes tant qu'ils n'ont pas au moins 17 ans.

J'espère tout comme toi que la philosophie est ce qui sauvera le monde (la philo, l'imagination, l'humilité, et quelques autres mots incorrects).
Ta remarque sur les scientifiques qui pensent que la philosophie freine la "vraie" science est on ne peut plus juste, il y a heureusement quelques scientifiques qui ont appris à raisonner sainement mais ils sont trop peu. Pour en fréquenter beaucoup, je constate que la plupart d'entre eux a appris à considérer que la philo, et les sciences molles en général, c'est "du pipeau". Très peu sont capables d'avoir en eux les deux modes de pensée, scientifique et littéraire.

(parenthèse, un des déclics dans mon questionnement sur moi-même s'est produit lorsque, discutant de questions d'orientation avec un coach, je lui ai dit que j'avais quasiment toujours été autant scientifique que littéraire. J'avais ajouté "mais, il y en a plein d'autres qui sont comme moi". Il avait alors fait un geste de la main en souriant, exprimant que je me trompais probablement très lourdement sur ce point...)
Même sur ce forum, je ressens cette incapacité à partager. Alors, peut-être la philosophie devient dangereuse maintenant, elle enferme les gens, ça devient une drogue.
'La philosophie est l'opium des fous !" Qui vous dit que ce n'est pas nous qui nous trompons en voulant réfléchir ? Car, on est si peu et on se sent si isolé...
Tant de choses dans ces quelques phrases.
D'abord partage, partage ! Même si ça t'explose au nez, ce sera toujours une nouvelle expérience.
La philo, la vraie, celle où on réfléchit par soi-même, pas celle où on répète comme un perroquet, est subversive. Regarde Socrate. (oups, pas le meilleur exemple pour lutter contre la semi-déprime du soir !) Ca c'était un rebelle, c'est une autre trempe que Che Guevara quand même. ^_^
Krishnamurti (qui n'était pas le plus rigoureux des philosophes mais personne n'est parfait), a dit quelque chose du genre : "L'homme qui pense véritablement par lui-même n'est pas écouté. Parce qu'il représente un danger pour la société, la religion, les choses instituées".
Idem Spinoza (excommunié !) ou Nietzsche (brillamment incompris ^_^)...

Ouais, vouloir réfléchir, c'est à bien des égards prendre des risques.
Prendre le risque de découvrir qu'on est pas qui on croyait être. Pire : qu'on ne peut pas se définir à l'aide de juste quelques croyances, goûts personnels, appartenances à un groupe, à une culture...
Prendre le risque d'affronter la lucidité qui implique de devoir se définir seul, indépendamment de l'identification à d'autres
Prendre le risque de comprendre que les suppositions sur lesquelles se basent la vie quotidienne sont fausses
Prendre le risque de voir que le monde est toujours plus complexe qu'il en a l'air
Prendre le risque de s'égarer dans des doutes et des questionnements dont on pourrait se passer
Prendre le risque de faire fausse route
Prendre le risque de ressentir ses limitations
Prendre le risque de ressentir ses sentiments sans filtre

Mais, que de merveilles à l'arrivée !
Aucun mot, aucun concept ne peut décrire la félicité de ceux qui, timidement, s'approchent de la Vérité sans jamais pouvoir la saisir complètement... :inlove:

Donc la philo, c'est pas seulement des idées, des connaissances qui s'accumulent... Pour moi il y a un "saut" conceptuel à faire à un moment donné :
pour réfléchir en profondeur il faut laisser (au moins temporairement) une partie de la simplicité de la vie derrière soi (pour beaucoup d'entre nous, on a déjà du mal à voir de la simplicité dès qu'il s'agit d'interagir avec les autres donc... ce sacrifice est sûrement plus facile à faire, lol ;)
Cela veut dire investir de l'énergie dans des questions dont 9 sur 10 ne serviront à rien, sans application pratique ou des fausses routes ;

C'est comme partir sur son Drakkar parce qu'on sait qu'il y a une île pleine de figues, de vin et inondée de soleil derrière l'océan rageur, pendant que les autres restent au chaud dans leur village.
Ouais, il y a une chance pour que ce soient nous les inconscients.
Mais il y a toutes les chances qu'on aperçoive mille et unes merveilles au cours de cette odyssée, et il y a même une petite chance pour qu'on devienne riches et heureux comme des princes et princesses.

Ce qui est certain, c'est qu'on va se prendre des vagues sur la tronche :pirate:

En tout cas, tu raisonnes avec beaucoup d'acuité, ça fait plaisir de voir qu'il y a des sophiaphiles dans ta génération ! Alors l'Humanité n'est peut-être pas perdue !
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Euthyphron
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Euthyphron »

Je ne peux résister à la tentation de mettre un petit grain de sel, ne serait-ce que pour continuer le combat contre l'impossibilité de partager dont parle Rostay avec beaucoup de sensibilité.
Roka Ouran a écrit :Ouais, vouloir réfléchir, c'est à bien des égards prendre des risques.
Prendre le risque de découvrir qu'on est pas qui on croyait être. Pire : qu'on ne peut pas se définir à l'aide de juste quelques croyances, goûts personnels, appartenances à un groupe, à une culture...
Prendre le risque d'affronter la lucidité qui implique de devoir se définir seul, indépendamment de l'identification à d'autres
Prendre le risque de comprendre que les suppositions sur lesquelles se basent la vie quotidienne sont fausses
Prendre le risque de voir que le monde est toujours plus complexe qu'il en a l'air
Prendre le risque de s'égarer dans des doutes et des questionnements dont on pourrait se passer
Prendre le risque de faire fausse route
Prendre le risque de ressentir ses limitations
Tous ces risques (sauf celui que je n'ai pas cité, qui me semble relever d'autre chose) ont deux points communs :
1) la pratique de la philosophie amène immanquablement à les courir.
2) en réalité, il n'y a pas vraiment de risque car il n'y a aucun danger.
Il n'y a là que de vaines peurs, aucun châtiment n'est à craindre.
Or, dépasser ses peurs instinctives et vaines, n'est-ce pas l'essence même de la thérapeutique psychologique?
Merci Roka Ouran, je crois que le lien entre philosophie et thérapeutique est désormais bien cerné. La philosophie serait l'art de vaincre la peur ancestrale de la vérité.

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Roka Ouran
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Roka Ouran »

Absolument Euthyphron,
Tout ça se rapporte uniquement à la peur, peur de l'inconnu, peur du vide, peut de l'impermanence, peur de la mort.
In fine, je dirais en effet qu'il n'y a aucun danger, puisqu'il est plus sûr d'être lucide que de vivre dans l'ignorance de nous-mêmes et du monde.
A court terme, il y a un danger (surtout théorique mais dont la peur doit être bien implantée dans notre cerveau reptilien) à se séparer du groupe, remettre en question ses croyances, renoncer à l'identification avec le collectif.
Du coup, je n'ai jamais rien lu précisément sur ce sujet, mais il me semble que la pensée philosophique est dure à dissocier de l'individualité.
Malgré les clichés sur la philosophie orientale, il me semble là aussi que dans nombre de cas, (je pense à des exemples dans le bouddhisme et le taoïsme), pour atteindre l'état de libération, il est considéré comme nécessaire de s'extraire de la volonté de copier les autres, de plaire aux autres, de s'adapter à une idée que l'on a apprise.
(ce qui me semble vrai, c'est qu'il y a peu de valorisation du mérite personnel, ou de la réalisation personnelle).
je crois que le lien entre philosophie et thérapeutique est désormais bien cerné. La philosophie serait l'art de vaincre la peur ancestrale de la vérité.
Attend, attend :
qu'est-ce qui fait que vaincre la peur de la vérité peut être considéré comme thérapeutique ?
Les maux se résument-ils à cette peur ?
Ou bien découlent-ils tous nécessairement de cette peur ?
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Euthyphron »

Roka Ouran a écrit : Attend, attend :
qu'est-ce qui fait que vaincre la peur de la vérité peut être considéré comme thérapeutique ?
Les maux se résument-ils à cette peur ?
Ou bien découlent-ils tous nécessairement de cette peur ?
Pour la première question je sacrifierai à l'un de mes démons : la lapalissade constructive.
Les remèdes à la peur de la vérité peuvent être considérés comme thérapeutiques dans la mesure où la peur de la vérité peut être considérée comme une maladie.
Sans doute faut-il essayer d'en dire un peu plus. Alors je dirai que la peur de la vérité fragilise les relations avec soi-même, avec le monde, avec les autres, sans rien apporter en échange. Elle enclenche un cercle vicieux, comme sa forme la plus connue qui est le mensonge, et qui oblige à trouver d'autres mensonges pour sauver le premier.
Quant à savoir si tout est là, cela semble a priori absurde. Il y a tellement de choses qui font mal dans la vie, ne serait-ce que les problèmes de santé. Toutefois, l'art de les affronter pourrait s'identifier à l'art de regarder la vérité en face. Les problèmes qui semblent ne pas être liés à la question de la vérité le seraient quand même, dans la mesure où ce qui fait mal c'est ce qui rend plus difficile notre capacité à accepter le vrai. Il y a des cas où il faut de la morphine, au sens propre ou au sens figuré.
Je hasarderai une hypothèse : poser que tous les maux se ramènent à la peur de la vérité serait ce qui définit une démarche de type spirituel, y compris lorsqu'elle est matérialiste.

Rostay
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Rostay »

Bonjour !
Roka Oura : merci de ta réponse ! Un vent de fraîcheur dans l'atmosphère oppressante de la nuit !
"1- beaucoup de gens interpréteront les philosophes dans un sens qui les rassure intellectuellement, et 2- la philosophie, telle que je la conçois, est un peu résistante à la fossilisation dans un bouquin : il n'y a qu'à voir les âneries écrites par Schopenhauer sur les femmes, ou certaines démonstrations bien foireuses de Kant"
-> C'est pour ces raisons que je pense qu'un bon enseignement philosophique nécessite des connaissances assez variées que ce ne soit sur les thèses d'auteur, d'analyse de texte et du vocabulaire. Cela permet d'avoir une vision nécessairement objectif.
-> Kant ? Je l'adore mon petit Kant, qu'a-t-il fait de mal mis à part ses idées sur l'impératif catégorique qui sont trop restreintes par rapport à l'originalité de chaque homme ?

"A moins que le bouquin ne soit spécifiquement un traité pour apprendre à penser par soi-même (quelqu'un connaît un philosophe qui aurait écrit ce genre de chose ??)"
-> Je ne connais pas d'oeuvres traitant uniquement de ça. Les méditations de Descartes veulent montrer qu'il faut faire table rase de ses enseignements pour pouvoir atteindre la vérité (en plus d'adopter une méthode). Mais ils développent plein d'autres idées dedans.
Après il y a ce que j'appelle "la philosophie de comptoir" qui regroupe tous les petits livres de 40 pages qui explique aux personnes un peu perdus comment "favoriser sa chance", "apprenez à être vous-même". Qui sont plus endoctrinant que dactilogique...

"Comment se fait-il que notre société considère que :
ou bien a) l'aptitude à penser par soi-même n'est pas suffisamment importante pour l'aborder aussi tôt que l'éducation civique, le dessin, la musique, la physique-chimie ou l'éducation sexuelle"

ou bien b) les gamins sont trop stupides pour apprendre à penser par eux-mêmes tant qu'ils n'ont pas au moins 17 ans."
-> Je suis peut-être trop biaisée mais j'ai l'impression que les jeunes de nos jours sont de plus en plus idiots. Ils ne cherchent pas à penser mais à se complaire dans une vie niaise avec des idées préconçues.
J'ai été dans le meilleur lycée de Paris, donc le niveau devrait être plus "élevé" et pourtant je suis tombée sur des gens cultivés mais vide comme une coquille, dépourvus de sens moral, d'aptitude à penser par soi-même.
Si l'on souhaite régler le problème il faut agir vite et tôt sur ces générations qui dégringolent.

"Il avait alors fait un geste de la main en souriant, exprimant que je me trompais probablement très lourdement sur ce point..."
-> Je ne pense pas que tu te trompes lourdement sur ce point. je suis d'accord avec toi et je n'ai que 18 ans ! D'autres le seront sûrement, les sciences et la philosophie évoluent, les mentalités avec. Je pense que dans quelques années les gens comprendront que la philosophie peut aider la science autant que la science peut aider la philosophie :)

"L'homme qui pense véritablement par lui-même n'est pas écouté. Parce qu'il représente un danger pour la société, la religion, les choses instituées"
-> J'ai trouvé ma nouvelle citation préférée ! Je pense que l'homme a peur du doute. Nous sommes courageux dans ce sens là, où nous n'avons pas peur d'aller au delà de ce que la société nous propose, d'aller droit dans l'ignorance et d'y demeurer longtemps, afin de pouvoir apporter les réponses qu'il nous manque.

"Aucun mot, aucun concept ne peut décrire la félicité de ceux qui, timidement, s'approchent de la Vérité sans jamais pouvoir la saisir complètement... :inlove: "
-> Je t'avoue qu'il n'y a pas plus beau et plus grand que ce sentiment que tu décris. Socrate l'a si bien montré ! Le poisson torpille (Socrate) paralyse (questionne) ses victimes (les gens) par son choc électrique (l'art de la maieutique) !
Et j'avoue, j'aime être électrocutée !

Euthyphron : je te remercie de ton grain de sel !
"La philosophie serait l'art de vaincre la peur ancestrale de la vérité."
-> Ce que tu dis me rappelle une idée développée par Kant. Il explique que l'homme pose deux barrières entre lui et la vérité :
- la lâcheté : car la vérité nécessite du courage, on va contre les opinions des autres, on ose sortir de nos certitudes pour en savoir plus...
- la paresse : eh oui ! L'acheminement jusqu'à la vérité est long et semé d'embûches ! Il faut réfléchir, se remettre en question, se cultiver...



Je rajouterai que la vérité semble nécessaire si l'on établit un lien spirituel et matériel entre le corps et l'âme et/ou l'esprit. Par exemple, une étude allemande a montré que les personnes âgées en fin de vie avaient une vie plus longue et sereine SI elles savaient et acceptaient leur finitude.
Dès lors, la vérité, même difficile à accepter, permet une sérénité de notre personne et nous apporte les bienfaits que ce ne soit dans le monde matériel ou intelligible.

Merci de toutes vos réponses ! :)
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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Euthyphron »

Roka Ouran a écrit :A moins que le bouquin ne soit spécifiquement un traité pour apprendre à penser par soi-même (quelqu'un connaît un philosophe qui aurait écrit ce genre de chose ??)
Cela me fait aussi penser à ce que l'on appelle la critique de l'écriture dans le Phèdre de Platon. Ce texte, écrit, montre que la pensée vivante se fait oralement, par le dialogue, et que celui qui identifie la vérité à quoi que ce soit d'écrit fait preuve d'une grande naïveté, en prenant ce qui n'est qu'un aide-mémoire pour cela même dont il faut se souvenir. Bien entendu, le lecteur est prié, sans qu'on lui demande, d'appliquer immédiatement cette leçon au texte qui dit cela. Comme souvent chez Platon, c'est extraordinairement subtil.
Rostay a écrit :Ce que tu dis me rappelle une idée développée par Kant. Il explique que l'homme pose deux barrières entre lui et la vérité :
- la lâcheté : car la vérité nécessite du courage, on va contre les opinions des autres, on ose sortir de nos certitudes pour en savoir plus...
- la paresse : eh oui ! L'acheminement jusqu'à la vérité est long et semé d'embûches ! Il faut réfléchir, se remettre en question, se cultiver...
Je pense que tu évoques "Qu'est-ce que les Lumières?". Cependant, sauf le respect que je dois à Kant, et juste pour le plaisir de critiquer, je trouve que ce n'est ni vraiment risqué ni vraiment harassant de penser par soi-même. Tous les hommes font des choses beaucoup plus épuisantes ou dangereuses. Je trouve que Kant donne ici un peu trop facilement le beau rôle au philosophe. Il n'est pas nécessaire d'être un héros pour philosopher, je ne crois vraiment pas, si?

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Re: La philosophie comme thérapeutique

Message par Rostay »

Euthyphron : " Cependant, sauf le respect que je dois à Kant, et juste pour le plaisir de critiquer, je trouve que ce n'est ni vraiment risqué ni vraiment harassant de penser par soi-même. Tous les hommes font des choses beaucoup plus épuisantes ou dangereuses. Je trouve que Kant donne ici un peu trop facilement le beau rôle au philosophe. Il n'est pas nécessaire d'être un héros pour philosopher, je ne crois vraiment pas, si?"

Oui, j'évoque cette oeuvre !
Je pense qu'il évoque un autre type de danger que ceux que l'on voit typiquement : la guerre, les violences (physiques ou psychologiques)... Penser peut se révéler dangereux, ça dépend à quel siècle, sous quel régime, dans quel contexte... Les idées sont formatrices de ce que l'on vit aujourd'hui. Sans le concept de liberté, nous n'aurions pas construit ce système là.
Donc penser, réfléchir nécessite une certaine forme de courage et une certaine forme de travail. Car toutes pensées structurées nécessitent un travail au préalable, mais aussi de quitter cette bulle protectrice que nous offre nos ignorances.
Alors, je ne pense qu'il mérite une critique aussi dur, quand bien même, j’acquiesce, le fait qu'il puisse donner le bon rôle au philosophe. Mais on ne niait une part de réalité dans son constat :)
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